Cinémathèque Française 2013 - 2014 : Bertolucci, Coen, Epstein, etc.

Nicolas Thys | 30 août 2013
Nicolas Thys | 30 août 2013

Pour la Cinémathèque française, l'année 2011-2012 fût une année exceptionnelle : l'exposition Burton a atteint des sommets avec 300 000 spectateurs, et on a pu voir se succéder des rétrospectives consacrées à Clint Eastwood, Robert Altman, Steven Spielberg et Burton. Il aurait été fou d'imaginer que la saison dernière soit aussi remplie niveau spectateurs. Mais avec ses 100 000 visiteurs, Jacques Demy aura été une belle réussite et par rapport aux années précédentes, les promesses auront été tenues malgré deux petits couacs avec l'annulation de la venue des frères Coen et de Bernardo Bertolucci (pour la deuxième fois).

Après l'habituelle fermeture estivale, voilà donc la reprise des festivités le 4 septembre. 2013 - 2014 commence comme une année de rattrapage. En effet, septembre débutera avec les arrivées et les rétrospectives de Michel Piccoli et, enfin, de Bernardo Bertolucci qui sera là pour présenter son "nouveau" (il tourne en festival depuis plus de deux ans) film : Moi et toi. Deux leçons de cinéma seront organisées pour l'occasion. Ce sera également l'occasion de voir la version 3D du Dernier empereur, diffusée à Cannes classic. Le projet a de quoi faire peur mais qui sait...

 

Et comme pour conjurer le mauvais sort, octobre sera le mois des frères Coen et de tous leurs films. Leur dernier opus, Inside Llewyn Davis est prévu pour le 6 novembre et ils devraient venir, en pleine promo, pour une avant-première et, on l'espère, une masterclass. En parallèle, face au cynisme désenchanté du duo, l'onirisme de Jean Cocteau viendra apporter un peu de féérie. La Belle et la bête ressort au même moment et ce sera aussi l'occasion d'une petite exposition autour des archives entreposées à la Cinémathèque.

La France encore à l'honneur en novembre avec le documentariste et photographe Raymond Depardon qui, en plus de l'exposition qui lui est consacrée au Grand Palais, verra l'intégralité de son œuvre filmique diffusée. Il devrait être là pour dialoguer avec le public. Au même moment, le trop peu vu René Allio sera sur le devant de la scène avec la rétrospective, une table ronde à la cinémathèque, un colloque à l'INHA en octobre, la sortie de coffrets DVD chez Shellac avant noël, une exposition au Museum National d'Histoire Naturelle en novembre et la reprise de ses films au MUCEM à Marseille.

 

Décembre sera Portugais avec la projection de la totalité des films de João Cesar Monteiro, dont on célèbre les 10 ans de sa disparition. Et si la film de l'année 2013 manque de classiques hollywoodiens, ils arrivent en 2014 avec deux mois consacrés à Henry Hathaway (Bertrand Tavernier risque fort d'être dans les parages) en janvier et février. En parallèle, la Cinémathèque diffusera les films d'un réalisateur français intéressant mais souvent mis à l'écart : Jean-Charles Fitoussi. Ce sera l'occasion de voir ses deux derniers films qui sortiront au même moment en salles.

Le printemps arrivera vite et avec lui la meilleure nouvelle de l'année ! Enfin, une rétrospective autour du cinéaste et théoricien Jean Epstein. Figure majeure de l'avant-garde, expérimentateur hors-pair, plusieurs de ses films avaient été restaurés par la Cinémathèque de Bologne en 2009. Depuis, on attendait l'édition DVD de son œuvre qui devrait, après maints décalages, sortir chez Potemkine à la même période (mais précisons que certains droits étant détenus par Pathé qui s'acharne à ne pas faire les choses bien, ni Coeur fidèle, ni L'Auberge rouge, ni le somptueux La Belle nivernaise, sans lequel jamais L'Atalante de Vigo ne serait ce qu'il est, ne devraient être dans ce coffret. On ne les félicite pas.)

