Le casting de Munich en interviews vidéo

Julien Foussereau | 25 janvier 2006
Julien Foussereau | 25 janvier 2006

Un peu plus de six mois après La Guerre des mondes, puissante adaptation du roman de H.G. Wells, Spielberg revient en force avec Munich. Cette sombre vengeance ciblée par Israël à l'encontre des commanditaires de la boucherie des Jeux Olympiques de 1972 n'a pas manqué de diviser la rédaction (les critiques ici). Une chose est sûre : que l'on soit pro ou anti, Munich n'est pas une œuvre simple et comme la promotion européenne du film était allouée à Hiam Abbas, Yvan Attal, Marie-Josée Croze et Eric Bana, on a demandé aux quatre comédiens de partager leur point de vue, ainsi que leurs souvenirs.

 

Interviews vidéo
(Cliquez sur les images correspondantes)
Éric Bana (7min01s) Hiam Abbas (8min34s)
Marie-Josée Croze (5min34s) Yvan Attal (6min49s)

 

 

Quelles circonstances vous ont amenés à faire partie du casting de Munich ?
Yvan Attal : J'ai été choisi par son metteur en scène…et ravi.
Hiam Abbas : Le hasard. Spielberg m'a vue dans La Fiancée syrienne et son agence de casting m'a appelée pour me proposer le rôle de Marie Claude Hamshari
Marie-Josée Croze : Steven Spielberg avait vu Les Invasions barbares. On s'est rencontrés, on a discuté et il m'a offert le rôle de Jeanette.

Pouvez-vous parler en quelques lignes de vos rôles ?
Yvan Attal : Je joue Tony qui n'appartient à aucun des deux camps (NDLR : les Israéliens et les Palestiniens). C'est un personnage assez cynique, qui ne pense qu'au pognon en réalité et qui vend des informations à qui veut bien les prendre pour des dollars.
Hiam Abbas : Je n'ai pas beaucoup de scènes. Marie Claude Hamshari était l'épouse de Mahmoud Hamshari que le Mossad avait décidé de tuer après l'attentat de Munich. Quand j'ai reçu le scénario, je n'avais absolument pas de mots à prononcer dans mes scènes. C'était juste une présence physique. Puis mon engagement dans le film en tant que coach et consultant ont amené Tony (Kushner, le scénariste) et Steven à modifier mes scènes. Ils m'ont offert des dialogues par besoin de donner la parole à la cause palestinienne à travers Marie Claude.
Marie-Josée Croze : C'est difficile de parler de Jeannette sans risquer de dévoiler trop l'intrigue. C'est une femme hollandaise qui ne travaille pour personne. Elle n'appartient à aucun groupement politique et elle rencontre Avner (interprété par Eric Bana) dans un bar. C'est un rôle qui va se révéler décisif dans l'intrigue.

Eric, Spielberg a presque choisi immédiatement Mathieu Kassovitz en raison de l'estime qu'il avait pour son travail en tant que réalisateur. Est ce que votre cas est comparable ?
Eric Bana : Oui, probablement. Je ne lui ai pas posé trop de questions sur les raisons de son choix parce que j'avais trop peur qu'il change d'avis. Je ne voulais pas trop le savoir en fait. J'ai eu beaucoup de chance d'avoir été choisi très tôt car ça m'a donné suffisamment de temps pour me préparer au rôle.

Le rôle d'Avner est assez complexe, quelle a été votre préparation en amont ?
Eric Bana : Cela a requis pas mal de travail. Pour être crédible dans la peau d'un Juif israélien, j'avais besoin de savoir parler avec un accent israélien. Et afin de pouvoir donner vie à Avner, j'ai du étudier beaucoup de choses sur la région, c'était très important à mes yeux. J'ai grandi en Australie et là-bas, on ne s'attarde pas beaucoup sur la politique du Moyen-Orient en cours d'histoire. Mais durant le tournage, cela tournait essentiellement autour de la compréhension d'Avner.

Hiam, le travail des accents c'était votre domaine…
Hiam Abbas : Oui mais pas seulement. C'était très intéressant de voir tous ces comédiens défiler. Une semaine après l'autre, j'avais différents groupes de comédiens qui arrivaient pour des scènes tout aussi différentes. Il a fallu les préparer parce qu'ils ne connaissaient pas le scénario, contrairement à moi qui avait toute l'histoire en tête. Je devais être prudente et savoir ce que je pouvais leur dire ou non. En même temps, il était important de les mettre un minimum dans l'histoire, de leur expliquer le sens de la scène, de savoir s'il y avait un accent à travailler : l'accent palestinien pour ceux qui ne parlaient pas l'arabe palestinien ou travailler un accent arabe dans l'anglais de certains, même chose pour les acteurs censés incarner des israéliens. En tant que consultante, je devais superviser l'authenticité des décors et des costumes : un décor de Beyrouth doit ressembler à Beyrouth, même chose pour Tel-Aviv, etc.

