Hank Steinberg (FBI : Portés disparus)

Stéphane Argentin | 19 septembre 2006
Stéphane Argentin | 19 septembre 2006

Son nom ne vous dit peut-être rien et pourtant, depuis quatre ans maintenant, vous êtes des millions aussi bien en France qu'à travers le monde à regarder la série dont il eut l'idée en 2002 : FBI : Portés disparus. Après quatre saisons dans les sommets de l'audimat (le show est dans le top 10 américain chaque année depuis sa création), Hank Steinberg a décidé de passer à autre chose avec cette fois une approche moins procédurière : The Nine, l'une des séries les plus attendues de la rentrée télé US 2006. Lors de sa venue au festival TV de Monte-Carlo en juillet dernier, nous avons pu évoquer ses deux « bébés » avec lui…

 

NB : Les questions de cet entretien à propos de FBI : Portés disparus contiennent des informations relatives à la quatrième saison de la série que certains préfèreront peut-être apprendre après avoir découvert les épisodes en question.

 

 

Commençons tout d'abord par évoquer FBI : Portés disparus. Pourriez-vous nous rappeler brièvement comment le projet a vu le jour ?
Le pitch que j'avais imaginé a retenu l'attention du studio de Jerry Bruckheimer qui m'a alors contacté. Il ne s'agissait pas d'un énième show policier basé sur un cadavre en ouverture et l'arrestation du coupable à la fin. Ce qui m'intéressait, c'était l'idée de découvrir la vie de ces personnes portées disparues au travers de l'enquête. Si le FBI s'occupe bel et bien d'affaires de ce genre, en revanche il ne dispose pas d'un tel département spécialisé à cet effet. Cependant, il dispose des moyens les plus conséquents pour traiter de telles affaires. La décision de situer l'action au sein du FBI fut donc secondaire et pragmatique. Les possibilités auraient été bien moins étendues si nous avions opté pour des policiers ou bien des détectives privés.

 


FBI : Portés disparus

 

Certaines histoires sont-elles inspirées de faits réels ?
À l'occasion oui. Mais nous tentons avant tout de puiser et d'explorer dans le quotidien qui nous entoure. À partir de là, nous imaginons alors de toutes pièces une histoire de personne portée disparue. Et je crois que c'est là l'une des raisons du succès de la série. Nous essayons de traiter des problèmes psychologiques, sociaux, politiques, culturels et émotionnels qui vont bien au-delà de la simple affaire de disparition. Il ne s'agit pas uniquement de retrouver la personne et le coupable.

 

Au cours de la saison passée, la quatrième, vous avez poursuivi le développement des différents personnages.
Je souhaitais le faire depuis les tous débuts de la série mais tout le monde n'était pas vraiment de cet avis. À présent que les shows dits « sérialisés » reviennent sur le devant de la scène, les exécutifs des studios sont plus ouverts à cette idée et tout le monde s'y retrouve : les spectateurs s'impliquent davantage dans les histoires qui sont elles-mêmes plus passionnantes à développer tandis que les comédiens trouvent eux aussi plus de matière à traiter.

 

Après trois saisons bien sombres, le personnage de Jack s'illumine enfin quelque peu.
Jack s'en était pris pas mal dans la tronche jusqu'à présent : son divorce, la mort de son père bien que ce décès soit plus un évènement cathartique pour lui. Faire évoluer la vie amoureuse de Jack tombait à point nommé et Anthony (LaPlagia qui interprète Jack Malone, NDR) était près à donner une nouvelle direction au personnage. Nous ne l'aurions pas fait si Anthony avait été retissant à cette idée.

 

Se débarrasser définitivement du père de Jack a dû être une décision difficile à prendre ?
Oui car le travail accompli par Martin Landau était excellent mais cet arc narratif commençait à tourner et rond et une fois encore, le moment était bien choisi pour en quelque sorte « libérer » Jack de cet autre élément douloureux de son passé.

 


FBI : Portés disparus

 

Y a-t-il un autre épisode dont vous soyez particulièrement fier au cours de cette quatrième saison ?
Oui, le tout dernier que j'ai écrit seul, A day in the life, et qui se déroule intégralement du point du vue du couple dont le fils a disparu. Le spectateur se retrouve ainsi à la place des parents et ressent toute leur anxiété et leur frustration et ne découvre que les renseignements que le FBI leur communiquent. C'est la seule fois où l'histoire ne se déroule pas du point de vue des agents et ce fut un travail très gratifiant à accomplir.

 

Continuerez-vous à superviser la cinquième saison en tant que show runner et producteur exécutif ?
Je conservais un statut de producteur exécutif et continuerais à y jeter un œil de temps à autres mais les véritables rênes de FBI : Portés disparus seront désormais entre les mains d'autres personnes qui sont à mes côtés sur la série depuis ses premières heures. J'ai cependant déjà eu l'occasion de m'entretenir avec les scénaristes et de lire les premiers scripts de la nouvelle saison, la cinquième. J'ai donc pu faire quelques remarques. Mais l'an prochain, toute mon attention sera focalisée sur ma nouvelle série, The Nine.