 

Disparu en 1953, Epstein est l'une des icônes dominantes du cinéma muet et des débuts du parlant. Aujourd'hui, Pathé a fait le strict minimum en proposant en DVD Coeur fidèle, depuis longtemps sortie des bacs, et ses autres films sont introuvables en France. Il fallait jusque là se rendre aux Etats-Unis ou en Angleterre pour en trouver quelques uns. L'Anthology Film Archives à New-York avait même eu la primeur d'une rétrospective en 2012. Ses écrits sur le cinéma, parmi les plus beaux textes écrits sur le 7ème art, ont quitté les librairies et les éditeurs depuis 35 ans et seuls les habitués de la Cinémathèque se souviennent d'Epstein car une salle porte son nom et qu'on peut y voir, de temps à autre, un de ses films ressurgir le temps d'une séance. Il était donc grand temps de s'y mettre !

2014 étant le centenaire du début de la Grande Guerre, l'institution de la rue de Bercy devait s'en préoccuper et ressortir les films qui tournent autour de l'événement, en parallèle à une exposition à la BNF, soit de l'autre côté de la passerelle Simone de Beauvoir. Pratique ! Parmi les autres noms à l'honneur à la même période : Caroline Champetier, directeur de la photographie et présidente de l'AFC, au style si singulier. Elle sera là pour parler de son travail. Puis, les nippophiles seront heureux, Yasujiro Ozu aura l'honneur d'une rétrospective, qu'on espère complète malgré ses 54 titres dont certains muets plus compliqués à dénicher. Le printemps se terminera sur une note asiatique encore avec un panorama du cinéma vietnamien à l'occasion de l'année France-Vietnam.

 

Pour clore l'année et comme tous les étés, des auteurs souvent qualifiés de Bis ou des adeptes du film de genre sont mis à l'honneur. Cette année ce sera l'américain Phil Karlson et le japonais Kinji Fukasaku. S'y adjoindront un autre cinéaste français oublié, malgré l'édition de ses films en DVD par les Editions Montparnasse voilà quelques années : Guy Gilles, et une sélection qu'on imagine par avance somptueuse de films tournés (et donc projetés) en 70mm !

Côté expositions, outre Cocteau déjà mentionné, Amos Gitai, de février à juillet 2014, succèdera à Maurice Pialat dans la galerie des donateurs. Intitulée architecte de la mémoire, cette expo tournera autour des archives qu'il a léguées à la Cinémathèque. Mais les deux grands temps forts de l'année seront l'exposition (et la rétrospective par la même occasion, entre octobre et décembre) Pier Paolo Pasolini du 16 octobre au 26 janvier puis, du 9 avril au 3 août, car il aurait eu 100 ans en 2014, l'hommage rendu au fondateur de la Cinémathèque Française, reconnu et célébré dans le monde entier : Henri Langlois. Une programmation de films qui eurent de l'importance pour lui est prévue, de même qu'un colloque international et l'édition de ses écrits. On notera également la bonne idée de la faire débuter en même temps que la rétrospective Epstein puisque la sœur de celui-ci, Marie Epstein,  fût l'une des plus fidèles collaboratrices de Langlois.

 

Enfin, en plus des programmations classiques reconduites (Histoire permanente du cinéma, cinéma Bis, cinéma expérimental, jeune public...), le succès du festival Toute la mémoire du monde dont la première édition eut lieu en décembre dernier, a poussé la Cinémathèque à le reconduire. Cette année un hommage sera rendu à l'acteur, cinéaste et producteur Raj Kapoor (l'Inde étant peu valorisée par le Cinémathèque, c'est une bonne nouvelle), ainsi qu'à la Cinémathèque de Bologne. De plus de nombreux films restaurés seront projetés dans leurs copies neuves et des programmes consacrés aux couleurs du muet et aux "incunables" retrouvés seront organisés.

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