Rachel Weisz (The Fountain)

Stéphane Argentin | 25 décembre 2006
Stéphane Argentin | 25 décembre 2006

Surtout connue du grand public pour son rôle dans La Momie, Rachel Weisz alterne avec une grande clairvoyance les grosses productions US (Poursuite, Constantine) et les longs-métrages plus « fins ». Dans cette seconde catégorie, sa performance l'an passé dans The Constant gardener lui a ainsi valut moult distinctions. Pour son dernier long-métrage en date, The Fountain, elle se retrouve dirigée pour la première fois par le scénariste – réalisateur qui partage sa vie à la ville depuis plusieurs années maintenant : Darren Aronofsky. Rencontrée au cours du Festival du Film Américain de Deauville en septembre dernier, Rachel Weisz est revenue avec humour et décontraction sur ses choix de carrière ainsi que sur le nouveau film d'un metteur en scène classé dans la catégorie « cinéastes cultes » après seulement deux longs-métrages : Pi et Requiem for a dream.

Dans The Fountain, la mort est évoquée comme un acte de création.
Dans le film, mon personnage s'intéresse à la civilisation Maya dont la culture considère la mort comme un acte où le corps nourrit la terre fondatrice d'où la vie peut ensuite jaillir à nouveau. À mes yeux, ce processus s'apparente davantage à du recyclage qu'à une réincarnation.

Portez-vous un intérêt particulier à la culture Maya ?
Leur culture m'intéresse bien que je sois assez ignorante en la matière. Darren est définitivement le plus passionné de nous deux sur le sujet.

Si vous deviez choisir entre l'Arbre de Vie et l'Arbre de la Connaissance, lequel choisiriez-vous ?
(Long silence). C'est une très bonne question. Selon la Bible, nous possédons tous la Connaissance puisque Eve s'est sustentée de cet Arbre, ce qui lui coûta l'innocence en même tant que le Jardin d'Eden. Toute la question est donc de savoir ce que vous obtenez et ce que vous perdez lorsque vous choisissez l'un ou l'autre des deux Arbres. C'est un choix très délicat.


L'Arbre de la Vie dans The Fountain
Si vous pouviez être immortelle, serait-ce une bénédiction ou bien une malédiction ?
Si vous êtes seul, c'est sans l'ombre d'un doute une malédiction. À l'opposé, si tout le monde devait être immortel, les répercussions sociales seraient nombreuses : la surpopulation, aller à l'école pendant 6000 ans… (rires). Je plaisante mais la situation est assez difficile à imaginer.

Le fait d'être une artiste, une comédienne, signifie que vous touchez du doigt une certaine forme d'immortalité puisque les œuvres auxquelles vous prenez part seront à jamais inscrite dans l'Histoire ?
J'ignore si les films auxquels j'ai pris part seront accessibles éternellement mais ils me survivront, ça c'est une certitude.

Y a-t-il une scène dans The Fountain qui ait été plus difficile que les autres à tourner ?
Mon plus grand challenge a été d'interpréter Izzi au présent. Vous la découvrez quelques jours à peine avant son trépas alors qu'elle est encore jeune, et pourtant elle accepte sa mort. À mon âge, la dénégation est la réaction « naturelle ». Parvenir à cet état mental d'acceptation dans les derniers jours de la vie du personnage fut donc très difficile.

Est-ce que vous écrivez tout comme votre personnage dans le film ?
Je faisais partie d'un groupe d'improvisation de pièces lorsque j'étais à l'université mais je n'ai jamais écrit.

Aucune envie d'écrire ou bien de réaliser un film ?
Non plus.


Rachel Weisz et Hugh Jackman dans The Fountain
Quel genre de réalisateur est Darren Aronofsky ?
Le genre qui adore les acteurs. Qui les poussent à refaire encore et encore les prises jusqu'à les rendre fou en vue d'obtenir différentes approches de leur part, ce qui à mon sens est une bonne chose.

Est-ce différent d'être dirigé par son fiancé ?
Oui et non. Sur le plateau, nous avons rapidement noué une relation professionnelle où la communication était facilitée par la connaissance de l'autre. En même temps, ce fut une relation très différente de celle que nous entretenions jusque là dans notre vie privée quotidienne.

The Fountain peut-il être perçu comme une déclaration d'amour ?
Pas vraiment car Darren a rédigé le scénario avant de me rencontrer. Il a donc dû l'écrire avec une autre fille en tête (rires).

Croyez-vous à l'amour éternel ?
J'aime l'idée en temps que concept mythologique, notamment dans les contes de fée, mais j'ignore ce qu'un tel concept représente concrètement dans la réalité. Je crois que l'idée d'un amour éternel tient parfaitement sa place dans notre besoin quotidien de fantaisie.


Darren Aronofsky, Rachel Weisz et Hugh Jackman sur le tournage de The Fountain
Après Darren Aronofsky, vous allez prendre part au prochain long-métrage de Wong Kar-Wai qui est lui aussi un cinéaste au style très personnel. N'est-il pas un peu déstabilisant en tant que comédienne de parvenir à trouver sa place au sein d'univers si singulier ?
Bien au contraire, c'est une bénédiction pour moi. Le cinéma est avant tout un médium de cinéastes. Si vous avez la chance de travailler avec des réalisateurs talentueux, c'est formidable d'évoluer dans leurs visions du monde car leur approche est obligatoirement singulière.

