Hacker : la cyber-traque de Michael Mann en cinq points

Simon Riaux | 18 mars 2015
Simon Riaux | 18 mars 2015

C’est le 18 septembre que sort sur nos écrans Hacker (ex Blackhat), le nouveau thriller de Michael Mann. Si le réalisateur a ses fans, ils n’auront su empêcher le four retentissant du film aux Etats-Unis.

Le métrage débarque donc chez nous dans 84 salles à peine, frappé du sceau de l’insuccès. Une situation regrettable, tant Hacker s’avère une œuvre profonde et complexe, en parfaite résonnance avec les travaux antérieurs de son auteur.

Pourquoi s’agit-il d’un pur film de Michael Mann ? La réponse en cinq points.

 

Le Spécialiste

Nick Hathaway (Chris Hemsworth) est un des meilleurs hackers au monde, doublé d’un athlète, décidé, sûr de lui, il n’hésite jamais ou presque et se focalise exclusivement sur son unique but. Il représente la quintessence du héros Mannien.

 

Il rappelle le perceur de coffre-fort du Solitaire, qui a imprimé sur une feuille de papier toutes les étapes de son programme vers la liberté. Il est le chauffeur de Taxi de Collateral, connaisseur ultime des moindre ruelles de L.A., dont la modeste carte postale accrochée à son rétroviseur lui rappelle le but qu’il s’est fixé. On le retrouve évidemment dans les deux héros de Heat, l’un braqueur de génie, l’autre flic obsessionnel, tout deux excellant dans leurs domaines respectifs, tout deux entièrement tournés vers l’accomplissement de leur mission.

Ces personnages sont autant de programmes, incapables de dévier de la trajectoire fixée, quand bien même elle les mènera à leur perte. Même Colin Farrell dans Miami Vice, s’il s’accorde une parenthèse amoureuse à Cuba, devra sacrifier Gong Li pour finalement rejoindre le flux auquel il appartient.

 

 

L’impossible fuite

Les personnages de Michael Mann tentent tous d’échapper à leur condition, sont tentés ou dévorés par l’idée de s’extraire d’un mouvement collectif, celui de leur civilisation, en quête d’un ailleurs.

La manière dont le cinéaste filme ici les visages à la limite du cadre, comme si tous cherchaient résolument à s’enfuir, nous renvoie au regard perdu vers l’océan de Farrell dans Miami Vice.

 

 

La Fusillade

Heat, Miami Vice, Public Ennemies… on ne compte plus les échanges de tir en milieux urbain dans le cinéma de Michael Mann. Au-delà du simple plaisir de film de genre, force est de constater que ces séquences, souvent sidérantes de violence et de puissance, sont presque instantanément reconnaissables.

Avec Hacker, Mann retrouve la maestria Collateral, où il parvenait à laisser le spectateur se repérer dans une boîte de nuit livrée à l’anarchie. Il réussit ici le tour de force de mener dans son dernier acte un mélange de poursuite, de combat et de fusillade au milieu d’un défilé traditionnel.

La fusillade chez Mann est synonyme de climax, ou au moins de point de rupture pour ses personnages. Lorsqu’ils ne peuvent plus supporter la pression du groupe, ou au contraire que ce dernier veut les ramener à lui, les tensions s’exacerbent et la violence surgit brutalement. C’est le cas lorsque De Niro et ses braqueurs mettent Los Angeles à feu et à sang dans Heat.

 

Le piratage

 

Si Hacker est le premier film du réalisateur à parler au sens propre du piratage informatique (sans grande originalité malheureusement), l’ensemble de sa filmographie peut être perçue comme un piratage géant.

En effet, le metteur en scène nous offre toujours des récits qui finissent par pervertir leur genre initial. Hacker se mue en film de poursuite implacable. Avant lui, Miami Vice mutait pour devenir une romance désabusée, Collateral en anti-buddy movie, Heat en récit d’amitié cruel, tandis que la Forteresse Noire dynamitait de l’intérieur le film de guerre pour aboutir à un conte fantastique grandiose.

 

L’abstraction

La force de Michael Mann est de savoir marier un style hyper-réaliste et un rendu visuel parfois proche de l’abstraction. Qu’il s’agisse des cités luxuriantes d’Asie dans Hacker ou encore des moniteurs fractionnés, le monde apparaît comme une mosaïque éclatée et cauchemardesque.

C’était également le cas dans Miami Vice et Collateral, où le tissu urbain, les reflets, l’acier, l’asphalte et le béton semblaient se mêler pour décrire une jungle protéiforme, un labyrinthe infini.

 

Hacker n’est sans doute pas le film somme qu’il voudrait être, la faute à une intrigue trop ténue, et une représentation du piratage parfois maladroite ou datée. Il n’en demeure pas moins une fascinante synthèse d’un des cinéastes qui aura su, mieux que tous ses confrères, dépeindre la lutte acharnée du héros occidental pour échapper à un monde entropique, toujours sur le point de le cannibaliser.

Tout savoir sur Hacker

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