Compte rendu du jeudi 9 septembre

Laurent Pécha | 10 septembre 2004
Laurent Pécha | 10 septembre 2004

Si mercredi la morosité était de mise avec une programmation, dans toutes les sections, particulièrement quelconque, la journée de jeudi a redressé la barre de façon spectaculaire. Entre une arrivée en star absolue de Nicole Kidman, venue présenter Birth (film qui divise énormément son public et la rédaction – une critique positive a des chances de voir le jour dans nos pages avant la sortie du film en novembre), deux films en compétition, Maria pleine de grâce et Eternal Sunshine of the spotless mind, d'un niveau relevé, et une section Panorama réservant ses surprises, il est presque impossible de chômer. Sans parler du fait que, côté rétrospective, il y avait Les Aventuriers de l'arche perdue et sa belle copie (pour Stéphane), et Willow et sa copie abîmée sous-titrée en français et néerlandais (pour Laurent). Quant au troisième larron, il a enchaîné les interviews (5 dans la seule journée de jeudi).

Surprise à Paris
Présenté dans l'indifférence générale et dans une salle du CID quasi désertique (beaucoup des festivaliers ayant, semble-t-il, tenté en vain de suivre la conférence de presse de Nicole Kidman pour Birth), Before Sunset s'avère être une excellente surprise, peut-être même la plus grosse du festival, si l'on considère qu'on n'attendait strictement rien de cette suite de Before Sunrise. Neuf ans après avoir passé une nuit ensemble à Vienne, Jesse et Céline, qui s'étaient promis de se revoir six mois après, se retrouvent à Paris. Chacun a continué sa vie, Jesse étant devenu un écrivain célèbre et père de famille, et Céline, une écologiste forcenée aux relations amoureuses fluctuantes.
Si l'idée de renouveler la rencontre neuf ans exactement après le tournage du premier film, avec les mêmes comédiens et le même réalisateur, intrigue, il ne faut que quelques minutes pour que l'existence de Before Sunset s'impose comme une évidence. Commençant par une série d'images de cartes postales de Paris, qui finalement s'avèrera tout sauf gratuite, le film délimite rapidement ses règles, annonçant parfaitement la couleur. Reposant quasi uniquement sur les superbes prestations d'acteur de Ethan Hawke et Julie Delpy (l'actrice trouvant ici le rôle de sa vie), Before Sunset nous entraîne, le plus souvent avec d'élégants et discrets travellings, dans une très longue conversation qui va petit à petit rapprocher les deux anciens amants. Scénarisée par le réalisateur Richard Linklater et ses deux comédiens, l'histoire passionne par sa capacité à nous toucher au plus profond de nos préoccupations. Assorti de brillants dialogues d'une rare justesse et joués avec un naturel confondant (on a constamment l'impression d'assister à des séquences improvisées), le récit parvient à universaliser la relation si spécifique du couple. Comédie romantique adulte, intelligente et profonde, Before Sunset est une exemplaire réussite artistique qui n'a finalement qu'un seul gros défaut : nous donner sacrement envie de découvrir un troisième volet ! Before Dawn dans neuf ans ?...

Solondz en mode très mineur
Si le film de Richard Linklater a su nous convaincre, c'est tout le contraire du dernier opus de Todd Solondz. Le cinéaste du génial Happiness avait déjà montré de sérieux signes de faiblesse avec Storytelling, où il ne parvenait plus vraiment à se renouveler. Avec Palindromes, la situation s'est encore empirée, et le réalisateur se contente désormais de faire du Solondz, à savoir vouloir absolument (et de façon insupportable !) choquer, ou simplement être bêtement corrosif en tournant en dérision ses personnages. Si, dans les précédents films de l'auteur, cette charge décalée s'accompagnait d'une nécessaire compassion, elle n'existe plus du tout dans Palindromes. Enfermé dans une formule qu'il a brillamment créée, Solondz cherche vainement la variété : pour raconter son histoire de jeune fille de 12 ans tentant à tout prix de devenir mère, il nous soumet l'idée visuelle de faire jouer le personnage par différentes actrices d'âges et d'ethnies différentes (mention spéciale à Jennifer Jason Leigh, qui réussit le tour de force dêtre crédible alors qu'elle a dépassé la quarantaine). Peine perdue tant ce concept tourne vite au simple gimmick.
Marquant malheureusement les limites indéniables du cinéma de Todd Solondz, Palindromes, loin d'être l'œuvre effrontée qu'aurait pu signer le réalisateur, est simplement un film stupidement cynique.

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