Neill Blomkamp revient longuement sur l'échec de Chappie et de l'incompréhension du public sur le film

Un artiste n'aime pas voir son travail incompris. Quand l'honnêteté artistique, n'est pas récompensée, l'échec est d'autant plus difficile à regarder. 

Neil Blomkamp fait partie de ces réalisateurs qui ont besoin de libertés pour pouvoir laisser leur talent s’exprimer pleinement. Alors que le sud-africain semble on ne peut plus impliqué dans son nouveau studio Oats, le cinéaste revient sur son Chappie, considéré comme une semi-déception (un peu plus de 100 millions au box-office mondial, pour un budget d'une cinquantaine), tant on attendait beaucoup du bonhomme.

Deux ans après, Blomkamp revient donc sur l’accouchement dans la douleur de Chappie, oeuvre qui avait perdu tout le propos subversif et pertinent du brûlot politique SF qu’avait été District 9. Après le carton de son premier long, on avait été surpris de voir la suite de sa réalisation perdre de son mordant pour devenir des films loin d’être mauvais mais qui avaient perdu toute la profondeur propre à District 9. 

Neill Blomkamp et Hugh Jackman sur le tournage de Chappie

Le malheureux réalisateur revient donc aujourd’hui sur cette expérience douloureuse :

"Chappie était incroyablement dur pour moi. Difficile sur plusieurs niveaux. Le fait est que le film correspondait exactement à ce que j’avais en tête. Avant que le film ne sorte, j’avais la sensation d’avoir tout donné, que je ne pouvais pas faire mieux et j’étais satisfait de ça."

"Cela m’a mis dans une situation intéressante. J’avais, selon moi, fais le film que je voulais et j’étais très confiant là-dessus. Et puis le public l’a rejeté. Qu’est-ce que cela voulait dire ? Je ne me base pas sur le succès au box office ou sur Rotten Tomatoes. L’enthousiasme n’était pas au niveau de mes attentes, clairement."

Chappie 

On rejoint le cinéaste dans sa prise de recul sur le film, loin d’être un échec autant critique que public, mais qui laisse un arrière-goût d’inachevé.

Neil Blomkamp poursuit dans son analyse de Elysium :

"Là est toute la différence entre Chappie et Elysium. Chappie m’a vraiment fait réfléchir sur ma place en tant qu’artiste, ce que je pouvais vraiment apporter au cinéma, cela a représenté un long travail introspectif sur moi-même. Je n’ai pas ressenti ça pour Elysium. Je sentais qu’Elysium n’était pas si bon que ça. C’est ce qui le différencie de Chappie. Je pensais avoir tout bien fait pour Chappie, le choc était d'autant plus violent."

Matt Damon dans Elysium

On voit que la pilule est toujours plus difficile à avaler mais on ne peut que comprendre le réalisateur. Ici les studios ne l’ont pas brimé, n’ont en rien interféré dans son processus créatif ou directement sur le tournage. Il est toujours difficile pour un artiste de voir son travail injustement mésestimé.

"Chappie avait un ton pop, fun et cool qui détonnait avec le propos sérieux du film. Ce paradoxe a peut-être déstabilisé les gens, qui ne l’ont pas compris. Le public s’est sûrement vu désorienté et s'est peut-être dit que je me moquais d’eux."

Il est vrai qu’aussi louable soit cette prise de risque, les spectateurs ont vraisemblablement été surpris par la dimension visuelle trop légère du film, censée illustrer un message politique plus profond qui détonnait avec l'ambiance du film.