Eiffel : les coulisses infernales du scénario abandonné par Ridley Scott (et pas seulement)

Salim Belghache | 14 juin 2021 - MAJ : 15/06/2021 12:18
Salim Belghache | 14 juin 2021 - MAJ : 15/06/2021 12:18

Eiffel sort enfin le 25 août prochain après un long parcours en coulisses pour le faire exister. La scénariste du film raconte l'envers du décor.

Le drame historique attendu de cet été est bien Eiffel, le nouveau film réalisé par Martin Bourboulon (Papa ou maman, Papa ou maman 2). L’histoire de la création du monument parisien aura le droit à un casting de choc, composé de l’expérimenté Romain Duris et de la talentueuse Emma Mackey (Maeve Wiley dans la série Sex Education)

À travers cette mise en contexte de la construction de l’édifice, Eiffel racontera également l’histoire d’amour entre Gustave Eiffel et son amour de jeunesse Adrienne Bourgès. Bien que le projet soit enfin prévu dans les cinémas à partir du 25 août 2021, il a mis du temps à se mettre en place. Une histoire pleine de rebondissements que la scénariste du film, Caroline Bongrand, a dévoilé en grande partie dans son ouvrage Eiffel et moi.

 

 

Même si de nombreux longs-métrages depuis les débuts du cinéma ont eu des difficultés à se mettre en place, le cas du projet de Caroline Bongrand est symptomatique des montagnes russes dans le processus créatif d'un film. Dans plusieurs médias, Caroline Bongrand est revenue sur le parcours du projet en commençant par le point du départ du film entre 1997 et 1998. L’écrivaine et scénariste étudie à l’université de Californie du Sud et frappe à toutes les portes des producteurs, afin de pitcher certaines de ses histoires. La jeune étudiante se retrouve à bluffer chez l’un d’entre eux.

En effet, elle tente un coup de bluff monumental à un producteur américain en racontant que Gustave Eiffel a construit la tour Eiffel pour une femme qu’il aimait follement dont le prénom commençait par un A et que personne ne connait cette histoire. Le producteur tombe amoureux de ce récit et la production du film commence.

Même si l’histoire est fausse, Caroline Bongrand parvient à lancer son histoire, mais elle est stoppée rapidement à cause d’un conflit personnel entre son producteur et le réalisateur pressenti pour le faire. Malgré cette expérience quelque peu frustrante, Caroline Bongrand retourne à Paris et met par écrit son expérience hollywoodienne dans son ouvrage : Pitch.

 

photo, Romain Duris"J'ai de quoi faire du pétrole."

 

Et alors qu’elle peut parfaitement croire qu’il est impossible de voir son film, un passage à la radio va relancer la machine. En effet, après l'émission, la scénariste reçoit l’appel de l’agent artistique d’Art Media Bertand de Labbey. Bongrand apprend que Gérard Depardieu veut interpréter le rôle principal et a pris l’initiative de demander à Isabelle Adjani d’incarner Adrienne Bourgès. Enfin, Luc Besson est touché par l’histoire et veut bien réaliser. Jusqu’ici tout va bien, mais Luc Besson veut signer le scénario de son nom, en écartant celui de Caroline Bongrand. Elle refuse et le film ne se fait donc pas.

Nouvelle déception et nouvelles péripéties puisqu’en 2013, une amie de Bongrand fait repartir le projet en le proposant au producteur Harvey Weinstein et ensuite à la femme de Ridley Scott : Giannina Facio. Si l’ancien patron de Miramax n'est pas plus tenté par l’histoire, Ridley Scott et sa femme sont partants. Sauf qu'en quelques minutes d'entretien, le projet est de nouveau en stand-by, Giannina Facio refusant de s'occuper d'un scénario ayant déjà eu un autre producteur.

Enfin, le miracle avec la rencontre de Vanessa van Zuylen. La productrice d’Un homme à la hauteur de Laurent Tirard est plus que motivée et assure à Bongrand que son film va être fait. Et c’est la bonne. En revanche, la réalisation de ce rêve, vingt-deux ans après les premières tentatives, a un prix. En effet, l’entente entre Caroline Bongrand et Martin Bourboulon n’est pas toujours au beau fixe.

 

photo, Romain Duris, Emma MackeyUne petite lueur dans les ténèbres

 

Après plusieurs versions et corrections, le travail de Caroline Bongrand a été invisibilisé par le réalisateur et la production (Romain Duris ne semblait pas au courant que Caroline Bongrand était la scénariste du film lorsqu'il l'a rencontrée sur le tournage). Bien sûr, Bongrand n'a pas manqué d'exprimer sa joie de voir son rêve à l’écran, mais le traitement qu’elle a subi et que subit la majorité des scénaristes est extrêmement critiquable. En soi, elle ne sera ni la première, ni la dernière personne a essuyé les plâtres d'une industrie qui manque régulièrement de bienveillance à l'égard de ses collaborateurs.

