Marion Cotillard (Big fish)
Avec seulement 4 scènes et 8 minutes de présence à l'écran dans Taxi 3, Marion Cotillard a pris un virage serré en 2003, pour s'affirmer avec un rôle pétillant dans Jeux d'enfants comme l'une des comédiennes françaises les plus talentueuses de sa génération. Elle commence l'année 2004 sous les meilleurs auspices en faisant partie de la prestigieuse distribution de Big Fish, le nouveau film de Tim Burton.
Racontez-nous comment vous avez obtenu le rôle de l'épouse de Billy Crudup dans Big Fish !
Tim Burton tient une bonne place parmi mes réalisateurs préférés. Mon
agent me dit un jour que j'allais le rencontrer une semaine plus tard.
Je vous laisse imaginer ma réaction
Je me rends donc au Ritz pour
discuter une demi-heure avec lui, et j'ai senti que quelque chose se
passait. Ceci-dit, j'en avais un tel désir que cela pouvait fausser la
réalité, je pouvais délirer ! À la fin du rendez-vous, il me dit qu'il
m'enverra le scénario. En sortant, j'en informe mon agent qui hurle de
joie, sachant que les autres comédiennes qu'il avait reçu n'avaient pas
eu cet honneur ! J'ai donc reçu des scènes pour effectuer des essais
vidéos, et trois semaines après avoir envoyé la cassette, j'avais une
réponse positive.
Comment se sont déroulés ces essais ?
J'avais choisi un ami bilingue pour les répliques, le lieu de tournage,
la façon de filmer et puis surtout comme j'avais pris les choses en
main, j'ai pu voir le résultat final et l'approuver. Au départ, je
voulais m'appliquer encore plus en faisant appel à un autre ami
technicien pour la lumière, mais le temps nous a fait défaut et,
pressée par mon agent qui disait que Tim s'impatientait, j'ai dû
utiliser ma caméra DV avec un éclairage naturel !
Si le scénario ne vous avait pas plu, vous seriez-vous quand même lancé dans l'aventure ?
Très honnêtement, je pense que oui. Mais peu importe, vu que le scénario m'a énormément plu !
Quel était votre film préféré de Tim Burton ?
Edward aux mains d'argent, mais j'ai aussi une affection particulière pour Beetlejuice car c'est le premier que j'ai vu.
Une fois sur le tournage, le plaisir a été à la hauteur de vos espérances ?
Je suis plutôt du genre à vivre dans l'instant présent, donc je ne
m'étais pas non plus fait trop de films dans ma tête quant au tournage.
Je n'ai pas envie de m'encombrer de ces projections. Sur place, j'ai pu
apprécié l'ambiance merveilleuse sans avoir de déceptions par rapport à
certaines attentes que j'aurais pu avoir.
Ressentez-vous un Rêve Hollywoodien chez les actrices françaises ?
Je ne crois pas. Je ne fais pas des films avec des pays mais avec des
gens, et il se trouve qu'aux États-Unis, il y a de nombreux
réalisateurs intéressants avec qui j'aimerais travailler. Je veux jouer
pour des réalisateurs espagnols ou japonais, peu importe le pays
d'origine.Le cinéma devient une telle industrie dans laquelle on fait
tellement tout et n'importe quoi qu'il est important pour moi de rester
fidèle à mes goûts. Je ne veux trahir personne.
Avec quels réalisateurs américains rêveriez-vous de travailler ?
Les Coen, Lynch, Scorsese, Paul Thomas Anderson, mais il y a aussi Julio Medem, Thomas Vinterbeg, Kitano
Vous vous voyez tourner une grosse machine commerciale pour vous retrouver dans un projet plus indépendant ?
Si je tourne dans Taxi 3, ce n'est pas pour faire d'autres films plus personnels ! Ce serait manquer de respect au public des Taxi et ceux qui y participent. Je suis dans cette franchise parce qu'elle me plaît.
Tim Burton a dit qu'il vous verrait bien incarner un rôle muet.
Louise Brooks est une référence en ce qui me concerne. Je l'adore. Loulou
de Pabst est un des films que je vénère. Je suis fasciné aussi par
Greta Garbo. Le cinéma muet me touche, donc j'apprécie particulièrement
ce compliment.
Comment étaient vos relations avec Billy Crudup ?
Comme tout le monde, il était ravi de se retrouver dans un film de Tim
Burton. Sur le plan personnel, nous nous sommes rapidement bien
entendus, portés sur la déconnade. Billy est un comédien généreux qui
s'investit vraiment dans un travail de recherche, sans pour autant se
prendre la tête. Ce rapport de générosité et de partage s'est vérifié
parmi tous ceux qui ont participé au film, des liens se sont créés. Je
reste en contact avec plusieurs membres de l'équipe, notamment le
chef-décorateur qui travaille aussi avec les frères Coen ! J'ai quitté
le tournage le 3 mars, dans un contexte de guerre et cela nous a aussi
rapproché car nous étions tous contre.
Toutes vos scènes sont à l'écran ?
J'ai tourné à peu près une vingtaine de jours répartis sur deux mois,
et deux scènes ont été coupées au montage, l'une avec Jessica Lange,
l'autre avec Albert Finney. J'avais le sentiment en les tournant
qu'elles ne seraient pas retenues, car elles n'apportaient rien aux
émotions qui se dégageaient des scènes précédentes.
Propos recueillis par Didier Verdurand en février 2004.