L’Étrange Festival 2011 : Jour 5

Aude Boutillon | 8 septembre 2011
Aude Boutillon | 8 septembre 2011

Une comédie pas drôle, une révélation masculine qui laisse sans voix et un défilé de hotties japonaises en petites tenues ; on serait presque tenté de vous dire que c'est un bilan plutôt pas mal du tout qui se présente pour cette cinquième journée au Forum des Images. Point d'interview en ce mercredi, mais n'ayez crainte, on vous réserve du lourd pour la fin de semaine.

 

DEADHEADS

Un loustic quelconque se réveille un beau jour bardé de câbles et de tuyaux divers, pour finir par réaliser qu'il est devenu... un zombie. Aidé d'un compagnon de fortune, il va se mettre à la quête de son amour perdu, une tache un rien compliquée par la présence de hordes d'humains bien vivants peu enclins à les laisser s'en tirer. Parce qu'il est toujours nécessaire de se rappeler qu'un concept vendeur pour une cible bien précise de spectateurs ne débouche pas forcement sur un bon film, Deadheads est là pour prouver, une bonne fois pour toutes, qu'il est tout-à-fait possible, aujourd'hui encore, de faire une mauvaise comédie zombifique. Cumulant les gimmicks bien connus des amateurs du genre, alignant les répliques lourdingues, pas aidé, il faut le dire, par des acteurs franchement à la masse, Deadheads peine (et c'est rien de le dire) à arracher un sourire, quand il ne consterne pas purement et simplement par son caractère aussi brouillon que bêta (le scénario se limitant à une incohérente succession d'évènements). Comme on pouvait s'en douter, les Pierce Brothers (un jour viendra, cette mode passera, gardons espoir) sont des garçons très informés sur le sujet, et n'ont de cesse de semer des références en forme de gros clins d'oeils bien lourds, dans cette mouvance pseudo-geek supposée, sans nulle doute, emporter l'adhésion d'un spectateur rompu au cinéma horrifique. Sauf que le spectateur en question fatigue de se voir inlassablement asséner les mêmes références à Evil Dead et Night/Day of the Living Dead, de comédie horrifique en désastre de l'humour.

 


 

 

BULLHEAD

Une projection introduite par un programmateur peinant à contenir son enthousiasme pour ce qu'il considère comme le meilleur film de l'année, ça vous booste l'appréhension comme il se doit. Prix du Jury et de la Critique à Beaune, Bullhead est de ces films dont la description est une entreprise très délicate. D'une part, parce que sa force réside dans le dévoilement progressif de ses éléments, qui permettent à une intrigue relativement classique (un agriculteur impliqué dans le trafic d'hormones voit ses affaires compliquées par l'assassinat d'un agent fédéral) de se densifier considérablement, mais surtout d'effectuer une transition aussi subtile que justifiée du polar vers un drame humain déchirant. D'autre part, parce que la performance de son acteur principal suffit à justifier son visionnage. Matthias Schoenaerts (déjà vu dans Left Bank) pour faire simple, bouffe l'écran, en animal torturé et littéralement gonflé à la testostérone, à la maturité affective d'un petit garçon de 10 ans. Brillamment filmé, très bien écrit, Bullhead est aussi poignant que passionnant, et invite à suivre son réalisateur -Michael R. Roskam- de très, très près.

 


 

 

MILOCRORZE

Fou d'amour pour une superbe créature à la chevelure flottant dans le vent, un petit garçon découvre les affres de l'amour. Un conseiller en relations amoureuses complètement barge en costume blanc et coupe au bol réalise des chorégraphies improbables, entouré de pépettes à tomber par terre, le tout entre deux coups de fil de jeunes losers désireux d'astuces plus stupides les unes que les autres. Un amoureux se reconvertit en samouraï quand sa fiancée se fait enlever par les tenanciers d'un bordel. Bon. Bon bon bon. Produit type de festival, Milocrorze est une anthologie complètement barge et psychédélique, dont les segments sont plus ou moins reliés par une connexion très ténue... mais qu'importe. Indubitablement créatif, le film de Yoshimasa Ishibashi brille par une identité visuelle aussi singulière que variée (d'aucuns remettront en cause l'unité du métrage ; au diable la cohérence !) : à un univers kawaii à souhait succède une séquence survitaminée aux couleurs pétaradantes, laquelle fait place à une histoire très élégante, offrant une séquence aussi mémorable qu'époustouflante (bien qu'un poil trop longue) qu'on vous laisse tout le loisir de découvrir. Une pépite d'absurdité et de bonne humeur teintée d'acide. 

 

 

 

Signalons aussi la projection de Super et Wake Wood, que votre envoyée spéciale dévouée avait déjà pu voir à Neuchâtel. Une excellente surprise pour le premier qui, bien loin d'exploiter le filon du sous-Kick Ass, révèle une inattendue maturité et un propos bien plus complexe que son prédécesseur, avec des protagonistes infiniment plus déviants (bénéficiant d'une interprétation absolument jouissive) et des instants franchement borderline, qu'on n'attendait vraiment pas dans ce registre, sans parler d'une scène tout simplement crève-cœur comme on n'en avait pas vue depuis bien longtemps. Wake Wood, de son côté, peine à susciter le franc enthousiasme, malgré quelques séquences gothiques élégantes. La linéarité du scénario déçoit, tout comme le sentiment constant d'avoir à faire à un Simetierre 2 revisité. Pour le retour en grandes pompes de la Hammer, on repassera.

 

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