Cannes 2005 - Clôture devant la presse

Thomas Douineau | 23 mai 2005
Thomas Douineau | 23 mai 2005

Cérémonie de clôture devant la presse...

Dans la foulée de la remise de leur prix, les lauréats du 58e festival de Cannes sont venus rencontrer brièvement la presse.

Michael Haneke, Prix de la mise en scène pour Caché :
« Ce prix me renforce dans ma conviction qu'il ne faut pas que j'abandonne pour obtenir la Palme d'Or (Rires). C'est étrange car quand je termine un film, je repars déjà sur autre chose. Actuellement je suis en train de monter un opéra. Ce prix me semble assez important et représente beaucoup car il me permettra d'attirer beaucoup de spectateurs, mais peut-être pas autant que George Lucas…(Rires)

Hanna Laslo, Prix d'interprétation féminine pour Free zone d'Amos Gitaï :
« Je suis ravi d'avoir obtenu ce prix pour ce film à la fois drôle et pas drôle. Je crois qu'Amos, à travers mon personnage décalé et comique, a pu parler d'un sujet extrêmement difficile. »

L'acteur/réalisateur Tommy Lee Jones, Prix d'interprétation et son scénariste Guillermo Arriaga, Prix du scénario pour Trois enterrements :
Guillermo Arriaga : « Jeune, j'étais déjà venu à Cannes. J'avais dit à ma famille qu'un jour je monterai les marches non pas comme une star mais comme un écrivain. Comme un writer.»
Tommy Lee Jones : « Évidemment, je suis totalement surpris mais vous savez, je ne crois pas à la compétition, c'est un véritable honneur de recevoir un prix mais ce n'est pas la chose pour laquelle un comédien, un réalisateur ou un artiste doit se battre. Vous savez, ma récompense, je l'ai déjà obtenu il y a deux jours, lors de la projection du film devant des centaines de personne venus de tous les horizons qui se sont levés et ont applaudi le film pendant une dizaine de minutes. C'était ça ma récompense, c'est pour ça qu'un réalisateur doit se battre. C'est beau de voir autant de personne réunies au même moment. »

Jim Jarmush, Grand Prix du jury pour Broken flowers :
« Je ne crois pas non plus au concept de compétition, je ne crois d'ailleurs pas que le cinéma puisse être jugé par un groupe. Quand j'étais venu présenter en compétition Ghost dog en 1999, j'étais ravi que le jury donne la Palme d'Or à Rosetta. Mais c'est un immense honneur d'obtenir le Prix du jury, car le festival de Cannes n'a pas de nationalité, c'est une ouverture immense sur l'internationalité et c'est vraiment de cela dont je suis très fier grâce ce prix. J'aime le festival de Cannes, pas tant pour ma rencontre avec les journalistes, mais parce qu'il me permet de discuter avec mon public venu des quatre coins du monde. Mais comme je le disais tout à l'heure dans mon discours, je suis encore un étudiant, j'apprends de tous ces cinéastes qui viennent d'horizon différents présents ici. Je vais rester encore quelque jour pour voir le film de Hou Hsiao-Hsien… »

Les frères Dardenne, Palme d'Or pour L'Enfant :
Après avoir remporté la Palme pour Rosetta en 1999, les frères Dardennes entrent dans la légende au côté d'Emir Kusturica, Francis Ford Coppola et Billie August, tous lauréats de deux Palmes d'Or.
« On est un peu gêné d'être sans les comédiens parce que ce film c'est surtout eux. En fait, on était à Cannes lundi et mardi seulement... Lorsqu'on nous a demandé de revenir. On a essayé de revenir avec les comédiens.
Mais on pensait que c'était pour un prix et puis, peu à peu, quand on voyait qu'on donnait les autres prix à d'autres personnes, on a commencé à comprendre. Je sais ce qu'on va dire, que le festival de Cannes fait encore du social comme Rosetta, on nous colle bien trop rapidement une étiquette, un peu comme une rubrique dans les journeaux. Notre cinéma s'inspire avant tout du néo-réalisme. Quelle idée génial a eu Rossellini de filmer une fiction dans le décor bien réel d'un Berlin dévasté par la guerre (Allemagne année zéro. Ndlr !). Je crois que notre démarche de cinéastes est sensiblement la même : on réalise des fictions dans des décors on ne peut plus réel. »

Conférence de presse du jury

Pour la deuxième année dans l'histoire du festival de Cannes, le jury est venu expliquer à la presse les raisons de ses choix pour le palmarès. Emir Kusturica, Nandita Das, Salma Hayek, Toni Morrison, Agnès Varda, Javier Bardem, Fatih Akin, Benoît Jacquot, John Woo sont donc apparus dans une ambiance décontractée, visiblement fatigués par ces onze jours intenses de délibération et de visionnage, à moins que cela ne soit les réminiscences d'une soirée particulièrement bien arrosée.

