Rutger Hauer - Interview with a shotgun

Vincent Julé | 25 octobre 2011
Vincent Julé | 25 octobre 2011

Il a fait chialer des hordes de fanboys en androïde dans Blade Runner. Il a enlevé l'envie à des générations entière de faire de l'autostop avec Hitcher. Il a prouvé q'une muse pouvait être un grand type blond aux yeux bleus via sa collaboration avec Paul Verhoeven. L'acteur holllandais Rutger Hauer a ainsi tout joué, et continue, pour le pire et le meilleur. Pour le grindhouse Hobo with a shotgun qui vient de sortir en DVD/Blu-ray par exemple. Pour L'Etrange Festival 2011 aussi, qui lui accordait une soirée spéciale avec La chair et le sang, Hitcher et l'avant-première de Bruegel, le moulin et la croix, le 18 décembre en salles. Et, enfin, pour un entretien avec EcranLarge.

 

Vous deux parents étaient acteurs, cela a-t-il influencé votre choix de carrière ?

A vrai dire, non, mais je ne savais pas quoi faire d'autre. Ils m'ont dit d'essayer les cours de comédie, que j'aimerais peut-être. A l'époque, je voulais me tourner vers la réalisation, mais je me suis dit qu'avant d'en arriver là, il était intéressant de savoir jouer. C'est de cette manière que j'ai commencé. Quatre ans de comédie, et j'ai rien appris ! Puis je suis monté sur les planches avec une troupe de théâtre, je n'y étais pas très à l'aise. Enfin, j'ai trouvé la caméra, j'ai tout de suite su que c'était mon médium. J'ai alors quitté ma compagnie pour être disponible si un film voulait de moi. Ma première expérience s'est faite finalement à la télévision.

La série médiévale, en noir et blanc, Floris, avec déjà le réalisateur Paul Verhoeven.

Il n'avait alors fait que des documentaires, et c'était la première histoire qu'il racontait. Nous marchions tous les deux sur des oeufs, nous étions comme des enfants le premier jour d'école. Je me suis bien amusé, j'ai pu monter à cheval, faire mes cascades. Après, pour le jeu, j'étais moins sûr.

 

 

Et parmi les cinq films que vous avez fait avec lui, lequel est votre favori ?

Vous savez, un premier film est un peu comme un premier amour. Vous ne l'oubliez pas. Surtout que Turkish Délices est une histoire d'amour, adaptée d'un beau livre de Jan Wolkers, et que le film a connu un vrai succès aux Pays-Bas. « Big moment ! » Le second, Le choix du destin ou Soldier of Orange en anglais, est très différent. J'y jouais un personnage, dont je ne me sentais pas forcément proche, je devais me mettre dans sa peau. L'homme dont le film s'inspire, Erik Hazelhoff Roelfzema, était vivant et est venu en Hollande, nous sommes mêmes devenus très bons amis. J'avais donc le livre, le scénario, son témoignage, et je m'avais moi-même. C'est aussi le film qui m'a permis de traverser l'Atlantique et d'aller aux Etats-Unis. Même s'ils ne m'attendaient pas.

Mais ils vous ont adopté ?

J'ai eu un agent et un avocat, et je me suis dit, ça y est, j'y suis. Bon, je n'avais aucune idée de qui ils étaient, mais je savais que j'avais besoin d'eux. Et à peine dix jours plus tard, j'avais déjà une offre pour un film, un premier rôle qui plus est. Sauf que deux semaines plus tard, ils ont rappelé mon agent pour lui dire que le film ne se ferait pas. Il leur a dit de plutôt appeler l'avocat, car il y avait un contrat. Je me suis donc retrouvé avec 50 000 dollars sans avoir tourné quoi que ce soit. Et c'était plus d'argent que je n'en avais jamais gagné. Ok, c'est donc du sérieux. J'ai utilisé cet argent pour me payer des cours de langue, d'élocution. Ma carrière a commencé là-bas avec Les faucons de la nuit. J'avais deux offres sur la table, l'autre était un plus gros film, plus gros réalisateur, plus gros salaire. Mais je ne le sentais pas, j'ai donc choisi le film avec Stallone et essayé de jouer le terroriste le plus charmant et le plus dangereux possible.

 

 

Comment avez-vous décroché LE rôle dans Blade Runner ?

