Festival de Saint-Jean-De-Luz : Jour 3 - on lâche rien

Christophe Foltzer | 6 octobre 2017 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Christophe Foltzer | 6 octobre 2017 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Arpès deux journées riches en émotions, le Festival de Saint-Jean-De-Luz a à présent trouvé son rythme de croisière. Ce qui ne veut pa dire qu'il se laisse aller. Ce serait d'ailleurs tout le contraire.

Même si, on doit vous l'avouer, nous ne sommes pas contents. Alors non, il y a quelque chose qui ne va pas et dont on parle depuis le début : la météo. après le beau soleil du jour 2 voici qu'un temps bien pourri nous accueilli en ce début de jour 3 et c'est inadmissible. On ne vient pas en Pays Basque pour se taper le même temps qu'à Paris. Non mais. Heureusement, nous ne sommes pas venus ici pour nous faire bronzer, il nous reste encore plein de films à voir et après le choc de la veille, Diane a les épaules et Jusqu'à la garde, nous étions plus qu'impatients de nous remettre au charbon. C'est qu'on croirait presque qu'on aime se prendre des gifles.

 

Photo Last laughLe rire de Madame Lin

 

LE RIRE DE MADAME LIN :

Ne vous laissez pas tromper par son titre, le premier film de Zhang Tao n'a rien d'une comédie puisqu'il dépeint le quotidien des paysans chinois alors qu'ils tentent de faire intégrer leur vieille mère dans un hospice. Se refilant la vieille femme comme un fardeau, chacun de ses enfants va se trouver une excuse pour s'en débarrasser tandis que la femme, après une chute, ne peut plus s'empêcher de rire. Il faut reconnaitre que, pour une première oeuvre, le réalisateur n'a pas choisi la facilité. De par son thème déjà, qui traite du problème de la vieillesse et de la prise en charge par la famille dans la province chinoise, que par la forme, une caméra portée privilégiant de nombreuses scènes contemplatives et un rythme particulièrement lent et posé. Si dans la mise en scène Zhang Tao ne parvient pas tout le temps à ses fins, il faut reconnaitre que le sujet est tellement fort qu'il permet de palier à un sens du rythme assez handicapant (le film paraissant par moments très long alors qu'il ne dure qu'1h22). Si le déroulé narratif est en lui-même assez classique et ne surprendra guère les cinéphiles, Le rire de Madame Lin parvient à émouvoir grâce à l'excellence de son actrice principale, Yu Fengyuan, parfaite du début à la fin en vieille femme un brin sacrificielle, qui se détache progressivement des contingences du réel pour ne plus penser qu'à la trace qu'elle va laisser. C'est d'ailleurs le point fort du film, cette peinture rurale sans concessions qui n'hésite pas à montrer une famille contradictoire et paradoxale, uni et qui pourtant dégage d'elle-même le morceau qui dérange. Un film clairement à découvrir mais on vous conseille néanmoins d'être bien réveillés tant le rythme est lent à certains moments.

 

Photo Le SemeurLe Semeur

 

LE SEMEUR :

Retour en France mais dans le passé avec Le Semeur de Marine Francen, adaptation de l'oeuvre L'homme semence de Violette Ailhaud. Ici, nous nous retrouvons en 1852, lorsque Napoléon Bonaparte fait son coup d'état et met un terme à la Deuxième République. Les troupes du futur empereur investissent un village des montagnes pour emmener tous les Républicains. Il ne reste donc plus que les femmes et les enfants pour assurer la survie de la communauté. Plusieurs mois passent sans nouvelles des hommes et les plus jeunes des femmes font le pacte de se partager le premier mâle qui passera au village. Et c'est à ce moment qu'apparait Jean, maréchal-ferrant itinérant. La première pensée qui vienne à l'esprit, c'est Les Proies de Don Siegel (et aussi de Sofia Coppola) mais heureusement le film s'affranchit très rapidement de cette référence lourdement handicapante. Après une première séquence musclée, le film a l'intelligence de prendre son temps pour développer ses personnages et son univers, très intéressants par ailleurs et de nous livrer quelques portraits de femmes comme on en voit rarement au cinéma. Il y a un vrai sentiment communautaire qui se crée au rythme des saisons et c'est très bien retranscrit. Les comédiens sont tous très bons, Alban Lenoir est parfait comme d'habitude, quant à Pauline Burlet, elle rayonne dans chaque espace qu'elle occupe à l'image, lumineuse, sensible, touchante, belle, son regard intense saisit le spectateur et ne le lâchera qu'à la toute fin. Une réussite d'autant plus éclatante que son rôle quelque peu ambigu et constamment sur une ligne fine n'est pas évident. Cela dit, le film souffre quand même dans sa seconde partie d'une certaine retenue vis-à-vis de son sujet alors qu'il réclamait pourtant que l'on se lâche complètement. Un petit manque de perversion, de cruauté, d'ombre humaine qui rend malheureusement la conclusion de cette histoire un peu trop convenue là où on s'attendait à ce qu'elle nous surprenne. Ce qui n'enlève cependant pas la qualité du reste.

 

Photo La fête est finieLa fête est finie

 

LA FÊTE EST FINIE :

Changement drastique d'ambiance avec La Fête est finie, le premier film de Marie Garel Weiss, consacré à deux jeunes femmes perdues dans la drogue et qui se rencontrent dans leur centre de désintoxication. Rien que là, on sent que l'on n'aura pas droit à une grosse comédie franchouillarde. Tendance qui se confirme très rapidement lorsque l'on rencontre les deux incroyables actrices du film, Clémence Boisnard et Zita Hanrot, impressionnantes de tension, de sensibilité et d'investissement dans des rôles pas évidents. En traitant de l'enfer de la drogue, la réalisatrice nous pose avant tout une grosse question sur la nature de nos relations humaines. Qu'est-ce qui est du domaine de l'affect et qu'est-ce qui relève de la dépendance (qu'elle soit narcotique ou affective) , A travers le parcours de ces deux âmes perdues, Marie Garel Weiss cherche aussi à nous montrer les bas-fond de cet enfer de façon très crue, moins pour nous choquer que pour nous en faire prendre conscience. Ainsi, le film est particulièrement dur et éprouvant tout autant qu'il révèle une beauté humaine entre deux jeunes femmes qui ne saurait s'éteindre aussi facilement. Malheureusement, après une première partie très réussie et passionnante, le film semble se reposer sur ses flamboyants acquis en oubliant quelque peu ses personnages en route et en transformant son propos en véritable tract promo anti-drogue. Alors ce n'est pas mal fait, c'est même plutôt efficace, mais on aurait aimé rester un peu plus longtemps avec nos touchantes nouvelles amies plutôt que de voir le message prendre le pas sur le messager. Un peu dommage certes, mais cela n'enlève heureusement rien aux qualités du film.

 

Nous venons donc de dépasser la moitié du festival, nous avons trouvé notre rythme de croisière, et voià que déjà la fin se profile. C'est comme ça à chaque fois, et on se fait avoir tous les ans. Il faut dire aussi qu'avec une sélection d'un tel calibre, on aurait envie que cela dure encore un long moment. A suivre donc...

 

Photo FIF st jean de luz

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