Adieu mes chers amis : disparition de Mario Monicelli

Patrick Antona | 30 novembre 2010
Patrick Antona | 30 novembre 2010

Cette dernière semaine de novembre aura bien été cruelle pour les amoureux du cinéma car après la disparition de Leslie Nielsen et Irvin Kershner, voilà que nous apprenons le décès du grand maître de la comédie italienne, Mario Monicelli. Grand spécialiste de l’humour noir et vachard, âgé de 95 ans, il s’est défenestré du balcon au cinquième étage de l'hôpital romain St. John, ce lundi 29 novembre 2010, où il était hospitalisé pour un cancer en phase terminale, funeste pirouette finale serait-on tenter de dire.

 

 

Scénariste de qualité qui avait commencé à travailler dès 1937, il débute à la mise en scène en 1949, avec Au diable la célébrité (coréalisé avec Steno) puis se mettra au service du comique napolitain Totò à qui il donnera ses meilleurs films avant d’exploser internationalement avec le triomphe du Pigeon en 1958. Son style qui consiste à tracer le destin cruel de paumés sympathiques qui veulent changer de vie ou qui sont emportés par le tourbillon de l’Histoire trouve son achèvement dans La Grande Guerre avec Alberto Sordi et Vittorio Gassman. Mais le commentaire politique sur l’état de son pays n’est pas absent de son œuvre, comme on peut le voir dans Nous voulons les Colonels ou Un Bourgeois tout petit, petit tout comme la parodie du fanatisme religieux avec L’Armée Brancaleone, et sa suite encore plus hilarante Brancaleone aux Croisades. Mais ce sera Mes chers amis en 1974 qui lui permettra de devenir un des auteurs préférés du cinéma populaire italien, odyssée truculente de quinquas en goguette qui font les 400 coups qui fera aussi un tabac en France. Il était aussi un des  chantres du film à sketchs, dont il partageait souvent l’affiche avec Mauro Bolognini et Dino Risi, et dont son thème de prédilection était l’infidélité. Citons Les Ogresses en 1965 avec le carré de charme composé de Monica Vitti, Raquel Welch, Claudia Cardinale et Capucine ou encore Les nouveaux monstres, chant du cygne du genre. Si les années 80 sont très prolifiques et intéressantes, avec par exemple Pourvu que ce soit une fille au casting pléthorique ou encore Le Marquis s’amuse, le réalisateur marque le pas dans les années 90, qualitativement parlant, la télévision berlusconienne ayant balayé les derniers relents de critique politique qui pouvait encore émaner du cinéma. Il s’était converti dernièrement aux vertus du film documentaire à vocation sociale voir contestataire comme les collectifs Un altro mondo è possibile ou Lettere dalla Palestina et la Mostra de Venise lui avait consacré une rétrospective en 2003. Il avait livré un ultime long-métrage en 2006, Le Rose del Deserto, pamphlet antimilitariste qui voyait des soldats fascistes se transformer en humanitaires.

 

 

Grand du cinéma qui, à l'égal de Dino Risi, Luigi Comencini et Ettore Scola, avait donné ses lettres de noblesse à la ̎̎comédie à l’italienne ̎̎ , il laisse derrière lui toute une filmographie à redécouvrir, témoignage d’un temps où l’humour n’empêchait en rien d’avoir une vision réaliste et engagée du monde qui nous entourait.

Ciao l’artiste.

 

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