Test Jedi : Survivor – peut-on vraiment parler d’un des meilleurs jeux Star Wars ?

Antoine Desrues | 11 mai 2023 - MAJ : 11/05/2023 18:00
Antoine Desrues | 11 mai 2023 - MAJ : 11/05/2023 18:00

Malgré les polémiques qui ont émaillé sa sortie au vu de l’état de sa technique (surtout sur PC), Star Wars Jedi : Survivor a connu un démarrage canon, et une réception globalement enthousiaste. Si les nouvelles aventures du Jedi renégat Cal Kestis dépassent les acquis solides mais timides de Fallen : Order, tient-on vraiment “le jeu Star Wars dont on a toujours rêvé" ?

L'attaque des bugs

Depuis le fiasco Cyberpunk 2077, les joueurs s’habitueraient presque à brûler des cierges avant la sortie du prochain AAA très attendu. De la trilogie GTA à Pokémon Ecarlate et Violet en passant par Battlefield 2042, le lancement d’un jeu peut être sujet à une roulette russe des plus désagréables en matière de performances et de bugs. Bien sûr, il convient moins de pointer du doigt les développeurs que les pressions d’éditeurs toujours plus prompts à précipiter des dates de sortie, afin de rassurer les investisseurs à chaque bilan financier.

Dans le domaine, Electronic Arts est un peu devenu le champion catégorie poids relou du foutage de gueule, au point où on ne s’étonne guère de voir Star Wars Jedi : Survivor gâcher son bel écrin par des débuts désastreux. Les joueurs PC ont été une nouvelle fois les dindons de la farce, mais même sur consoles (ce test a été réalisé sur PS5), l’immersion et la jouabilité ont été entachées à moult reprises par des textures qui vont et viennent, des chutes drastiques de framerate (y compris en mode graphique, pourtant locké à 30 FPS) et même par quelques crashs.

C’est d’autant plus dommage que, dès son introduction flamboyante sur Coruscant, la suite de Fallen : Order bombe le torse pour montrer que l’Unreal Engine 4 en a encore dans le ventre. Avec ses nombreux effets de lumières dynamiques qui viennent sublimer sa direction artistique, le titre de Respawn donne vie à chaque centimètre carré de l’univers foisonnant de Star Wars, que ce soit en recréant la mégalopole futuriste ou le désert de Jedha.

 

Star Wars  Jedi : Survivor : photoUne arme noble... pour faire le gros bourrin

 

En réalité, Jedi : Survivor n’a pas besoin de faire beaucoup d’efforts pour transformer l’essai, tant les jeux liés à la création de George Lucas se sont contentés du minimum syndical depuis le rachat de Lucasfilm par Disney. Avec sa nature de Metroidvania mêlé à du Dark Souls et à une pointe de Naughty Dog, la saga a l’attrait du best-of généreux dans lequel on aurait ajouté des sabres-laser.

L’idée est déjà alléchante, mais ce deuxième opus a pour lui de bouffer joyeusement à tous les râteliers, et de piocher dans un héritage fantasmatique de la franchise. D'une certaine façon, la première séquence donne le la, en réinvestissant la démo du jeu abandonné Star Wars 1313, qui voulait déjà nous plonger dans les entrailles de Coruscant dans un TPS à base d’action et de plateforme. De la même manière, l’aisance acquise par Cal Kestis rapproche ce nouveau volet de la nervosité du Pouvoir de la Force, tandis que la naïveté de Fallen : Order est ici troquée pour un rapport plus ambigu à la Force et au Côté Obscur, digne du Kyle Katarn de la série Jedi Knight.

 

Star Wars  Jedi : Survivor : photoPerso, on a beaucoup joué avec le double-sabre

 

La colère mène à la haine

En bref, Respawn mixe et recycle les grandes heures de Star Wars en jeu vidéo, c’est-à-dire tout ce qui a été retiré du canon dans la chronologie de Disney. Comme une sorte de reboot méthodique dont Fallen : Order aurait été l’embryon, Jedi : Survivor ne réinvente certainement pas la roue, mais a le mérite de condenser tout ce qu’on peut aimer dans Star Wars et dans sa transposition vidéoludique, un peu comme The Mandalorian l’a fait du côté des séries télé.

Là où son prédécesseur n’arrivait à façonner qu'une poignée de moments épiques au cœur d’une narration un brin laborieuse, cette suite prouve que Respawn a revu sa copie et son ambition. Tout est plus vaste, plus rempli, et surtout plus soutenu en matière de rythme. Certes, il est toujours question de faire des allers-retours entre quelques planètes, mais le sentiment de progression est épaulé par la diversité des décors et du level-design, qui imbriquent de façon maline les multiples capacités et autres pouvoirs de Force accumulés par Cal au fil de sa quête.

 

Star Wars  Jedi : Survivor : photoLes décors, l'un des gros points forts du jeu

 

Sur ce point, impossible de ne pas s’attarder sur Koboh, lieu principal de l’aventure qui recèle autant de mystères que d’environnements variés. D’une grande plaine présentée comme la promesse d’un monde semi-ouvert, le joueur se voit embarqué dans les ruines d’une civilisation perdue, dans une base impériale imposante ou encore au milieu des nuages. Jedi : Survivor aime nous faire prendre de la hauteur, et créer un vertige “à la Caspar Friedrich” avec quelques-uns de ses panoramas, qui éveillent un sentiment trop peu exploité dans l’univers de Star Wars.

