La Horde du Contrevent : La Flaque de Lapsane - un tome 3 qui souffle fort

La Rédaction | 28 octobre 2021 - MAJ : 29/10/2021 17:19
La Rédaction | 28 octobre 2021 - MAJ : 29/10/2021 17:19

Depuis 2017 et la parution du premier tome de La Horde du Contrevent, s’est initiée une passionnante relecture du roman culte d’Alain Damasio, dont le 3e tome est publié le 27 octobre 2021. 

Le défi était colossal, et bien des artistes s’y seraient cassé les dents, avant d’être balayés par des bourrasques d’ambition mal placée, mais pas Eric Henninot, seul au scénario comme au dessin depuis les débuts de cette impressionnante adaptation. Grâce à lui, nous retrouvons donc la 34e Horde, décidée, comme toutes celles qui ont échoué avant elle, à rejoindre L’Extrême-Amont, là où naissent les vents qui mutilent un vaste territoire où l’humanité lutte chaque jour pour une survie précaire. Les pluies guettent, la mort souffle, et La Flaque de Lapsane nous emporte.

 

photoUne tempête approche

 

SE FAIRE LA BRISE

Paradoxalement plus soudée que jamais, mais menacée à chaque instant de voir sa cohésion se rompre et son existence s’interrompre, la Horde lutte contre les typhons, tornades et ouragans. Alors que tous approchent de leur but ultime, le secret maternel de Callirhoé comme les efforts désespérés de Sov pour soutenir ses compagnons d’infortune vont pousser chacun d’entre eux dans les derniers retranchements de leur humanité, sous les yeux inflexibles de leur traceur. 

On pourrait croire cette chronique d’une avancée désespérée sans cesse menacée de s’écrouler sur elle-même, et pourtant, son écriture réussit le tour de force de renouveler sans cesse les enjeux et les conflits. Simple opposition, crise de confiance ou défiance plus profonde, les fractures qui vulnérabilisent la Horde s’incarnent toujours intelligemment, et s’agencent selon un tempo parfaitement réglé. Tempo qui joue habilement du texte revisité, comme de la mise en scène, ou de l'interprétation d'éléments autrefois laissés à l'imagination du lecteur (comment restituer la démence du Furvent ?).

 

photoUn récit jamais ensablé

 

Une nouvelle fois, le travail d’adaptation d’Eric Henninot impressionne par son audace, sa cohérence et son intelligence. Centré sur les voix de plus d’une vingtaine de personnages, le roman de Damasio formait un récit éclaté, aux tonalités changeantes et au style toujours mouvant. N’épousant jamais un aussi strict découpage, la bande-dessinée en conserve pourtant la dimension chorale, évidente et proéminente, sans jamais qu’un protagoniste ne semble prendre le pas sur les autres, ou appauvrir un matériau original dont la polyphonie était la force.  

Cette finesse apparaît de nouveau dans la structure de la narration. On se souvient que le texte culte s’amusait en se paginant à rebours, et en utilisant d’une série de “trucs” soulignant sa singularité. La présente adaptation ne se risque jamais à ce genre d’effets, et préfère une ligne claire narrative qui fait des merveilles dans ce troisième tome. En effet, les tensions bouillonnent, Henninot sait parfaitement les utiliser pour les marier dramaturgiquement et visuellement. 

 

photoUn certain art de la bourrasque

 

UNE FLAQUE QUI CLAQUE 

Plastiquement, le challenge était également notable, puisque La Flaque de Lapsane est l’occasion d’un renouveau dans le décor général de l’épopée, les étendues sablonneuses, calcinées par le soleil, laissant progressivement la place à une nature bien différente. Elle a bien sûr marqué les lecteurs de Damasio, nombreux à s’être représenté les alentours de la Tour Fontaine, son immensité aqueuse, faussement calme, percée par des cimes d’arbre attendant la saison des pluies. 

Henninot avait déjà prouvé par deux fois la sûreté de son trait, l’assurance avec laquelle il parvenait à capturer la dureté des visages burinés, le mouvement des corps désarticulés par les typhons, ou encore la brutale fluidité des bourrasques. Mais jusqu’à présent, on sentait encore son découpage et la composition de ses images un peu trop ordonnées, mathématiques. Une limite qui disparaît avec ce 3e tome. Tout y est plus organique, et de conflits en dangers mortels, la Horde gagne autant en humanité qu’en émotions éruptives. 

 

photoUne ampleur merveilleuse

 

Une réussite à mettre également au crédit de Gaétan Georges qui s’occupe de la colorisation de la bande-dessinée avec beaucoup de réussite. S’il ne tranche jamais radicalement avec son très bon travail sur les deux précédents tomes, le renouvellement du décor lui va à merveille et décuple encore l’ampleur de l’ensemble. 

Avec ce troisième volet, La Horde du Contrevent s’impose une nouvelle fois comme une relecture profonde de la géniale création de Damasio, une réinterprétation à la fois fidèle et libre. Et c’est probablement ce qui achève d’en faire une réussite digne de nous souffler dans les bronches.

Ceci est un article publié dans le cadre d'un partenariat. Mais c'est quoi un partenariat Ecran Large ?

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commentaires
Fridrich
31/10/2021 à 14:28

C'est vraiment inadmissible, j'aurais aimé le voir ce film New god, même si c'est réalisé par une femme, je n'ai jamais dit qu'une femme ne pouvait pas être une très bonne réalisatrice, mais we live in a society et on ne pourra pas avoir ce film, car "WE LIVE IN A SOCIETY"

Zapan
28/10/2021 à 21:38

Eric Henninot est un Golgoth, un vrai de vrai pour s'être lancé seul dans l'adaptation de ce chef-d'œuvre de fantasy fr.