Cannes 2018 : critique à chaud d'Heureux comme Lazzaro d'Alice Rohrwacher, potentielle Palme d'Or

Alexandre Janowiak | 17 mai 2018 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Alexandre Janowiak | 17 mai 2018 - MAJ : 09/03/2021 15:58

En 2014, malgré une réception critique désastreuse, Les merveilles d'Alice Rohrwacher recevait le Grand Prix du Festival de Cannes des mains du jury présidé par Jane Campion. Cette année, l'Italienne est de retour sur la Croisette avec son nouveau film Heureux comme Lazzaro.

 

 

LAZZARO GUMP

Après Corpo Celeste présenté à la Quinzaine des réalisateurs en 2011 et Les merveilles auréloé du Grand Prix en 2014, la jeune réalisatrice italienne Alice Rohrwacher revient sur la Croisette en compétition pour la Palme d'Or avec son troisième long-métrage Heureux comme Lazzaro (Lazzaro Felice en version originale).

Le long-métrage raconte l'histoire d'un groupe de paysans vivant à l'Inviolata, un ménil à l'écart du monde dirigé par la marquise Alfonsina de Luna (Nicoletta Braschi). Parmi eux, Lazzaro (Adriano Tardiolo, superbe révélation), un jeune paysan dont l'exceptionnelle bonté est utilisée par les autres villageois pour le faire exécuter nombre de tâches ingrates.

Ainsi, le village, lui même exploité par la marquise, profite allégrement de sa générosité jusqu'au jour où Lazzaro se lie d'amitié avec Tancredi, fils de la marquise. Sa vie bascule alors à travers les âges et le temps.

 

PhotoUne amitié émouvante

 

CONTE CELESTE

Filmé en 16mm, Heureux comme Lazzaro, de par sa lumière naturelle sublime et sa texture granuleuse, a quelque chose de profondément intemporel. Si l'atmosphère agricole et les décors mobiliers du premier acte laissent à penser que le récit se déroule dans l'Italie de Fellini des années 50, impossible de savoir précisément à quelle époque se déroule l'histoire dont la temporalité ne sera jamais précisée.

Alice Rohrwacher va user jusqu'à la moelle ce choix judicieux pour proposer une oeuvre aérienne où le temps s'arrête pour laisser place à la beauté et la cruauté du monde. Magnifique de bout en bout, l'aventure rurale de Lazzaro se transforme, après un événement aux airs christiques, en une sorte de Candide des temps modernes. La première partie néoréaliste d'Heureux comme Lazzaro laisse alors place au surréalisme, la réalité à une poésie du rêve, un lyrisme mystique et une pureté enivrante.

 

PhotoAdriano Tardiolo

 

LA DOLCE INGIUSTIZIA

En transportant son personnage principal dans un monde inconnu où les règles ont changé, la réalisatrice s'attaque ainsi aux injustices quotidiennes de l'Italie, en priorité, et aussi du monde tant son oeuvre à une valeur universelle.

De cette manière, son conte philosophique se révèle aussi être une critique des anomalies sociales, des inégalités ou des extravagances économiques de son pays. Un propos politique fédérateur toutefois un peu trop simpliste dans sa dénonciation et qui manque cruellement de profondeur. La splendeur onirique d'Heureux comme Lazzaro en prend un petit coup et l'on se dit que la douce et sensible fable s'est vu plus ambitieuse qu'elle ne pouvait l'être.

 

Malgré son propos politique simpliste, Heureux comme Lazzaro est une petite merveille de poésie, mêlant néoréalisme et surréalisme, sublimé par sa photographie intemporelle et l'interprétation de son acteur principal, Adriano Tardiolo.

3,5/5

 

Affiche italienne

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