Le premier jeu avait déjà pour crédo l’exploration des vestiges d’un temps révolu, mais sa suite va clairement plus loin, et donne un sens particulier à ses éléments de gameplay a priori plus anodins (comme ces échos de la Force, ces instants du passé qui donnent de l’expérience à notre avatar). Tout repose sur le désespoir d’une guerre perdue d’avance, et sur la destruction inévitable des rêves d’une vie.

 

Star Wars  Jedi : Survivor : photoIl y a même quelques montures

 

Cal Kestis a beau se rattacher à la moindre bribe d’espoir dans son combat face à l'Empire, il n’est lui-même qu’un petit rouage dans la mythologie de Star Wars. Respawn ne peut pas s’empêcher de céder parfois à des facilités de fan-service, mais le héros reste suffisamment isolé pour que son histoire s’envole de ses propres ailes, et qu’elle soit envahie inexorablement par le Côté Obscur.

C’est d’ailleurs dans la noirceur assumée de son scénario que Jedi : Survivor surprend le plus, d’autant que le titre bouscule dès le départ le statu quo du précédent opus par une ellipse bienvenue. La mort rôde et engendre un véritable sentiment de danger pour les personnages, alors que les cinématiques (soutenues par des performances d’acteurs convaincantes, à commencer par celle de Cameron Monaghan) explorent sobrement leurs relations et le cœur émotionnel du récit.

 

Star Wars  Jedi : Survivor : photoCal, souvent croise le fer

 

Cal, survivant de l'enfer

Si ce postulat s’avère engageant par son sérieux assumé et ampoulé, il porte en lui la profession de foi plutôt fun de Jedi : Survivor. Face à ce monde en décrépitude, tous les moyens sont bons pour amener Cal à s’éloigner de la rigidité des dogmes Jedi. Cela implique notamment cinq maniements différents de sabre-laser – tous intéressants à jouer –, dont un où l’arme noble est combinée avec un blaster (“So uncivilized”, dirait Obi-Wan).

Avec un paquet d’arbres de compétences et la limite de variations des styles (on ne peut garder que deux postures de sabres à la fois, modifiables à chaque point de sauvegarde), le titre pousse à l’expérimentation du joueur et à son adaptabilité, tandis que le game design s’amuse gaiement à nous envoyer au visage des droïdes tenaces, des pillards de l’espace et autres Rancor.

 

Star Wars  Jedi : Survivor : photoRancor une ptite partie

 

Le dépaysement de Jedi : Survivor est évident, et suffit sans doute à prouver à quel point l’univers de Star Wars demeure excitant et intemporel. Néanmoins, pour revenir à ce qui a été dit plus tôt, la réussite du jeu reste finalement assez humble. Au-delà de piquer ses éléments de gameplay par-ci par-là, Respawn se montre toujours aussi peu inspiré dès qu’il s’agit de développer des quêtes annexes.

Certes, l’idée d’un hub central sous la forme d’une cantina est plutôt intéressante, mais elle aurait sans doute pu être approfondie avec d’autres éléments qu'un jardin à fleurir et un aquarium à remplir. Tant d’éléments bêtement programmatiques et légers, dans une proposition au demeurant passionnante et concernée. On préférera voir le verre à moitié-plein au vu de certains set-pieces spectaculaires (notamment cette course-poursuite face à une foreuse géante) et de sa dimension tragique, mais il y a encore du chemin pour faire de Jedi : Survivor l’un des meilleurs jeux Star Wars.

Star Wars Jedi : Survivor est disponible depuis le 28 avril 2023 sur PS5, Xbox Series et PC. Ce test a été réalisé sur PS5.

 

Star Wars  Jedi : Survivor : photo

Résumé

Si ses problèmes de finitions et ses quêtes secondaires pantouflardes déçoivent, Star Wars Jedi : Survivor reste une expérience grisante dans la galaxie lointaine, très lointaine, qui tient surtout à la qualité de son écriture et à l’expansion de son gameplay.

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commentaires
Copeau
12/05/2023 à 16:48

@Bilbo,
visiblement, pour vous c'est les "m" ou les "mm" qui vont poser problème ;)

Morcar
12/05/2023 à 09:35

J'avais trouvé le premier sympa, sans trouver ça phénoménal. Comme je n'ai pas d'attente particulière de cette suite, à part un bon divertissement dans la galaxie lointaine, je devrais y trouver mon compte, sans doute.

Tibert
12/05/2023 à 08:45

Poussif, une difficulté mal gérée, une histoire peu aboutie et une fin très décevante. Soit je suis passé complétement à côté du truc soit c'est vous qui n'y avez pas vraiment joué Autant j'avais adoré le premier autant là c'est la déception de l'année.

Zarbiland
12/05/2023 à 07:51

Ratage total, j'avais fini deux fois le premier, j'ai abandonné au bout de 10 heures de jeu. Techniquement douteux et ennuyeux au possible

Bilbo
11/05/2023 à 17:50

@la rédac : décidemment les "é" et "er" c'est pas votre truc...

Arthur
11/05/2023 à 14:52

J'ai bien du passer 2 minutes sur le Cal, souvent croise le fer pour déjà retrouver d'où ça venait et ensuite pour me demander si c'était fortuit. Et puis ensuite, j'ai lu : Cal, survivant de l'enfer.

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