Quels sont vos souvenirs de tournage les plus mémorables ?
Yvan Attal : J'ai passé une semaine à Malte sur le tournage. On vous fait venir très tôt pour vous faire travailler la langue, pour faire les costumes, etc. Donc c'était plutôt agréable, malgré le fait de n'avoir qu'une scène dans le film, de pouvoir passer une semaine avec cette équipe et de voir Spielberg au travail.
Hiam Abbas : Une des parties les plus émouvantes du tournage, c'était les scènes de Munich elles-mêmes parce que la ressemblance physique des terroristes et des athlètes avec les comédiens censés les incarner, était énorme. Et recréer cet événement était un peu dur. C'était un peu…

…tendu ?
Hiam Abbas : Intense, plutôt. On vivait en groupe. Quand j'allais coacher les comédiens, je les trouvais souvent au bar de l'hôtel à boire ensemble et sortir ensemble. Et, une fois sur le plateau, il a fallu que chacun rentre dans son personnage et que l'un devienne l'ennemi de l'autre. Ce n'était pas simple mais je crois que l'effet fut positif parce que cela a apporté encore plus d'humanité qu'on aurait pu imaginer.
Eric Bana : Les scènes les plus difficiles sont souvent celles qui vous restent en mémoire. Pour ma part, deux scènes m'ont vraiment marqué : j'ai vraiment aimé ma dernière scène avec Geoffrey Rush à la toute fin et, un des moments les plus importants du film, le passage dans la cage d'escalier entre Avner et Ali le palestinien où nous parlons de la situation au Proche-Orient. Passage très intéressant, dur sur le plan émotionnel et très gratifiant.

Ce passage peut-il être considéré comme étant le message de Munich ?
Eric Bana : Oui. Je pense que le cœur de la question que soulève le film apparaît dans cette conversation et le discours plein de frustration d'Ali.
Marie-Josée Croze : J'ai trouvé que ce film était juste. Il n'est tombé dans aucun piège. Forcément les personnages que l'on suit sont israéliens et on a une sympathie pour eux. Mais il fait aussi parler les Palestiniens. Il leur fait dire des choses d'une telle justesse et d'une telle force que l'on se retrouve plongé dans le doute. Et il faut ce doute-là pour permettre à Munich d'exister… J'aime qu'il ne réponde à aucune question. J'aurais détesté trouver des réponses. La seule réponse est que la cruauté et la violence ne résolvent rien.

Hiam, vous avez réalisé deux courts-métrages. Qu'est ce que ça fait de voir Spielberg au travail ?
Hiam Abbas : C'est un stage de luxe ! C'était incroyable d'avoir ce privilège de le voir fabriquer ses scènes, de diriger ses comédiens, de savoir quelles sont ses exigences auprès de son équipe. Moi qui rêve de réaliser mon premier long, je ne peux pas rêver meilleur cadeau !

Quel genre de directeur d'acteur est Spielberg ? Dirigiste ? Ou ouvert aux suggestions ?
Yvan Attal : C'est les deux. Il a son idée du personnage mais les idées sont les bienvenues. Il avait prévu que Tony serait très bien rasé et propre. Je suis arrivé avec une barbe et je lui ai dit que j'aimais bien ça. Il était d'accord. C'est quelqu'un qui est très proche des acteurs et il jubile avec eux.
Eric Bana : Il alterne. Des fois, il peut être très précis sur le timing ou une idée et une autre fois, il te demandera de faire confiance à ton instinct.
Hiam Abbas : Pour Steven, un casting représente déjà 70% de son travail. Du coup, il s'appuie beaucoup sur le comédien. Mais attention, si le comédien ressemble beaucoup au personnage, il ne le dirigera pas beaucoup. Par contre, s'il y a un décalage, il va travailler davantage avec lui pour l'amener là où il veut. C'est quelqu'un qui partage beaucoup ses anecdotes de tournage. Il est vraiment très simple. Et c'est cette simplicité et cette complicité qui donnent envie de lui donner le meilleur de soi-même.

Yvan, un de vos plus grands rôles est celui d'Ariel Brenner dans Les Patriotes d'Eric Rochant. Pensez vous qu'il y ait un lien entre ce film et Munich ?
Yvan Attal : Evidemment ! C'est presque le même sujet. En dehors des événements historiques, c'est le même parcours de personnage. Celui d'un homme qui part avec un idéal fort pour servir son pays et qui, à la fin du film, n'en peut plus.

Ça ne vous pas un pincement au cœur de voir que Les Patriotes est un succès critique mais un échec commercial et qu'il n'a peut-être pas eu sa chance comme Munich qui met tous les atouts promotionnels de son côté ?
Yvan Attal : Non, pas dans ce sens-là. J'ai un pincement au cœur quand je pense aux Patriotes qui n'a pas été reçu assez bien à sa sortie, mais pas en le comparant avec d'autres films. Il n'y a pas si longtemps, il y a eu Tu marcheras sur l'eau qui est absolument génial mais qui est un petit film, au succès limité. On ne regrette pas des choses en rapport avec d'autres, c'est un film de Steven Spielberg, c'est un film américain… Moi, ce qui me fait de la peine, c'est qu'aujourd'hui tout le monde s'accorde à dire que Les Patriotes est un excellent film et, qu'à l'époque, on n'était pas capable de le voir. Et surtout il faut voir le mal que cela a fait à Eric Rochant. Il était très jeune et si on avait su reconnaître son travail, aujourd'hui, il ferait peut-être des choses un tout petit peu plus proches de ses envies.

Quel est votre film préféré de Spielberg (Munich est autorisé !) ?
Marie-Josée Croze : Rencontres du troisième type.
Yvan Attal : Je crois que c'est E.T.
Eric Bana : Munich (rires)… Quand j'ai grandi, j'adorais Rencontres du troisième type. J'étais aussi un fan des Dents de la mer étant gosse mais je pense que mon préféré reste quand même Duel.
Hiam Abbas : Spielberg !

Merci à Michèle Abitbol-Lasry, Séverine Lajarrige, et au Plaza-Athénée.

 

Pour aller plus loin...
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