DCeased 2 : critique qui a encore faim

Arnold Petit | 15 novembre 2021 - MAJ : 15/11/2021 15:07
Arnold Petit | 15 novembre 2021 - MAJ : 15/11/2021 15:07

Après le sympathique DCeased, dont l'immense succès a engendré le touchant DCeased : Unkillables, puis DCeased : Hope at World's End, Tom Taylor est de retour dans son univers horrifique pour DCeased 2. Dans cette suite, parue le 12 novembre en France chez Urban Comics, le duo continue de surprendre et réjouir avec une aventure entre super-héros, zombies, affrontements cosmiques et arts mystiques.

LE RETOUR DES ANTI-VIVANTS

Dès la première page, DCeased 2 plante le décor : toutes les plus grandes figures de l'univers de DC sont mortes, comme l'illustrent la tête décapitée de Cyborg et les versions zombifiées de Batman, Flash, Aquaman ou Green Lantern. Les super-héros et les personnes infectées par la forme corrompue de l'Équation d'Anti-Vie de Darkseid ont condamné le monde au chaos et les survivants ont donc été contraints de s'exiler sur une autre planète.

Cinq ans plus tard, ceux qui ont réchappé au massacre ont fondé une nouvelle société, dirigée par Loïs Lane. Jon Kent, Damian Wayne et Cassie Sandsmark sont devenus les nouveaux Superman, Batman et Wonder Woman. Alors qu'ils assument pleinement leur rôle de super-héros aux côtés de Black Canary (toujours une Green Lantern) et de Green Arrow, rescapés de l'ancienne Justice League, un signal de détresse de la Terre va les pousser à retourner dans l'enfer qu'ils avaient quitté pour essayer de sauver ce qu'il en reste.

 

photoLes fantômes du passé

 

Même s'il consacre quelques pages à rappeler ce qui s'est passé plut tôt avant de lancer son récit, Tom Taylor démontre tout de suite sa capacité à saisir les sentiments de ses personnages et à les retranscrire dans les dialogues ou la narration de Zatanna. À l'instar d'Injustice, de DCeased et ses spin-offs ou des autres titres sur lesquels il a écrit, comme Suicide Squad ou Nightwing, le scénariste excelle dans la caractérisation de ses héros, la définition de leurs émotions et la gestion de leurs relations.

 

photoUne case qui rappelle DCeased : Hope at World's End et la fraternité entre les Super Sons

 

Une seule case ou un simple échange suffit à montrer la complicité que partage Damian et Jon, l'humour cynique qui détermine Oliver ou la tendresse que porte Loïs pour ce nouveau Superman, qui n'est pas encore à l'aise à l'idée de reprendre le nom de son père. Des instants proprement drôles ou déchirants, qui rendent la disparition de certains héros encore plus tragique.

Le fond blanc dans lequel s'installent ces cases renforce d'ailleurs cette impression d'assister à un moment suspendu dans le temps, comme s'il fallait apprécier l'amour ou la gravité qui s'en dégage avant que les combats et la tuerie reprennent (mais peut aussi être vu comme un bon moyen de gagner du temps sur plusieurs planches, d'autant que les décors ne sont pas des plus mémorables).

 

photoTel père, tel fils

 

FROM HELL

Comme Injustice ou DCeased, DCeased 2 reste un divertissement conçu pour le plus grand nombre et tient ses promesses par des rebondissements percutants, des morts brutales et sanglantes et une aventure à la fois épique, cosmique et magique. Cette suite reprend tout ce qui a fait le succès du premier volume, ou presque, puisque les ambitions du récit dépassent l'horreur pour atteindre d'autres genres et aborder différents thèmes.

Damian, Jon et Cassie se retrouvent tous les trois confrontés au poids de l'héritage de leurs aînés, essayant de se montrer à la hauteur des attentes placées en eux, tandis que John Constantine, Zatanna et d'autres héros magiques font face à des menaces encore pires que des hordes de zombies (ou d'Anti-Vivants, plus exactement).

 

photoMagic Squad

 

Dès lors, une course contre-la-montre s'installe, le scénario se scinde en plusieurs sous-intrigues et passe dans les différents plans de l'univers de DC (sur Terre, dans l'espace et par la dimension mystique), offrant au passage des scènes d'action plutôt saisissantes. Le trait de Trevor Hairsine n'est pas aussi précis ou convaincant que ce qu'il a pu être sur Divinity, mais ne l'empêche pas pour autant de composer des pages dantesques lorsque les héros affrontent un Plastic Man zombifié ou mènent un assaut sur le bunker où se sont réfugiés Le Pingouin et d'autres super-vilains avec leur armée de mercenaires et d'Amazo.