 

Ne craigniez-vous pas que le show s'égare sans vous ?
Non car une fois encore, les personnes qui vont désormais s'en occuper à ma place sont présentes depuis le début et partagent donc en grande partie la même approche que moi sur la série. Qui plus est, j'ai été très occupé au cours des six derniers mois avec la mise en place de The Nine et le tournage du pilote. C'est donc ces personnes qui se sont déjà chargées de tout pendant ce temps et elles s'en sont très bien tirées.

 

Parlons donc à présent de ce nouveau show, The Nine. Pourriez-vous nous rappeler brièvement de quoi il s'agit ?
C'est l'histoire de neuf personnes ne se connaissant pour la plupart ni d'Ève ni d'Adam qui, par une journée ordinaire, vont se retrouver prises en otages au cours d'un braquage de banque qui aurait dû être terminé en quelques minutes mais qui va finalement durer plus de deux jours. À chaque nouvel épisode, un flashback dévoilera un peu plus de ce qui s'est déroulé au cours du hold-up et les répercussions que celui-ci va entraîner sur ces neuf personnes : comment cet évènement va affecter leur vie, les liens qui vont désormais les unir les uns aux autres d'une manière qu'eux seuls sont à même de comprendre, qu'ils décident ou non d'accepter ces liens et les responsabilités qui en découlent. C'est un sujet particulièrement d'actualité qui traite du traumatisme et des répercussions après un évènement marquant. Comment réagiriez-vous si vous deviez réchapper à une attaque terroriste, un accident de train, une prise d'otages… ?

 


The Nine

 

À la fin de la saison, on saura donc tout ce qui s'est réellement passé dans la banque ?
C'est l'idée en effet. Vous connaîtrez tout ce qui s'est passé dans la banque, plus ou moins.

 

L'idée du flashback et des répercussions dans la vie des personnages fait immédiatement penser à Lost ?
En partie. Dans The Nine, l'élément déclencheur est le braquage de banque et les liens qui vont ensuite unir les différents personnages à partir de ce hold-up tandis que dans Lost, on assiste à des flashbacks individuels dans la vie de chacun une fois la tragédie survenue. FBI : Portés disparus, The Nine ou encore Lost n'ont pas inventé le flashback, le principe existe depuis bien longtemps (rires).

 

Où en est la série à l'heure actuelle ?
Le pilote est bouclé et le show a été retenu pour 12 épisodes. Le tournage débute dans trois semaines (cet entretien a eu lieu le 1er juillet 2006, NDR) et la diffusion en octobre (le 4 plus précisément, cf. le calendrier, NDR).

 

Qu'arrivera-t-il dans la deuxième saison : un autre cambriolage avec neuf autres personnes ?
Non, nous resterons avec les neuf personnes d'origine et nous continuerons à explorer l'évolution de leurs relations.

 

Finis les flashbacks alors ?
Rien n'est encore décidé à ce sujet. Nous pourrions éventuellement avoir des flashbacks de différents moments de leur vie. Nous verrons bien où tout cela nous emmène….

 

Pourquoi avoir choisi un braquage de banque pour traiter les répercussions d'un évènement aussi marquant ?
L'idée d'une attaque terroriste a été évoquée à un moment mais nous avons finalement estimé que le concept serait un peu trop radical, même si le public est désormais conscient que ce type d'évènement peut survenir. L'autre élément important est la notion de durée car il ne s'agit pas d'un braquage à la sauvette. L'idée consiste à découvrir les réactions des gens dans les cinq premières minutes puis au fil des heures, quelle part de leur personnalité va alors ressurgir.

 


The Nine

 

Pensez-vous que la recrudescence de tels shows dits sérialisés soit quelque chose de bénéfique ?
Dans l'ensemble, je dirais que c'est une bonne chose. Personnellement, en tant que scénariste, c'est ce qu'il y a de plus excitant à faire. L'univers des séries TV fonctionne par cycles et en ce moment, nous sommes dans un cycle qui privilégie les shows sérialisés. Mais je crois que la technologie est aussi pour quelque chose dans cet engouement. Auparavant, si vous manquiez un ou plusieurs épisodes, vous étiez perdus. À présent que les dispositifs d'enregistrement domestique sont si répandus, le problème ne se pose plus. Et puis les ventes de DVD contribuent également au come-back de tels shows. Mais quoiqu'il arrive, il existera toujours des séries procédurières et d'autres sérialisées.

 

Et si par malheur la série venait à être annulée, on ne connaîtrait jamais le fin mot de l'histoire. Avez-vous déjà prévu un plan de secours dans ce cas de figure ? Un double épisode final en vue de tout boucler ?
Lorsqu'une série est annulée, personne ne se soucie de connaître la fin. Mais Dieu m'en préserve, je n'envisage pas d'échouer avec The Nine.

 


Propos recueillis par Stéphane Argentin au cours du 46ème festival de télévision de Monte-Carlo en juillet 2006.
Autoportrait de Hank Steinberg.

 

Copyright : Les photos en-tête et en bas d'article (ci-dessus) ont été obtenues avec l'accord du festival de télévision de Monte-Carlo en vue d'être exploitées exclusivement dans le cadre du site Ecran Large. Toute autre utilisation en dehors de ce cadre est par conséquent formellement interdite.

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