Cinq classiques façonnés par un accident

Simon Riaux | 5 juillet 2012
Simon Riaux | 5 juillet 2012
Ce n'est un secret pour personne que la réussite d'un film tient autant du talent et des compétences de ses multiples intervenants que d'une part intangible de chance, d'un agencement secret d'infimes miracles et imprévus. Revenons donc ensemble sur quelques œuvres célèbres qui ne doivent leur s scènes les plus marquantes qu'au hasard, ou à des contraintes techniques aux antipodes de toute considération artistique.

 

L'Empire contre-attaque

Contrairement à ses acolytes, Harrison Ford n'avait pas signé à l'issue de La Guerre des Étoiles pour les deux films suivant, et émettait de sérieux doutes quant à son envie de retrouver une troisième fois le costume de Han Solo, personnage qu'il jugeait creux et rébarbatif. Par conséquent, Lucas ne pouvait prendre le risque de laisser Solo "intact" et devait trouver un moyen de parer à son éventuelle défection. D'où sa congélation, et au passage une scène culte aux dialogues inoubliables. Merci Harrison.

 

Chinatown

La fin glaçante de Chinatown a bien failli ne jamais exister, et aurait dû originellement être un happy ending. Jusqu'à la défection de son scénariste, qui donna l'occasion à Polanski (aidé par Nicholson) de réécrire à la dernière minute l'épilogue de son film. Il transposa l'action à Chinatown parvint à imposer une conclusion à la noirceur totale, et une réplique inoubliable : « forget it Jake, it's Chinatown. »

 

Apocalypse Now

Il est de notoriété publique que le tournage du film fut un calvaire, dans tous les sens inimaginables du terme. On connaît le désarroi de Coppola quand en lieu et place d'un comédien fiévreux et amaigri, il vit débarquer en pleine jungle un Marlon Brando obèse, ne connaissant pas son texte, et se moquant du projet comme d'une guigne. Exit le costume de béret vert, adieu le combattant félin, bonjour, le grand manitou filmé en gros plans ! L'anecdote est connue de tous, mais nombreux sont ceux qui ignorent encore que le climax hallucinogène devait être originellement un très long combat mano a mano entre Brando et Sheen, d'une grande violence, et d'un réalisme implacable. Le délabrement physique des deux comédiens aboutit à la fin que nous connaissons, dont l'onde de choc se propage encore.

 

Seven

La conclusion du film qui consacra David Fincher est demeurée dans nombre de mémoires comme un grand moment de cinéma. Pourtant, l'épilogue prévu était un condensé des plus tristes clichés du film de serial killer. Mills et Sommerset devaient dans un happy ending qu'on imagine aussi dégoulinant que vengeur, sauver Gwynet du tueur venu la décapiter. Hélas, les producteurs qui proposèrent à Fincher le projet lui envoyèrent une ancienne version du script, jugée peu commerciale, dont le réalisateur tomba amoureux, qu'il transmis à ses acteurs, lesquels le soutinrent dans son choix. Brad Pitt aurait déclaré qu'il ne s'engagerait sur le film qu'à une seule condition : « the head stays in the box ».

 

La Vie est belle

Rien ne destinait le film de Capra à devenir un classique. Critiques mitigées, succès limité au box-office, film à peine rentable, après sa sortie le long-métrage n'intéressa personne, ou presque. De ce désintérêt général advint une des plus belles bourdes du Septième Art, quelqu'un ayant malencontreusement oublié de renouveler le copyright du film (opération à réitérer tous les 28 ans), La Vie est belle tomba instantanément dans le domaine public. Les chaînes de télé de par le monde se précipitèrent pour diffuser massivement et GRATUITEMENT le film à chaque Noël, lui permettant de trouver son public.

 


 

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