 

photoLa terreur sous toutes ses formes

 

De nombreux personnages, comme les Néo-Dieux, Ragman, Etrigan ou encore Dead Man, se retrouvent impliqués dans la bataille et Tom Taylor continue de démontrer son impressionnante compréhension de l'univers de DC à travers l'apparition de certains héros, l'utilisation d'objets magiques comme la Tour de Garde et des références au Swamp Thing d'Alan Moore, au Hellblazer de Jamie Delano ou au Mister Miracle de Tom King. La générosité et la richesse du récit traduisent assez nettement le plaisir qu'a pris le scénariste à imaginer cette histoire entre horreur et super-héros et le plan énigmatique de John Constantine, qui se dessine au fur et à mesure.

 

photoAvec un Doctor Fate malmené par John

 

DCeased : A Good Day To Die (publié avec DCeased en France) avait déjà mis le maître de l'occulte en avant et avec Damian Wayne et Jon Kent, John Constantine est sans doute l'un des héros les plus importants de DCeased 2, mais aussi un des mieux développés. L'amour de l'auteur pour le personnage et le versant mystique de l'univers de DC transparaît distinctement au fil des pages, notamment vers la fin (et l'a sans doute motivé à s'associer à Darick Robertson pour écrire le plaisant Hellblazer : Rise & Fall).

 

photoAnges et démons

 

UN NOUVEL ESPOIR

Cependant, même si la catastrophe prend une ampleur inattendue et que les enjeux s'élèvent continuellement, le récit ne perd jamais son objectif de vue ou ses personnages. Contrairement à Scott Snyder ou Geoff Johns, qui ont tendance à se perdre dans des récits faussement complexes, faits de concepts invraisemblables et de retournements de situations absurdes (comme l'ont encore prouvé l'infâme Batman : Trois Jokers ou le pénible Batman : Death Metal), Tom Taylor sait où il veut aller et ce qu'il veut raconter avec ses personnages.

 

photoQuand Mère Nature prend sa revanche

 

DCeased était une imitation correcte de Marvel Zombies et de son apocalypse, DCeased : Unkillables s'intéressait à la survie des laissés-pour-compte pendant le massacre, puis DCeased : Hopes At World's End ramenait finalement une lueur d'espoir qui brille dans DCeased 2. Un espoir incarné par Jon Kent et le symbole qu'il arbore sur sa poitrine, par Damian Wayne, Cassie Sandsmark, Mary Marvel, Cassandra Cain et Wally West, mais aussi par l'implication de John Constantine, salaud invétéré qui s'intéresse enfin au sort de l'humanité et devient le héros qu'il refusait d'être.

 

photoUne nouvelle Justice League

 

Et si l'analogie entre l'infection de l'Équation d'Anti-Vie zombie et la crise sanitaire était déjà présente dans DCeased : Hope At World's End (dont la publication en numérique avait justement était décidée à cause de la pandémie), DCeased 2 ressemble aussi à un commentaire autour de l'ère post-Covid, de l'après.

Par-delà les morts, les zombies et la résilience dont font preuve les héros, il y a aussi un appel à rassembler la jeune génération, les oubliés, les esprits les plus brillants du monde et même les pourris qui se rachètent une conscience pour lutter contre l'individualisme et agir au nom du bien commun. Un message qui peut paraître un peu naïf, voire carrément niais, pour certains, mais qui conserve pourtant toute sa pertinence encore aujourd'hui.

 

photoC'est qui le gentil toutou à son Batounet ?

 

Aussi bienveillant soit-il, DCeased 2 n'est quand même pas exempt de défauts. Le scénario use de quelques facilités et ressorts classiques pour faire avancer ses différentes intrigues jusqu'à l'immense affrontement final, qui fera frémir n'importe quel fan de DC. Mais certains éléments sont laissés en suspens et la conclusion n'est pas aussi maîtrisée ou grandiose qu'espérée, à l'image des dessins de Trevor Hairsine. Malgré une inventivité certaine et réjouissante, l'abondance de héros et de concepts magiques finirait presque par surcharger l'ensemble.

Si la plupart des personnages (même secondaires) sont plutôt bien développés, d'autres comme Zatanna, Harley Quinn ou la nouvelle Wonder Woman auraient mérité plus de scènes pour qu'on puisse s'y attacher. Néanmoins, il ne faut pas bouder son plaisir non plus ou se montrer trop exigeant envers DCeased 2, qui reste une suite plus que satisfaisante que d'autres projets éditoriaux comme le décevant Future State.

DCeased 2 est disponible en France chez Urban Comics depuis le 12 novembre 2021

 

photo

Résumé

Avec un plaisir contagieux et une impressionnante connaissance de l'univers de DC et de ses personnages, Tom Taylor compose une histoire toujours aussi sanglante et poignante, qui parvient à transcender le genre horrifique pour explorer d'autres horizons. Malheureusement, si DCeased 2 comblera les fans de l'auteur et de ses zombies, cette suite n'est pas aussi grandiose que le premier opus.

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.
commentaires
Aucun commentaire.
votre commentaire