Festival du cinéma européen des Arcs - J1

Lucile Bellan | 14 décembre 2009
Lucile Bellan | 14 décembre 2009

A force de suivre mes aventures festivalières tout au long de l'année, vous le savez : Lucile est une éponge.  Des films, des sentiments bruts, des rencontres et un certain nombre de verres d'alcool typiques colonisent mon être jusqu'à devenir indissociables de ce que je suis vraiment. Cette semaine, quelques jours à peine après mon retour de CinémaScience, on m'envoie aux Arcs, en Savoie, pour le premier festival du film européen. Dans un état de fatigue mentale et physique avancé, et pendant trois jours intenses, Lucile est à fleur de peau, Lucile se laisse envahir par une ambiance, un lieu et du cinéma, Lucile est une drama queen, Lucile a 15 ans.

 

Rendez vous de départ à la gare de Lyon à 7h30 mercredi matin... manque de chance, j'ai un souci presque pathologique avec la tranche horaire 5-11h du matin. Après un sprint épique et grâce au train resté bloqué en gare quelques minutes, je me fraye malgré tout un chemin dans les allées chargées jusqu'à ma place : c'est parti pour 6 heures de voyage. Sont déjà présents ceux avec qui je partagerais les prochaines heures, mais aussi les trois prochains jours. Habituée des voyages de presse, je m'attendais à un groupe indéfini d'une dizaine de journalistes cinéma, une masse dans laquelle je pourrais me fondre. Le virage est violent, nous sommes quatre. Trois  hommes, dans la force de l'âge et aux parcours professionnels aussi différents que passionnants... et moi. Deux d'entre eux, ne viennent même pas couvrir le festival à proprement parler mais plutôt la station.

 

 

 

Avec ces nouvelles données, je sens monter l'angoisse. A quatre, difficile de la jouer solo (ce que je pensais vraiment faire vu que mon iPod est plein à craquer de films), mais je me demande aussi ce qui se passera si on ne s'entend pas. Imaginez vous à des années lumières de Paris, enfermée dans une station de ski avec de parfaits inconnus pendant trois jours... Un scénario qui peut vite tourner au film d'horreur (ou au film porno mais ça, c'est une autre histoire). Je me réveille lentement, fait abstraction de ma coiffure et de mon maquillage hasardeux, de ma tenue négligée (pour une durée si courte, j'ai voulu faire la fille qui maîtrise et n'ai emmené que le strict minimum, une erreur que je vais regretter par la suite) et commence à sociabiliser. Ces messieurs sont charmants, drôles, de très bons compagnons de voyage en somme, même si leurs prénoms me passent encore au dessus de la tête, et c'est dans une ambiance de franche camaraderie virile que nous arrivons en gare de Bourg Saint Maurice en début d'après-midi.

 

Rencontre avec les attachés de presse de la station et direction le restaurant pour un déjeuner grandement mérité. Les lieux sont magiques, et, comme je n'ai pas du mettre des pieds dans une station de ski enneigée depuis la classe de neige en CM2, j'en prends plein les yeux. On nous apprend le mode de fonctionnement des stations (Les arcs 1800, 1950, 1600 et tutti quanti), le programme qui nous a été savamment concocté et un peu plus sur les uns et les autres, entre deux bouchées de ragoût au chevreuil. Après un si bon déjeuner, les routes sinueuses de montagne pèsent sur l'estomac, mais l'arrivée dans le village 1950 reste un sacré moment. D'abord parce qu'on est passé par le parking souterrain et que je n'en ai surtout rien vu à part des couloirs et des halls d'hôtel mais aussi parce qu'une fois dehors l'architecture, qui vient chercher dans les méandres de notre imagination les lignes et les couleurs d'un village traditionnel de montagne, mais aussi la neige et la vue (Oh ! Le Montblanc !) me font glisser dans un univers parallèle. Quelque chose de magique, entre la surexcitation intense et le bien être, où le rassurant sentiment de vacances est obtenu artificiellement mais pour quel résultat ! (un plaisir pour une cinéphile, j'ai l'impression d'être dans un décor de cinéma).

