Les Gardiens de la Galaxie 3 : pourquoi Adam Warlock est un ratage impardonnable

Si Les Gardiens de la Galaxie Vol. 3 est une petite réussite, James Gunn est complètement passé à côté de son sujet sur Adam Warlock, pourtant très attendu. Attention spoilers !

Les Gardiens de la Galaxie Vol. 3 est enfin arrivé et, miracle, c'est un super Marvel. Pour la dernière de James Gunn dans le MCU, lui qui a pris les commandes du DCU, le film fait office de bouffée d'oxygène, dans un univers qui frôlait dangereusement l'asphyxie après l'échec d'Ant-Man et la Guêpe : Quantumania. S'il n'est pas parfait, sa générosité et la mise au premier plan de l'émotion font de ce Gardiens 3 l'une des meilleures additions post-Endgame du MCU, bien loin des Thor 4 et autres She-Hulk.

Pourtant, il y a bien une sortie de route dans ce troisième volet de la trilogie. Introduit dans la scène post-générique des Gardiens de la Galaxie Vol. 2, en 2017, Adam Warlock était l'un des personnages les plus attendus par tout amateur de comics qui se respecte. Le personnage surpuissant pouvait tout changer dans le MCU. Malheureusement, et de manière assez inexplicable, James Gunn a complètement raté son traitement dans son film. Retour sur la plus grosse énigme des Gardiens de la Galaxie 3.

Un problème de ton

La déception que l’on ressent vis-à-vis d’Adam Warlock est à la hauteur des attentes. Car le personnage, s’il est assez méconnu du grand public, est l’un des plus intrigants de la Maison des Idées. Né dans les planches des 4 Fantastiques, il n’est pas vraiment un super-héros ni un antagoniste d’ailleurs. Doté d’une puissance incroyable, Warlock navigue dans une zone grise de moralité, et connaît peut-être l’une des trajectoires les plus intéressantes parmi la vaste galerie de personnages de Marvel.

Narcissique et présomptueux dans un premier temps, il apprend à aider les autres, jusqu’à carrément s’emparer du Gant de l’Infini, au nez et à la barbe du Titan fou Thanos. À ce titre, ne pas le voir dans le diptyque Infinity War-Endgame relevait déjà d’une petite déception. James Gunn a repris un des éléments fondateurs du personnage dans ses Gardiens 3. Warlock est un être créé de toutes pièces pour être parfait, et il le sait. C’est tout.

Warlock, dans toute sa gloire

Car, non content d’avoir une des entités cosmiques les plus fascinantes de Marvel entre ses mains, le réalisateur a fait le choix étrange de le réduire au rang de faire-valoir gentiment débile, dont la réelle puissance n’est quasiment pas abordée. Catapulté dans l’intrigue dès les premières minutes du film, il porte toutes les marques du ressort comique gunnien : infantile, pas très futé et souvent insupportable.

Dans un film qui fait le choix d’axer son ton plutôt du côté du drame, sa présence dénote complètement, et le rend plus agaçant qu’intéressant. Warlock est là parce qu’il doit être là, et il devient vite un deus ex machina maladroit, une sorte d’accélérateur de scénario qui est invoqué au besoin de l’intrigue.

On aurait préféré qu'il reste dans son cocon

De héros à zéro

Le personnage avait été présenté comme une pièce majeure du MCU, alors qu’il n’était qu’un cocon dans la scène post-générique des Gardiens 2. Et, même sans Thanos, James Gunn avait un boulevard pour développer en profondeur son nouveau détraqué cosmique. Car Warlock possède une relation privilégiée avec le Maître de l’Evolution, antagoniste choisi par Gunn pour affronter les Gardiens dans ce troisième opus (c’est même lui qui lui a donné son nom).

Le Maître de l'Évolution (qui est réussi !)

Pourtant, soucieux de préserver l’image cruelle de son méchant, jamais Gunn ne s’attarde sur la relation entre les deux personnages. C’est tout juste s’ils échangent trois pauvres lignes de dialogue, et encore, pour permettre au Maître d’insulter le pauvre bonhomme doré. De messie attendu, Warlock est devenu une sorte de cameo glorifié, qui ne justifie jamais réellement sa présence dans l’intrigue. L’idée de changer ses origines, et même sa personnalité tout entière, par rapport au matériau d’origine n’est pas fondamentalement un problème. Marvel l’a déjà fait, parfois assez brillamment comme avec Thanos, qui a abandonné son obsession pour la mort pour devenir un éco-terroriste à tendance génocidaire.

Malheureusement, le personnage a si peu d’épaisseur, surtout dans un long-métrage où l'on accorde de l’importance aux personnages et à leurs dilemmes moraux, qu’il en devient tristement vide. Gunn ne parvient jamais à lui offrir l’énergie si communicative qu’il arrive à donner habituellement à ses créations. Ici, Warlock ère sans but, avec même un petit animal mignon pour le faire patienter. On a parfois l’impression que le réalisateur ne sait pas quoi en faire, et ce point interroge sur la production chaotique du film, et sa place particulière dans le MCU.

Bestiole toute mignonne mais inutile N°59

Que s'est-il passé ?

Les Gardiens de la Galaxie 3 est un projet étonnant, qui consacre un peu plus le statut unique de James Gunn dans la grande écurie Marvel. Car le réalisateur est l’un des rares à avoir quasiment les mains libres pour réaliser ses films et à leur donner une personnalité qui détonne dans la machine à broyer du MCU. Sa gestion de Warlock n’en est que plus étrange. Mais l’attitude de Marvel à son sujet a également de quoi interpeller. Introduire le personnage tout juste avant Infinity War, pour finalement le laisser de côté au moment de l’affrontement dantesque contre Thanos a quelque chose de curieux. 

Les fans quand ils découvrent Warlock dans Les Gardiens 3

En 2018, les scénaristes d’Infinity War avaient justifié l’absence de Warlock en affirmant qu’il « faudrait un film entier pour le présenter ». Pourquoi alors le teaser dans la scène post-générique des Gardiens 2 ? On peut penser que James Gunn voulait absolument travailler le personnage. Et, avec la production chaotique du troisième film qui a vu le réalisateur viré puis rappelé, cette volonté a pu se perdre au milieu de la conception du long-métrage.

Le cœur de l’intrigue est devenu Rocket. Il monopolise l’attention à tel point qu’il réduit l’impact des autres personnages. Dans un désir de raccrocher les wagons avant son départ pour DC, James Gunn s’est peut-être forcé à intégrer Warlock à son scénario, quitte à le délaisser volontairement. Car on peine à croire qu’un réalisateur aussi attaché à ses anti-héros ait sciemment décidé de passer à côté d’un protagoniste aussi fascinant.

Tout n'est pas perdu

Gunn étant parti voir si l’herbe était plus verte chez la concurrence, l’avenir des Gardiens est en suspens. D’autant plus avec la fin surprenante de ce troisième opus, conclusion qui s’assume à moitié. Comme annoncé un peu partout durant la promotion, ce Volume 3 marque la fin de l’équipe telle qu’on la connaissait, et c’est là que la présence de Warlock pourrait devenir intéressante.

Car la Saga du Multivers suit son cours, et on peut supposer sans trop se mouiller qu’une itération des Gardiens affrontera Kang et ses variants. Le personnage campé par le super Will Poulter pourrait alors devenir un atout de poids. Et si le plus bel héritage de James Gunn était un Adam Warlock brut, prêt à être poli par un réalisateur talentueux ? Le doute est permis, et l’espoir est vif, car on a un peu du mal à se remettre de sa gestion dans les Gardiens 3.