FIF de Saint-Jean-De-Luz : Jeunesse sauvage - critique Point Break

Christophe Foltzer | 9 octobre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Christophe Foltzer | 9 octobre 2019 - MAJ : 09/03/2021 15:58

En ces temps troublés, il est plus que normal que le cinéma attaque les sujets sociaux durs de front, ne serait-ce que pour tenter d'y comprendre quelque chose et de réfléchir à une possible issue. Une mission que s'est fixée Jeunesse Sauvage.

La délinquance, la violence des rues et des contextes sociaux difficiles, le cinéma en a fait son lot commun depuis fort longtemps, mais il semble que le sujet demeure malheureusement inépuisable. Parce que, peut-être la violence appelle la violence, tout comme la misère appelle la misère et qu'il semble bien difficile de briser ce cercle vicieux qui se nourrit autant de ses victimes que de ses bourreaux.

Pourtant, faut-il automatiquement condamner celui qui détrousse "l'honnête citoyen" ? N'y a-t-il pas d'explication à cette dérive, à cette plongée infernale dans les méandres du crime et des bandes organisées ? C'est cette mission que s'est imposée Frédéric Carpentier avec son premier long-métrage, Jeunesse sauvage.

 

photo Jeunesse sauvage Pablo Cobo et Léone François

 

À BALLES RÉELLES

Nous y suivons le jeune Raphaël qui, malgré son air poupon, est déjà un chef de bande violent, charismatique et redouté dans la ville côtière qu'il a transformé en terrain de jeu. Menus larcins, agressions et détroussages sont le lot commun de sa petite famille d'âmes en peine telles que lui qui le reconnaissent comme une figure d'autorité incontestable. Pourtant, les actes de Raphaël ne sont pas gratuits, puisqu'ils ne sont que la conséquence d'une existence morcelée entre une mère décédée trop tôt et un père malade à la rue. Difficile de se construire dans ces conditions. C'est cependant ce qu'il va tenter de faire, avec le risque malheureusement que ses agneaux se transforment en loups féroces à leur tour.

Le principe de départ, s'il est limpide et classique, n'en reste pas moins passionnant et prometteur. Une plongée dans la pègre à petite échelle, avec des gamins perdus gavés d'ambition qui se prennent déjà pour de grands gangsters avec tous les risques de se brûler les ailes. Et il est vrai que, de ce strict point de vue, Jeunesse Sauvage remplit parfaitement son contrat, nous dévoilant l'organisation derrière la bande, les entrainements incessants pour parfaire les techniques de vol, envisagés aussi comme le ciment du groupe qui assure une fidélité totale à Raphaël.

Une société dans la société, avec ses codes, ses rituels et ses secrets, que l'on n'a pas l'habitude de voir exploitée de cette manière au cinéma et qui apporte un plus indéniable à l'entreprise. Et il est vrai que durant ces moments, Jeunesse sauvage fascine.

 

photo Jeunesse sauvage*Face à un père qui n'est pas vraiment un modèle à suivre

 

POINT DE RUPTURE

Malheureusement, à côté de ça, il y a un film et une histoire à raconter et c'est là que les choses se compliquent un tantinet. Parce que le sujet est riche et dense, parce qu'il touche tous les aspects de l'existence, il ne convenait pas forcément au format de 1h20 de métrage. En effet, rapidement, le scénario montre ses limites, s'éparpille entre différentes voies possibles et histoires parallèles qui n'enrichissent jamais vraiment le noeud de l'intrigue, le parcours de Raphaël. Au contraire d'ailleurs.

C'est fort dommage d'ailleurs parce que le récit comporte tous les éléments pour nous raconter une histoire forte et prenante, mais c'est bien dans la construction dramaturgique qu'il semble y avoir un problème, le film n'amenant pas les différents événements importants lorsqu'il le faudrait. On se retrouve donc à errer d'une histoire à l'autre ce qui, et c'est regrettable, charge encore plus le personnage principal, tiraillé entre son père malade, sa proto histoire d'amour, sa perte d'autorité vis-à-vis de sa bande, les menaces extérieures et ses désirs intérieurs frustrés.

 

photo Jeunesse sauvageUne misère à laquelle on n'échappe pas

 

Pourtant, le côté animal de Raphaël et sa révolte intérieure s'avèrent saisissants par instants. Simplement, le timing n'est pas le bon. En résulte une empathie un peu forcée qui "charge la mule" maladroitement et en vient à amoindrir l'effet recherché. Peut-être l'ambition du réalisateur était-elle trop haute par rapport à la réalité du film.

On le répète, l'effort est noble et à saluer, mais, peu aidé par des punchlines maladroites et des comédiens approximatifs, Jeunesse sauvage retombe bien vite là où il aurait dû nous emporter, nous faire monter et nous lâcher en plein lors d'un final, prévisible certes, mais qui nous aurait cloué sur place émotionnellement parlant.

 

Film très fragile et handicapé par une structure narrative quelque peu défaillante, Jeunesse Sauvage promet plus qu'il ne peut offrir. Et c'est fort dommage parce que, dans son principe, il aurait dû nous prendre à la gorge. Mais gageons que ce premier essai permettra à son réalisateur passionné de s'envoler vers les cimes qu'il veut atteindre. En tout cas, il a tous nos encouragements.

 

photo Affiche Saint Jean de Luz

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