Alain Resnais est mort
Alain Resnais est mort le soir du samedi 1er mars, à l'âge de 91 ans. Il était sans doute le dernier Grand metteur en scène de cinéma français, ou tout du moins le dernier à être intimement connecté à l'histoire du médium. Si une filmographie riche et un âge vénérable font de sa disparition un événement loin du tragique de carton-pâte qu'agitent déjà les réseaux sociaux, elle n'en demeure pas moins une date à marquer d'une pierre blanche.
Alain Resnais se fit connaître du
grand public (et de générations d'écoliers traumatisés) grâce à Nuit et Brouillard, que devait suivre quelques années plus tard Hiroshima mon amour. Mais l'image de cinéaste intellectualisant et
proche du Nouveau Roman (il collabora notamment avec Duras et
Robbe-Grillet) qui commence à lui coller à la peau va heureusement
se nuancer grâce à ses œuvres suivantes.
Qu'il s'agisse de
Providence, Mon Oncle d'Amérique ou La Vie est un roman, les genres
qu'il convoque vont en apparence se diversifier. Mais le réalisateur
continue de mettre en scène des récits complexes, imbriqués les
uns dans les autres, emballant au passage quelques sublimes plans
séquences. Alain Resnais échappera toute sa carrière à la
définition d'un style ou à l'enfermement dans une codification. Ses
vingt dernières années furent en apparence plus légères, hantées
par les notions de vieillissement et de disparition autant que
marquées par certaines formes artistiques (le théâtre, ses
répétitions, l'opérette, la chanson populaire).
Avec la disparition d'Alain Resnais, nous perdons un artiste dont le travail était encore d'une richesse éclatante et dont nous nous apprêtons à découvrir le dernier film : Aimer, boire et chanter. Gageons qu'il s'agira une nouvelle fois d'un film où surgiront ici et là les figures de la Bibliothèque et du Labyrinthe, deux des entités que Resnais se plaisait à convoquer et qui structurèrent toute sa brillante carrière.