Fanny Valette (Vertige)

Laurent Pécha | 20 juin 2009
Laurent Pécha | 20 juin 2009

L'une des grandes forces de Vertige, superbe réussite du cinéma de genre français, est assurément son casting. Une troupe d'excellents comédiens encore peu connus du grand public dont Fanny Valette, nominée en 2006 au César du meilleur espoir féminin pour La Petite Jérusalem, est l'étendard. Rencontre avec une actrice qui vous séduit naturellement par son talent, son charme, sa beauté et ses convictions. Elle a vraiment tout d'une grande !

 

Comment arrive-ton sur un film comme Vertige ? Vu l'état du cinéma de genre français, est-ce le genre de film difficile à accepter pour une actrice connue ?

C'est un genre que j'aime beaucoup. Je regarde des films d'horreur depuis que j'ai 6 ans, et je me suis dit que ça valait le coup d'essayer, que celui-là pourrait bien être différent des autres. Et puis c'est une expérience : ça me plaisait de faire mes cascades, de faire de jolies rencontres avec de jeunes comédiens...

 

 

 

Justement, tu n'as pas eu peur de te lancer au milieu de tous ces acteurs sans expérience ? C'est typiquement le genre de film où les acteurs sont souvent mauvais...

Je  savais exactement où je mettais les pieds. Par exemple, au moment du casting, j'ai tout de suite accroché avec Maud [Wyler], qui m'a tout de suite paru être une bonne comédienne, et avec  Raphaël [Lenglet], on a dit à Abel [Ferry] : « il faut que ce soit elle ».

 

Le tournage n'a pas dû être de tout repos...

On a même carrément failli y passer, et plus d'une fois. Rien que le fait d'être sans arrêt en short et t-shirt alors que la température avoisine les -7°C, c'était terrible. La scène sous la pluie, c'est quatre jours à passer sous des rampes d'eau glacée. Je me suis sincèrement demandé si j'allais tenir jusqu'au bout, si je n'allais pas lâcher physiquement.

 

 

 

C'est peut-être parce que vous vouliez en finir plus vite que vous êtes tous si justes ?

Au contraire. Ce sont des conditions qui paralysent. On n'arrive plus à parler, à jouer, à réfléchir, à ressentir quoi que ce soit. Il faut redoubler d'efforts pour rester dans son personnage. J'ai dû faire preuve de beaucoup de concentration pour y arriver : entre les prises j'étais totalement exténuée, mais dès que ça tournait, j'arrivais à être dedans, et même à oublier le froid et la pluie.

 

Ton personnage joue une interne. Tu as connu une préparation spécifique ?

Oui, et c'était terrible. On m'a emmené en service pédiatrique, et j'ai une telle passion pour les gosses que ça a failli me traumatiser. J'ai rencontré des infirmières et des internes pour mon rôle, mais j'ai également croisé des enfants en bas âge à la santé bien précaire. Quand je suis sortie de là, je me suis effondrée dans la rue, en larmes, sans savoir si j'allais pouvoir me relever. Mais c'est une expérience qui m'a beaucoup aidée, je voulais faire les choses à fond. C'est d'ailleurs ce que je voulais absolument montrer dans le film : que contrairement à ce qui se passe régulièrement dans les films d'horreur, les personnages aillent au bout d'eux-mêmes et vivent leurs expériences pleinement. Souvent, on en voit qui perdent un proche, et deux secondes après on a l'impression qu'il ne s'est rien passé. Je voulais qu'il y ait dans le film un vrai ressenti à faire partager au public, sans que cela entrave sa trame horrifique.

 

 

 

Je suppose que d'autres avant moi t'ont parlé du fameux t-shirt que tu portes, et qui fait de toi une icône érotique instantanée...

Tout le monde en parle, c'est vrai. Ce qui est drôle, c'est que moi-même je suis impressionnée par ma poitrine dans le film. Quand je l'ai vu, je ne regardais que ça. C'était l'été, j'avais les hormones ultra développées, c'est comme ça... Et puis ça arrangeait les producteurs, qui n'avaient rien contre un petit côté sexe pour le film. D'autant qu'au départ, l'héroïne devait être une blonde à forte poitrine, une bonnasse comme dans les films américains. J'ai tenté de défendre autre chose, ils m'ont engagée en oubliant un peu cet aspect, mais au moment du visionnage des premiers rushes, ils sont revenus avec la banane et m'ont remerciée chaleureusement.

 

Il a un secret ce t-shirt ?

Mais non, c'est un t-shirt tout ce qu'il ya de plus classique. J'ai le droit d'avoir une jolie poitrine, non ? Le problème aujourd'hui, c'est qu'il n'y a plus aucune nana qui bouffe. Elles sont toutes hyper maigres, c'est déprimant. Au moment de la préparation du film, on m'a demandé de faire beaucoup d'exercice pour être très sèche, sauf que ça ne me semblait pas nécessaire : dans le film, on est une bande de jeunes qui partent à la montagne, pas une armée de top models... Les vraies nanas, celles qu'on croise dans la rue, ont des formes. Ça serait pas mal qu'une fois de temps en temps qu'elles puissent se reconnaître dans un personnage féminin. Rien que pour ça, je suis assez contente qu'on parle de ma poitrine.

 

 

 

Comment tu expliques que dans le cinéma de genre américain ou espagnol les acteurs soient si souvent convaincants même quand le film est raté alors que c'est loin d'être le cas chez nous ?

En France, on est des feignasses. Tout simplement. Les acteurs français ont un poil dans la main, ils ne bossent pas assez. Moi, j'ai l'impression que quand je lis un bouquin, quand je prends le métro ou quand je dîne avec des potes, je suis en train de bosser mon personnage. Je vois beaucoup de films, je vais au théâtre... C'est comme ça qu'on apprend. On a beau avoir du talent à la base, ça se travaille. Il faut arrêter de se croire supérieur à qui que ce soit, on a tous besoin de bosser. Et ça se fait notamment en regardant les grands, en s'intéressant à l'humain. Quand je vois Meryl Streep dans Le choix de Sophie, je prie pour avoir un jour un huitième de son intensité dramatique, et je me dis que cette nana, elle a bossé. Elle s'est cultivée, elle a beaucoup appris des autres, elle s'est toujours remise en question.

 

Tu peux me parler de la fin du film ?

On a tous été surpris en le découvrant en projection car la fin initiale était bien différente. (attention Spoiler, à lire après avoir vu le film) Mon personnage vit avec le traumatisme de ne pas avoir pu sauver son patient lorsqu'elle était interne car elle n'était pas parvenue à enfoncer la lame pour lui permettre de respirer. Depuis ce jour là, elle doute de ses capacités à faire son métier et le combat final était censé la révéler en tant que héroïne. Elle parvenait à terrasser son adversaire en lui plantant cette fois-ci le couteau dans la gorge. C'était son exorcisme (fin du spoiler). Cela clôturait magnifiquement le film mais comme elle a été tournée, on pourra peut être la voir un jour en fin alternative sur l'édition DVD.

 

 

 

 

Retranscription par Thomas Messias

Remerciements à Nicolas Weiss 

Un grand merci à Fanny Valette

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