À propos du jury
Emir Kusturica : « Je crois qu'on a réussi à former un jury juste. Chacun de nous venait de cultures différentes et avait une sensibilité différente. On a vu que des bons films et on a vraiment récompensé le meilleur. Je crois que nous avons accompli notre mission. Si l'on a pas retenu certains films, cela ne veut pas dire qu'ils sont mauvais. Ce festival fait naître quelque chose d'assez unique, de totalement international, il ne se contente pas de sélectionner certains pays ou certaines cultures. Tout le monde a le droit de s'exprimer. C'est un festival totalement ouvert qui tue toute l'uniformité de la production cinématographique pendant douze jours. Sans lui, je ne serais pas là. »
Agnès Varda : « C'est vrai qu'on a vraiment passé un très bon moment. Différences de cultures, différences de point de vue certes. La mission est accomplie et en plus maintenant on est tous devenu de bons amis. Et j'ai trouvé Kusturica plus démocratique que je ne le pensais. Je le qualifie même de doux dictateur (« sweat dictator »). (Rires)… Personnellement, j'aime particulièrement Caché et L'Enfant. Mais cela ne m'a pas empêché d'apprécier aussi Batailla en el cielo, c'est un film superbe. Comme la plupart de ceux qu'on a vu d'ailleurs.

À propos de la Palme d'Or
Emir Kusturica : « L'Enfant, c'est le vainqueur. Ce film regroupe tous les éléments qui forment notre conception du cinéma. »

À propos de Trois enterrements
Salma Hayek : « Évidemment le choix de Trois enterrements me renvoit à des expériences personnelles, à mes origines et me touchent peut-être donc plus que les autres. Les mexicains n'ont pas vraiment le choix, ils sont en train de mourir de faim, ils n'ont qu'un seul choix, celui de pouvoir passer la frontière. Mais je pense que ce film est universel et qu'il peut toucher tout le monde. Et à vrai dire, j'étais tout autant impressionnée par le script que par le sujet. »
Emir Kusturica : « Personnellement, je reconnais que mon univers très fantaisiste et aussi celui de Toni Morrisson sont très éloignés de celui du film de Tommy Lee Jones. Vous savez que j'ai grandi à Sarajevo et on était obligé de chanter mexicain si on voulait dire ce qu'on pense. J'aime la manière de filmer de Tommy Lee Jones. Et ce que j'apprécie (et je pense que tous les membres du jury sont aussi dans mon cas), c'est qu'il arrive à filmer un "no man's land movie" qui n'appartient à aucune culture et donc peut toucher tout le monde. Le problème de la frontière mexicaine, je ne le connais pas bien, mais j'aime la manière dont Tommy Lee Jones a réussi à m'y impliquer. »

Toni Morrisson : « C'est un film très profond. » (Sic ! Ndlr)
Salma Hayek : « Ce qui m'a touché particulièrement dans ce film c'est la relation qui unit le personnage de Tommy Lee Jones avec ce mexicain. Et puis le film se réclame de la tradition du western, où l'on tue avec des revolvers. Dans ce film, il n'y a qu'un seul mort et par accident. C'est un film anti-macho.

À propos du Prix d'interprétation pour Free zone :
Emir Kusturica : « Au départ, comme certains d'entre vous l'avait deviné, on avait l'intention de donner trois Prix d'interprétation ex-aequo. Mais j'en ai rediscuté avec tous les membres du jury et ils m'ont convaincu qu'en effet, c'était Hanna Laslo qui portait tout le film à elle seule. Mais là-dessus, je n'ai pas été assez dictatorial. (Rires)

Et les autres ?
Emir Kusturica : « History of violence, Manderlay, Don't come knocking sont vraiment des films excellents. Jarmusch, Lars von Trier, Cronenberg n'ont pas besoin de nous pour montrer leur film. L'année dernière, avec mon film La vie est un miracle, j'ai été éliminé très rapidement, et je le comprends. À Cannes, on cherche à découvrir absolument. »

Mr Blue

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