José Garcia (G.A.L.)

Thomas Messias | 5 mai 2008
Thomas Messias | 5 mai 2008

Dans G.A.L. de Miguel Courtois, José Garcia est Manuel Mallo, journaliste espagnol qui met à jour avec une consoeur le scandale du G.A.L., Groupe Antiterroriste de Libération, responsable d'une série d'attentats menés contre l'ETA. Détendu, disert et très pro, il revient avec nous sur le film.

 

Le film s'inspire d'une histoire vraie, dont l'un des protagonistes est le producteur Melchior Miralles, alors journaliste… Vous êtes-vous inspiré de lui pour le rôle ?

Melchior fait en effet partie le la douzaine de journalistes qui ont sorti ces histoires au grand jour. Je me suis beaucoup entretenu avec lui : c'est une histoire tellement riche qu'il fallait plus que des livres pour en saisir tous les tenants et aboutissants. J'avais aussi besoin de savoir comment on travaille quand on est journaliste d'investigation, et je l'ai consulté pour savoir comment il avait réagi face à telle ou telle situation. Au début du film, il y a une scène dans laquelle Natalia Verbeke et moi découvrons une cachette dans la forêt ; je lui ai alors demandé comment ils avaient fait pour ne pas être terrorisés à l'idée de se faire tirer dessus. « On était six, ça aide. » Tout simplement. Mais dans le film, nous ne sommes que deux, pour des raisons évidentes. En fait, nos deux personnages sont un mix de tous ces journalistes. Six, ça aurait été trop. Même si en Espagne, c'est le début d'une caravane…

 

Y a-t-il beaucoup de différences entre jouer le journaliste de GAL et, par exemple, le flic de Pars vite et reviens tard ? Ce n'est pas un peu la même démarche ?

Non, c'est très différent. Question de timing. Les deux sont en quête de vérité, mais le policier est beaucoup plus dans l'urgence. Quand il y a un meurtre, désolé pour le pléonasme, mais c'est une question de vie ou de mort. Vous vous battez contre la montre pour trouver un coupable. Dans le journalisme d'investigation, il s'agit surtout de pêcher des informations pour comprendre l'intégralité de ce qui arrivé. Mais il n'y a pas cette obligation de résultat, on n'est pas confronté à la mort de la même manière.

 

 


 

 

C'est difficile de se concentrer à la fois sur la langue espagnole et sur l'interprétation ?

Oui. J'ai beau être hispanophone, quand il s'agit de jouer, tout change. C'est un peu comme évoluer dans des sables mouvants. C'est dur d'appuyer sur des émotions dans une autre langue que le français. C'est mon troisième rôle en espagnol (après Utopia et Le septième jour, NDLR), et c'est celui qui s'inscrit le plus dans la longueur. C'est très éprouvant. Certains jours on a un peu honte, surtout quand c'est censé être votre langue. Je devais être irréprochable, et le moindre détail mal réglé ou la moindre référence que je ne comprenais pas faisait désordre. À la rigueur, c'est plus facile quand on tourne dans une langue qui n'est pas la sienne. Quand je joue en anglais face à Vincent Gallo dans Trouble every day, je ne me pose pas de questions, et hop, c'est réglé en deux prises. Là, c'était plus compliqué.

 

Et jouer en espagnol face à Bernard Le Coq (qui incarne un ministre espagnol), c'est comment ?

Avec Bernard, c'est une histoire d'amour de longue date. On était très contents de se retrouver après La boîte noire. C'est un acteur absolument dément, il se débrouille vraiment bien. Il a été doublé en espagnol, mais il avait appris ses répliques à la virgule près afin d'être le plus crédible possible et que le doublage soit parfait. Il a abattu un boulot extraordinaire. Ne lui manquait que l'accent pour pouvoir être totalement crédible sans doublage.

À propos de Bernard Le Coq, vous savez qu'il est extrêmement connu en Espagne ? Figurez-vous que pendant trois ans, il y a assez longtemps de cela, il a été le héros d'une série de pubs pour Schweppes en Espagne. Du coup, il est ultra connu, un peu comme le Monsieur Plus de chez Bahlsen, et les gens l'arrêtent dans la rue, hilares, en croyant qu'il n'a fait que sa de toute sa carrière.

 


 

 

Le film a-t-il été difficile à monter ?

Assez, oui. Malheureusement, l'ETA fait encore régulièrement la une des actualités. On est toujours en plein dedans, il y a encore une liste de gens recherchés pour ces affaires… C'est un sujet très sensible, qui fait réagir tous les Espagnols. La grande question du film, c'est de savoir comment une démocratie peut réagir contre le terrorisme. C'est le genre d'histoire qui peut se répéter éternellement. Il suffit d'aller voir du côté du Pays Basque et de discuter avec les gens pour réaliser que ces drames et ces scandales sont présents dans toutes les têtes. En Espagne comme en France, l'ETA est présent dans n'importe quel petit bled du fin fond du Pays Basque. Difficile d'en faire abstraction.

Bizarrement, pour le reste de la France, ces affaires emblent très abstraites. On vit plus intensément les problèmes de la Corse, par exemple. Pourtant, les évènements liés au Pays Basque sont souvent plus forts. Et même si ça semble très délicat, il faudrait qu'on arrive à trouve rune solution, comme ce fut le cas par exemple en Irlande. Il faudrait que les gens puissent enfin vivre tranquilles.

 

Après la sortie de GAL, vous avez reçu plus de propositions en Espagne ?

Pas spécialement. Mais ce n'est pas vraiment ma démarche. En Espagne, il y a beaucoup de très bons acteurs, et leur cinéma n'a pas besoin de moi pour être bon. Et puis j'ai déjà beaucoup de travail en France. Si je vais chercher du côté de l'Espagne, c'est surtout pour la force des rôles. Là-bas, le cinéma intimiste parle toujours de sujets extrêmement forts, et c'est ce que je recherche. Alors que dans le cinéma d'auteur français, il y a comme une espèce de douceur qui s'est installée, ce qui fait que les problèmes mis à jour manquent sérieusement de nerf. Ça ne m'intéresse pas, ces petits problèmes existentiels pas très compliqués à résoudre, ces petites choses sociales traitées du bout des lèvres. Dans la comédie ou le drame, j'y suis toujours allé à fond. Avec des réussites variables, mais c'est un risque que je veux continuer à prendre.

J'ai plusieurs objectifs quand je travaille en Espagne. Aider ma région, la Galice, qui commence à devenir un vrai vivier culturel et une région magnifique dont les paysages pourraient faire le bonheur de beaucoup de réalisateurs. Et puis j'ai une vraie envie de coproductions. Je crois énormément au cinéma européen, je pense qu'on doit profiter de cette culture méditerranéenne commune et s'allier pour compenser la faiblesse de l'économie de nos pays respectifs. Pour GAL, je suis allé voir Europa, je les ai convaincus de prendre les droits pour la France, et le film a pu se faire. Très franchement, c'est quasiment de la philanthropie. En échange, ça me permet d'obtenir des rôles intéressants à la place d'acteurs plus doués que moi.

Mon prochain film sera une coproduction avec l'Italie : Gino story, réalisé par Samuel Benchetrit. J'ai hâte de m'y mettre, d'autant que je n'ai pas tourné depuis bientôt dix-huit mois. En revanche, une fois que j'aurai repris, je ne suis pas prêt de m'arrêter…

 

 

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