L'agent de casting du film a parlé de moi à Ridley Scott. Il avait vu Soldier of Orange et m'a fait très vite une proposition. Je n'ai même pas eu à faire de screen test comme les autres. « Just like that. »

Et la scène finale sur le toit, la légende veut que vous ayez improvisé.

C'est vrai, les gens aiment le dire, mais la vérité est un peu différente. En fait, j'ai coupé tout un dialogue, un long monologue, et j'ai gardé juste deux lignes qui faisaient selon moi plus sens que le reste. « All those moments will be lost in time, like tears in rain. Time to die. »

Vous pensez quoi de la mise en chantier d'une suite ou d'un spin-off de Blade Runner ?

Je ne sais pas. La première chose que je me suis dite, c'est « bullshit » ! J'avais entendu dire qu'ils essayaient en effet d'acquérir les droits, puis qu'ils se demandaient qui, aujourd'hui, pouvait réaliser une suite à Blade Runner. Christopher Nolan aurait été un bon choix par exemple. Maintenant que Ridley est attaché au projet, je ne sais pas, s'il a quelque chose de surprenant et d'original. Car il n'y a pas de Blade Runner 2, il n'existe pas. Mais raconter une autre histoire à la Blade Runner...

A la manière de ce qu'il a fait pour Alien avec son futur Prometheus. Mais s'il vous appelle ?

Je dirais qu'il est fou, « fucked up » ! Je suis mort, merde.

Tout est possible à Hollywood.

Oui, et Roy Batty est un robot, un Nexus-6. Mais franchement, pourquoi ? Je l'ai déjà fait, je ne le referais pas.

 

 

Vous auriez été envisagé pour le rôle de Robocop de Paul Verhoeven, c'est vrai ?

Il me voulait en effet, et j'ai dit non. Mais peu importe qui dit non finalement. Le « non » vous mène à votre prochain rôle. [Rutger prend et dispose cueillère, fourchette et sucrier sur la table] Pour atteindre la cueillière, il faut que je dise non à la fourchette, puis non au sucrier. Ainsi, j'ai été contacté pour jouer dans Das Boot de Wolfgang Petersen, mais je ne voulais pas le faire, le scénario était ennuyeux, le tournage durait 14 mois, et derrière il y avait Blade Runner. Si j'avais dit oui, je n'aurais pas pu faire Blade Runner, et vous savez quoi, je ne serais sans doute pas assis là en face de vous.

Quel projet était la cueillère alors ?

Ah ah, persone ne m'a jamais posé cette question. Quelle était la cueillère après Robocop ? [Rutger ouvre son ordinateur portable et clique sur sa page Wikipédia] Robocop a été tourné quand ? Vers 1984 ? Donc Ladyhawke, la femme de la nuit arrive juste après, ainsi que La chair et le sang et Hitcher. C'est là que c'est devenu intéressant. En une même année, j'ai tournée pas moins de cinq films, tous différents, de La légende du Saint Buveur à Vengeance aveugle !

 

 

Paul Verhoeven, Ridley Scott, Sam Peckinpah... vous avez tourné avec plusieurs réalisateurs  reconnus comme difficiles.

Tu ne peux pas faire un film fort avec un réalisateur faible. Ridley en est le parfait exemple. Il a eu tellement de problèmes à régler sur Blade Runner. Et pourtant, il carburait, tout seul, avec sa propre énergie. C'est peut-être le film qu'il a eu le plus de mal à faire, mais c'est aussi celui dont il est le plus fier. Je suis heureux d'avoir pu fréquenter de tels créateurs, car le travail peut être très difficile. Et le plus souvent, c'est une question d'ego. Le vôtre, le leur, le vôtre, le vôtre... Être créatif, c'est envoyer balader son ego.

Il est donc temps pour vous de réaliser ?

J'ai déjà tourné trois courts métrages, car je dois me prouver que je peux le faire. Un long métrage, c'est pour bientôt. Une histoire qui n'est pas de moi, sur un enfant qui veut être écrivain et dont les écrits prennent vie. Un conte à la Peter Pan. J'ai un co-réalisateur, mais pour l'instant, il faut sécuriser les droits, pour combien de temps, blablabla.

 

 

Remerciements à Xavier Fayet et toute l'équipe de L'Etange Festival 2011.

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