 

 

 

A l'arrivée à la résidence le Prince des Cimes, grosse surprise : à quatre, nous nous partageons deux appartements de deux chambres. Je laisse les hommes décider, d'autant plus que ce genre de situation inédite a le don de m'amuser énormément. Après le vidage des bagages, mes camarades et moi trouvons de bon ton de pousser l'investigation journalistique vers le sauna/hammam/piscine/jacuzzi extérieur et finissons très vite en peignoir et bikini (enfin, surtout pour moi) à déambuler dans les couloirs de l'hôtel. Si on m'avait dit que je partagerais un sauna avec trois inconnus aussi hilarants que dragueurs (heureusement, qu'ils ne se concentrent pas sur moi), j'aurais peut-être réfléchi à deux fois avant de faire le voyage (pour dire deux fois oui, certainement). En tout cas, sur le coup, cette situation ne m'a pas parue bizarre, ni même déplacée et, dans ce même sauna, j'ai aussi entamé la discussion avec un jeune producteur donc je me suis vite dit que ce festival avait le don de casser les barrières et de nous faire nous sentir bien pour mieux parler de cinéma... ou pas.

 

Les garçons récupèrent leurs skis, snowboards, et autre matériel... de garçons et nous nous dirigeons vers 1800 (la station voisine) pour un dîner avec le directeur de l'office du tourisme. Encore une fois, l'ambiance est décontractée et on commence à entrer dans le vif du sujet : la station, la station et la station ...ça tombe bien, je suis déjà amoureuse. Pour le petit moment cinéphile, je découvre la saga des Apocalypse Snow (dont je vais me faire un rattrapage incessamment sous peu). Micro balade digestive sur la neige glacée (les deux minutes de marche entre le restaurant et la salle de cinéma en fait) et je suis chez moi. En état d'insécurité depuis le départ (loin de la maison, des inconnus partout, tout ça), je retrouve une sensation que je ne connais que trop bien : celle d'entrer dans une salle bondée et de partager un film ensemble, et ça tombe bien puisque la communion des sens est à son paroxysme avec le deuxième meilleur film de 2010 à ce jour : Soul Kitchen de Fatih Akin.

 

 

 

J'en écrirais plus long le moment venu mais Soul Kitchen a définitivement fini de me faire aimer le Festival européen des Arcs, parce qu'un festival qui passe un tel chef d'oeuvre est forcément un vrai bon festival de cinéma. Le réalisateur allemand donne ses lettres de noblesse à la comédie en combinant un casting parfait, des situations loufoques, une bande originale étonnante et un sens esthétique sans faille. Jouissif dans son mélange du sexe, de la cuisine et de la musique (ce qui n'est pas fait pour me déplaire), Soul Kitchen cache sa perfection derrière une humilité déconcertante et  fort sympathique. Impossible de ne pas fondre pour lui en somme. Pour vous, il faudra attendre le 17 mars 2010 mais la critiques est déjà disponible.

 

Le temps passe vite quand on s'amuse et il est presque minuit quand la joyeuse bande décide de fêter le festival à coup de cocktails, de musique trop forte, de drague audacieuse et de filles courtement vêtues qui dansent sur le comptoir du bar. Vous voulez que je vous raconte ma soirée ?!?  Mojito ananas, Zubrowska, Vodka/Get 27, Vodka./Get 27, Vodka/Get 27... Après, et comme vous l'imaginez, ma mémoire me joue des tours. Ah c'est sûr, les nuits à 1950 sont aussi fraîches que chaudes et elles finissent tard... bien tard... à peu près à l'heure où la suivante commence. Mais bon, un festival où Lucile est une gentille fille sage n'est pas un festival, non ?

 


 

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