Que pouvez-vous nous dire sur ce film de Wong Kar-Wai ?
Je ne peux vous en dire beaucoup car je n'ai eu l'occasion de lire que quelques pages du script. Le film s'intitule My blueberry nights et sera le premier tourné en anglais par Wong Kar-Wai. Norah Jones y tiendra le premier rôle, celui d'un personnage qui est le témoin de différentes histoires au cours de sa traversée des États-Unis. L'histoire qui me concerne prendra place à Memphis où je serais au centre d'une violente dispute dans un bar avec mon mari interprété par David Strathairn. Il s'agira donc à nouveau d'une tragique histoire d'amour mais alcoolique cette fois-ci, dans un style à la Tennessee Williams (rires).

À propos de vos projets d'avenir : où en est La Momie 3 ?
Aux dernières nouvelles je crois savoir qu'un scénario est prêt et que le tournage aura lieu l'été prochain si le film doit se faire. J'adorerais être de l'aventure si tel est le cas.

Vous avez déclarée que Hollywood était « toxique ». Comment faites-vous pour y travailler dans ce cas ?
Je n'ai pas le souvenir qu'avoir fait une telle déclaration. Hollywood fait de bons et de mauvais films. En ce moment, ils sont sans doute très mauvais. Mais les années 1970 y ont donné naissance à quelques uns des meilleurs films de toute l'histoire du cinéma. D'un autre côté, je n'y vis pas. C'est sans doute plus facile de cracher sur Hollywood lorsque l'on est européen. Je ne vois rien de mal à produire des longs-métrages dits « d'Entertainment ». Je suis d'ailleurs très fier de La Momie qui selon moi est une comédie B un peu débile.


Rachel Weisz et Brendan Fraser dans La Momie
Selon quels critères choisissez-vous vos projets ?
Le réalisateur. Si Darren m'avait proposé n'importe quel rôle, j'aurais dit « oui » sans hésiter. Idem pour Wong Kar-Wai ou Fernando Meirelles. À l'heure actuelle, je suis très porté sur les comédies mais très peu d'auteurs travaillent malheureusement dans ce domaine. Je suis donc en train de mettre sur pied deux projets dans ce registre, un à Londres et l'autre à New York, rien que moi (rires).

Pour quelles raisons ne vous propose-t-on pas de faire des comédies ?
Tout simplement parce qu'ils ignorent encore à quel point je peux être drôle, ce que je ne vais pas tarder à leur démontrer (rires). Mais aussi parce que la comédie est un genre très difficile. Tout est une question de timing, et puis il y a tellement de registres différents en la matière. J'aime beaucoup les comédies de Jim Brooks (James L. Brooks de son vrai nom, réalisateur de Pour le pire et pour le meilleur, Spanglish, NDR). Et puis le sens de la comédie est quelque chose d'inné : vous êtes naturellement drôle ou vous ne l'êtes pas. Je ne crois pas que l'on puisse apprendre à être drôle.

Y a-t-il des réalisateurs français avec lesquels vous aimeriez travailler ?
Oui. J'adorerais travailler avec Olivier Assayas, Arnaud Desplechin, et aussi, bien qu'ils soient originaires de Belgique et non de France, les frères Dardenne (Jean-Pierre et Luc, NDR).

Avec les frères Dardenne, ce ne serait pas de la comédie…
(Rires). Ça, c'est sûr.

Qu'est-ce qui vous plait chez eux ?
J'ignore si le terme est correct mais j'adore le côté hyperréaliste de leurs films. On dirait des documentaires filmés à l'aide de caméras cachées. Les histoires sont d'une simplicité inversement proportionnelle au drame épique humain qui frappe des gens ordinaires. C'est de la grande Tragédie classique avec un « T » majuscule.


Ralph Fiennes, Rachel Weisz et Fernando Meirelles sur le tournage de The Constant gardener
Prévoyez-vous de retourner sur les planches ?
Absolument. J'ai d'ailleurs une comédie sur scène en préparation en ce moment-même. J'adore le théâtre. C'est un excellent exercice pour vous maintenir en forme en tant que comédien. Et puis la performance live est également très intéressante car il n'y a personne pour crier « coupez » ou bien supprimer l'une de vos scènes au montage. Théâtre et cinéma divergent de ce point de vue, le premier est avant tout un médium d'acteurs, le second de réalisateurs.

Remporter un Golden Globes et un Oscar (pour son rôle dans The Constant Gardener, NDR) ont-ils changé vos orientations professionnelles ou bien les propositions qui vous sont faites ?
Les propositions s'en trouveront sans doute altérer mais pas mes choix personnels. Ma grossesse était déjà bien avancée lorsque j'ai remporté l'Oscar (la cérémonie a eut lieu le 5 mars 2006, NDR), puis j'ai accouché (le 31 mai 2006, NDR). Je vivais donc un peu à « Babyland » à cette époque et je commence seulement maintenant à découvrir les nouveaux scripts qui me sont proposés. Mais, ce genre de distinctions doit certainement aider, un peu. Tout du moins, je l'espère (rires).

Avez-vous un film culte ?
Définitivement Requiem for a dream, qui était déjà culte à mes yeux bien avant que je ne rencontre Darren, et qui l'est d'ailleurs pour beaucoup de gens. Ce film possède un style visuel à la fois viscéral, original et novateur qui a été pompé depuis par beaucoup d'autres. Si par culte, on entend un film que l'on veut revoir encore et encore, je citerais également Les Enfants du Paradis.

Propos recueillis par Stéphane Argentin.

  

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commentaires
Vedprkash
18/07/2015 à 22:40

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