Néanmoins, ces derniers mois, plusieurs scénaristes ont fait un retour sur les mésaventures dans le milieu du cinéma sur le compte Twitter Paroles des scénaristes. En attendant que les choses puissent changer pour les déconsidérer du cinéma, Eiffel de Martin Bourboulon sortira le 25 août 2021, l’occasion pour le public de voir un biopic français ambitieux.

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commentaires
Flo
27/12/2023 à 14:22

« Accroche toi à la tour, j’enlève l’Eiffel ! » :-)
Martin Bourboulon fait aboutir un projet tortueux, initié et porté à bout de bras par Caroline Bongrand… Et manque le coche en évitant justement de mettre en parallèle le développement de ce film, entre France et Amérique (entre autre), avec la conception acharnée de la Tour Eiffel.
Peut-être parce-que, ironiquement, il aura fallu 5 fois moins de temps à construire ce monument qu’à faire aboutir ce film… à partir de 1997 !! Emma Mackey n’avait que un an à l’époque, c’est pour dire !
Et pour quel résultat ? Un téléfilm de luxe en fait, aux rebondissements plats, aux teintes marrons normatives (un manque d’audace constant de la part de Bourboulon, loin de la folie de ses « Papa ou maman »), à l’ampleur pas assez travaillée. Et qui repose sur une révélation qui est éventée dès le dossier de Presse, ou sinon, qu’on décèle très vite.
D’ici à ce qu’on arrive à la fin, on a la typique histoire d’amour impossible (classes sociales) sur deux âges, ou Romain Duris correspond plus à l’une (la maturité) et Mackey à l’autre (la jeunesse).
Dommage, la mise en parallèle de l’aventure bâtisseuse à haut risque, et de celle adultère non moins (avec un cocu plus intéressant, joué par Pierre Deladonchamps)… Ça ça aurait donné plus de nerf à ce film, si le réalisateur y avait été à fond.

Kyle Reese
15/06/2021 à 18:52

Vu l'interview de Caroline Bongrand sur Konbini. Elle reste lumineuse cette femme, malgré toute cette histoire. Malheureusement et à cause du réal, je n'ai aucune envie de regarder le film.
Les gens qui s’approprient en grande parti le travail des autres, en "lousdé" ça me débecte.

Terryzir
15/06/2021 à 10:28

Film mort-né par celle qui a tout fait pour le faire naître 20 ans durant...
Assez cocasse comme stratégie promotionnelle !
On sait tous que Besson n'est pas un tendre, encore moins un auteur-réal très subtil, mais le Bourboulon, lui, c'est quelque chose : fils de (ça, il n'y peut rien), rédac pour les Guignols (pire période), pubard invétéré, réal de comédies potaches...
Mettre un tel projet dans les mains d'un sagouin pareil, franchement, la productrice est aussi un peu responsable de ce naufrage annoncé.
Il y a faire des sacrifices et en faire coûte que coûte...
La scénariste aurait mieux fait d'attendre qu'une plateforme lui en propose un meilleur prix, un meilleur compromis, car l'industrie à l'ancienne est vraiment le lieu de toutes les pires compromissions, visiblement.

Cinégood
15/06/2021 à 09:14

Merci pseudo1, l'interview de Caroline Bongrand sur Konbini est top et le réalisateur, Bourboulon, n'en sort pas du tout grandi et est bien pire que Luc Besson qui lui, au moins, est franc et direct.

Jon
14/06/2021 à 23:18

Vraiment luc besson tu fait pitie

Ethan
14/06/2021 à 19:34

Ça me fait l'impression d'un film comme Edmond

Ethan
14/06/2021 à 19:28

On dit la tour Eiffel mais c'est plutôt la tour de Maurice Koechlin ingénieur et de Stephen Sauvestre architecte car c'est eux qui l'ont inventé.

RobinDesBois
14/06/2021 à 15:43

Bon après l'influence d'Adrienne Bourgès dans l'édification de la Tour Eiffel ça a l'air sacrément romancé voir fantasmé mais si le scénario est bon pourquoi pas. Cela dit je le sens pas du tout ce film, la bande annonce donne l'impression d'un PRODUIT très acadamique et fade. La musique hyper générique semble sortir de n'importe quel autre film Français de commande de ces 15 dernières années. Il aurait mieux valu que Ridley Scott le réalise.

RobinDesBois
14/06/2021 à 15:38

@Nouchi j'allais faire la même remarque. Mais après une recherche google Eiffel et Adrienne Bourgès avaient 11 ans d'écart (il avait 29 ans et elle 18 quand ils se sont rencontrés) donc ça passe, Emma MacKay peut passer sans problème pour une trentenaire.

Nouchi
14/06/2021 à 14:21

UN amour d'enfance entre Duris et MAckey qui ont 20 ans d'écart...

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