James Ivory (Le Divorce)

Didier Verdurand | 30 janvier 2005
Didier Verdurand | 30 janvier 2005

Toujours pas remis d'une sale grippe attrapée au Festival de Venise, c'est un James Ivory en petite forme que nous avons retrouvé à Deauville, où un hommage lui a été rendu. Hommage mérité, avec de grands films à son actif tels que Chambre avec vue, Retour à Howards End et Les vestiges du jour pour ne citer qu'eux, et qui sont d'un niveau largement supérieur au Divorce. En attendant de se relever, James Ivory, entre deux crises de toux, a accepté de répondre à nos questions.

Ce n'est pas la première fois que vous tournez à Paris. Vous vous y sentez à l'aise ?
Oui, Paris est ma ville européenne préférée. Par rapport à mon dernier film tourné là-bas, La fille d'un soldat ne meurt jamais, l'équipe était plus grande, et le début du tournage fut très agréable. Cela s'est quelque peu gâté par la suite, car nous avions de nombreux doutes sur les lieux que nous devions choisir, notamment pour la scène de la Tour Eiffel. Ce n'était pas le choix initial, nous avions aussi pensé à un parc d'attraction, comme Euro Disney ou le Parc Astérix. Aussi étonnant qu'un touriste américain qui va à New-York sans voir la Statue de la Liberté ou l'Empire State Building, je n'avais jamais visité la Tour Eiffel avant !


Qu'est-ce qui vous attire tant à Paris ?
Je ne sais pas. Mon père, grand francophile qui s'y était battu pendant la Première Guerre Mondiale, adorait la culture française, donc j'y étais initié. Cela fait plus de 50 ans que j'y vais, la première fois j'avais 21 ans. Nous étions un groupe d'étudiants qui avions différents buts, et le mien était d'aller à l'IDHEC (ancien nom de la prestigieuse école de cinéma, la FEMIS, Ndlr.) étudier des films, mais bien entendu, il fallait parler français… La Guerre de Corée a commencé, et j'ai du rentrer aux Etats-Unis, sinon l'armée américaine m'aurait appelé. Je devais étudier pour échapper à la Corée. En tout cas, il était évident que je devais revenir pour tourner des films et Quartet fut le premier d'entre eux. Isabelle Adjani avait 25 ans, et elle était au sommet de sa beauté, elle a été remarquable. Puis ce fut Mr. et Mrs. Bridge avec Paul Newman, et depuis Jefferson à Paris tous mes films sont tournés à Paris ou dans sa province, à part La Coupe d'or.

Vous connaissez bien le cinéma français ?
Oui, je regarde pas mal de films français. Je connaissais Thierry Lhermitte mais je ne l'imaginais pas dans le rôle, c'est Fox Searchlight qui a eu l'idée de me le présenter, et j'ai en effet réalisé qu'il ferait l'affaire. En revanche, je ne connaissais pas Melvil Poupaud, c'est un ami anglais qui connaissait un membre de sa famille qui m'en a parlé.


Il arrive souvent dans les films américains tournés à Paris que le personnage masculin, un américain, tombe amoureux d'une française. Dans le Divorce, c'est le contraire. C'est également ce qui vous a attiré ?
Oui, mais je n'ai fait que suivre le roman de Diane Johnson qui a été un bestseller aux Etat-Unis. Ceci-dit, mon personnage préféré est celui de Naomi Watts, décidé à quitter son pays d'origine. Rapidement, elle devient convaincue qu'elle est devenue française tellement elle aime ce pays ! Celui de Kate Hudson était plus dur, plus intellectuel dans le livre.

Votre chef opérateur est français, il s'agit de Pierre Lhomme, césarisé pour Camille Claudel et Cyrano de Bergerac. Vous avez également une étroite collaboration avec Tony Pierce Roberts…
Leur manière de travailler est assez identique, ce qui me convient parfaitement. Ils sont d'humeur motivante et cherchent vraiment à me satisfaire, par tous les moyens. La seule différence notable serait peut-être au niveau de leur âge, car Pierre Lhomme a presque vingt ans de plus que Tony Pierce Roberts, donc son expérience est évidemment plus importante.


Votre relation avec Richard Robbins, votre compositeur, me fait penser à celle de John Williams et de Steven Spielberg !
Sans lui, ce ne serait pas un film avec le label Merchant Ivory ! Mais chaque film lui pose de nouveaux problèmes, la routine n'existe pas, il y a des scènes qui l'inspirent plus ou moins, il faut parfois que je défende avec insistance des idées qui me tiennent à cœur !

Kate Hudson a été votre premier choix ?
Non, le scénario est passé entre les mains de plusieurs actrices, mais le personnage ne leur était pas assez sympathique, il y a eu beaucoup de refus. Nous avons rencontré plus de 25 actrices en six mois ! Winona Ryder était à un moment intéressée, mais elle ne voulait le faire qu'à condition qu'on tourne le film à Los Angeles ! Quant à Glenn Close, nous nous connaissons depuis près de vingt ans, mais c'est notre premier film ensemble, j'étais ravi d'avoir enfin trouvé l'occasion de travailler avec elle.


Votre dernier succès date de dix ans, avec Les vestiges du jour. Cela vous affecte-t-il ?
Oui, c'est normal, je suis heureux quand beaucoup de gens vont voir mes films ! Je n'ai pas été non plus aidé par quelques distributeurs, dont la Warner.

Votre réputation et vos deux nominations à l'Oscar du Meilleur réalisateur vous permettent cependant d'avoir les stars que vous désirez ?
Ce n'est pas tout d'engager des stars, il faut qu'elles soient bien choisies par rapport au rôle ! Et certaines ne sont pas disponibles, car elles ne tiennent pas leur promesse, elles ne sont pas fiables, elles abusent de diverses drogues, et les financiers refusent de les engager.

Vous intéressez-vous à la sortie de vos films en DVD ?
Je travaille actuellement sur celui du Divorce, et je m'y applique. Il y aura des scènes coupées et des commentaires, des interviews…

Propos recueillis par Didier Verdurand en septembre 2003.

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