Julien Hossein (Le Court des grands)

Laurent Pécha | 30 décembre 2005
Laurent Pécha | 30 décembre 2005

Parce que Le Court des grands , anthologie de courts-métrages de 12 prestigieux réalisateurs à leurs débuts (George Lucas, Ridley Scott, Paul Verhoeven,…) est une des sorties essentielles de cette fin d'année 2005, on a eu envie d'en savoir plus sur l'instigateur de cet ambitieux et essentiel projet. Cela tombait bien puisque l'homme en question, Julien Hossein, se demandait au même moment si on allait parler de « son » DVD. Entre la dinde et la bûche et nos divers retours sur l'année écoulée (top, flop,…), les joies du mail nous ont permis de comprendre comment Julien Hossein et son équipe sont parvenus à nous sortir cette édition indispensable dans toute bonne DVDthèque. Rencontre avec un jeune passionné persévérant.

Comment l'idée de compiler une telle anthologie de courts-métrages de cinéastes célèbres vous-est t'il venu ?
Il y a trois ans, avant d'arriver chez EuropaCorp, j'étais programmateur dans un festival sur Paris. Durant ce festival, J'avais diffusé environ 250 courts-métrages venant du monde entier dans différents programmes. Une de ces sections se nommait Les courts des Grands. Les festivaliers pouvaient voir un film d'école de François Ozon, de George Lucas, de Werner Herzog, de Jean-Pierre Jeunet... Vu l'intérêt pour ce programme, j'ai proposé à EuropaCorp d'en faire un DVD.

 


Comment s'est déroulée la sélection des cinéastes puis de leurs courts-métrages ?
Au début du projet, je ne savais vraiment pas par où commencer... Je voulais trouver les perles rares de réalisateurs que j'admirais tant par leur carrière que par leur univers. À mes yeux, il était important de présenter les premiers pas de cinéastes complètement différents au sein du DVD. Donc après les avoir listé, il fallait commencer les recherches sur leurs débuts et trouver les indices qui m'amèneraient à exhumer ces trésors enfouis. Cela m'a pris deux ans à essayer d'établir un contact avec les réalisateurs, de les convaincre du projet, de gagner leur confiance, de savoir quels courts étaient disponibles, si les films étaient intéressants et s'ils permettaient de découvrir et d'apprendre des choses nouvelles. C'était une phase très dure car ils étaient sur d'autres projets et pour la plupart ils n'avaient que très peu de temps disponible.

 

Avez-vous eu des refus, des regrets, des pistes que vous n'avez pas pu exploitées ? Quels cinéastes auriez vous aimé retrouver sur cette édition ?
J'ai eu la chance de pouvoir concrétiser mes choix. Je n'ai aucun regret, il est vrai que j'aurais voulu de tout mon cœur Amblin de Steven Spielberg et un court-métrage de David Lynch, mais cela n'a pas pu se faire faute de temps ou de droits déjà pris. Pour l'anecdote sur la piste qui n'a pas pu être exploitée, j'avais l'accord de Robert Zemeckis après huit mois pour pouvoir prendre A field of honor, son second court-métrage qui avait reçu le prix du meilleur film d'étudiant. Mais au dernier moment, on s'est rendu compte que la musique du court-métrage était celle de La Grande évasion et qu'il y avait cinq compositeurs au générique du long-métrage. J'ai dû laissé tomber et j'ai eu l'accord pour The Lift qui est tout aussi bon.

 

A Lizzard too much de Paul Verhoeven
Afin que l'on comprenne un peu mieux la somme de travail collossal que représente ce DVD, pourriez vous décrire sommairement la genèse de l'arrivée d'un des courts-métrages sur l'édition ainsi que tout ce qui tourne autour de lui (interview, analyse,...).

 

Après bien des recherches, la copie de A Lizzard too much de Paul Verhoeven se trouvait dans une cinémathèque d'Amsterdam. L'école qui avait produit le court-métrage avait fermé depuis bien longtemps. Paul Verhoeven ne savait pas lui-même où se trouvait la copie. Par rapport au côté technique, l'image et le son de l'œuvre étaient de très mauvaise qualité car la seule copie disponible datait des années 60. Nous avons donc fait une restauration, en gardant l'aspect vieilli du court-métrage. Par rapport au contenu, j'ai commencé à demander une photo (comme pour chaque réalisateur) de Mr Verhoeven quand il était jeune, qu'il m'a donné. Puis ensuite, je ne pouvais lancer les films comme ça sans aucun témoignage, c'est alors que j'ai essayé d'organiser une interview sur leur début. Après plusieurs mois d'attente, nous voilà parti à La Haye, où il nous a reçu longuement. Ce fut le regard du cinéaste sur ses débuts. Passionnant !
Pour l'anecdote, la rencontre la plus loufoque fut celle d'Emir Kusturica. J'ai harcelé tout le monde pour l'interviewer et je suis tombé finalement sur sa femme, qui m'a dit qu'il était dans le sud de la France en tournée avec son groupe. À ce moment là, je n'avais plus que quatre jours pour trouver un créneau. Après plusieurs coups de fil, j'ai réussi au dernier moment à avoir son accord et je le récupère à Lyon dans le TGV qui l'emmenait à Roissy. C'est donc à l'arrache, dans le train, avec un bébé à côté de nous, que nous avons fait une demi-heure d'interview.
Enfin, il fallait aussi montrer l'importance du court-métrage dans la carrière du réalisateur. C'est pour cela que j'ai fait appel à Cadrage.net, le premier site universitaire qui a fait les analyses. Grâce à tout cela je pense que rien ne nous échappe et on a une vraie continuité avec leur carrière.

D'ailleurs, si vous deviez sortir un court-métrage du lot, lequel choisiriez vous et pourquoi ?
J'adore le court métrage de Terry Gilliam, Storytime. Il est à la fois simple, déjanté et extravagant. Ce court-métrage d'animation fut un tremplin qui lui permit de passer au long-métrage avec les Monty Python. C'est un pur chef d'œuvre d'animation de neuf minutes, qui nous emporte dans les racines de son univers.

 

Storytime de Terry Gilliam

 

Propos recueillis par Laurent Pécha.
Photo de Hervé Remion.
Autoportrait par Julien Hossein.

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