Critique : Un prophète

Sandy Gillet | 16 mai 2009
Sandy Gillet | 16 mai 2009

Petite frappe sans envergure, Malik El Djebena est condamné à six ans de prison. À 18 ans tout juste, le voici donc lancé sans transition dans le grand bain du monde des durs où il faut s'adapter très vite si l'on veut survivre. Vous avez dit Oz ? Dans le mille ! Un prophète, le nouveau Audiard qui revient à Cannes après y avoir obtenu en 1996 le prix du meilleur scénario pour Un héros très discret, s'appuie sur un espace temps donné et un lieu anxiogène pour marquer de son empreinte une histoire faite de chair et de sang.

Un film organique donc mais aussi minéral à l'image de sa photo toujours travaillée dans le glauque et les zones d'ombre. On est en terrain connu et pourtant le cinéaste arrive encore à nous surprendre. Grâce en soit rendu à ses acteurs avec en tête de liste un Tahar Rahim jusqu'ici inconnu, le prophète du titre, qui apporte au scénario d'Audiard et de Thomas Bidegain (sur un script d'Abdel Raoul Dafri auteur du Mesrine de Richet) toute la densité nécessaire pour que l'on croit à tout ce qui se déroule durant les 2h35 du film et cela sans l'ombre d'une hésitation ni aucun ennui.

Un prophète fait partie de ces films précieux où chaque minute de pelloche est un vrai et pur bonheur pour tous les sens. On sent l'enfermement au quotidien, on ressent l'adrénaline à chaque instant et ce même dans les séquences les plus intimes (celle composée de deux plans avec un nourrisson se lovant dans les bras du héros est à ce titre extraordinaire d'harmonie esthétique et de beauté sensuelle). On savoure enfin la bande-son comme toujours ultra travaillée rendant à merveille compte de l'univers carcéral à la française.

Un prophète est un condensé de Oz oui sans aucun doute mais aussi de Sur Ecoute dans sa propension à rendre compte d'une trajectoire sinueuse et admissible entre le bien et le mal. Mais Audiard nous emmène encore plus loin, là où cette frontière trouble entre ces deux concepts moraux disparaît totalement au profit d'une autre qui prend forme lors du dernier plan magnifique annonciateur de lendemains de cinéma toujours plus excitants ! Une promesse en forme de prophétie ?

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