Julien Boisselier

Didier Verdurand | 29 janvier 2005
Didier Verdurand | 29 janvier 2005

Julien Boisselier, voilà un nom qui ne disait pas encore grand-chose il y a encore un an et qui maintenant éveille les esprits grâce à une année 2004 très remarquée. La sortie en DVD de Clara et moi était une excellente occasion pour le rencontrer et en savoir plus sur ce trentenaire aux multiples talents.

Vous êtes un ancien du Cours Florent ?
Oui mais c'est à l'école de la rue Blanche que j'ai le plus appris. Il y a eu un déclic grâce à un metteur en scène extraordinaire, Jean-Pierre Bouvier.

Vous avez beaucoup tourné pour la télé avant cet enchaînement cinématographique de 2004 !
C'est toujours simple de passer de la télévision au cinéma car il y a en général plus de jours de tournages pour le ciné. En fait, la transition était pour moi un luxe et une détente, car tourner un téléfilm de 90 minutes en 22 jours à raison de 5 séquences par jour n'est pas si facile... J'y ai aussi appris à tenir des rôles principaux, à porter une histoire, travailler un rôle sur du long terme.

 

 

Et cela vous a ouvert les portes du cinéma !
Oui, De gré ou de force de Fabrice Cazeneuve, sur des gens qui se faisaient virer d'une entreprise, a vraiment eu un impact. Il a été projeté dans des festivals, les gens du cinéma ne l'ont pas snobé et m'ont remarqué.

Vous êtes une des révélations masculines de 2004 avec quatre films sortis en l'espace de six mois !
Ces films ont été tournés dans le même ordre de sortie, donc commençons par Le Convoyeur. Je devais déjà travailler avec Nicolas Boukhrief sur un projet qui avait capoté. On s'était bien entendu et cela lui a donné envie d'écrire le rôle de la Belette en pensant à moi, et il pensait que même s'il n'était pas central, je serais amusé de l'interpréter car ça changeait de ce qu'on me proposait habituellement.

Une scène dans le fourgon montre Dupontel et Berléand utilisant un fusil à pompes comme pipe à hash… Vous n'y touchez pas mais hors caméra, vous avez essayé ?
J'ai testé pas mal de choses avec ces substances mais je n'ai jamais fumé dans un fusil à pompes. Ce n'était même pas du tabac, mais des NTB, les cigarettes de plantes sans nicotine, c'est dégueulasse ! En revanche, à la fin du tournage, le décorateur, qui me roulait mes pétards pour le film, en avait fait un réellement dosé, à ma demande. (Grand sourire.)

 

 

Quand on voit le making of du Convoyeur, on se dit que l'ambiance sur le tournage n'était pas à la rigolade et collait bien au sujet !
Dupontel ne voulait pas répéter pour s'imprégner encore plus du personnage qui ne connaissait personne, donc les trois premières semaines, nous répétions sans lui et il arrivait pour jouer sa scène. Il a commencé à se détendre vers la fin… Il aborde ce métier à sa manière et je respecte totalement car le plus important est le résultat. Nicolas Boukhrief a un rythme de travail assez impressionnant, il est très speed et concerne tout le monde, du dernier stagiaire au chef-opérateur et son premier rôle. Le tournage a été très agréable malgré l'ambiance particulière, un peu « Actors Studio » qui régnait dans ce parking désaffecté reconstruit en centre fort. On était en sous-sol et on ne voyait pas le jour de la journée… J'ai dû faire une seule journée en extérieur.

Arrive Clara et moi.
J'avais refusé le rôle d'Antoine deux ans auparavant. J'avais discuté à l'époque avec Arnaud Viard à qui j'ai fait part de mon opinion sur le scénario dans lequel se trouvaient quelques failles. Deux ans après, il est revenu à la charge, même après avoir rencontré d'autres acteurs, me disant qu'il m'avait toujours en tête. On s'est revu pour un café, et je l'ai trouvé aussi touchant. Il a un univers, une façon bien à lui de regarder les gens, de les écouter et de leur sourire. Après, j'ai fait des essais avec Julie Gayet dans le bureau de la production, et Arnaud s'est déchaîné après un essai en disant qu'il était certain que ça marchait entre elle et moi, etc. Devant cet enthousiasme, nous étions ravis de nous lancer dans l'aventure.

 

 

Vous avez testé en vrai la scène de drague dans le métro ?
Non, je suis trop timide ! Bien fait, hein ? C'est du cinéma ! Il y a eu peu de prises. J'aime beaucoup le début, le premier quart d'heure est très efficace pour entraîner le spectateur. Et cette scène dans le métro a marqué beaucoup de gens. Elle était bien écrite dans le timing, au niveau des regards…

J'me sens pas belle est le plus drôle de vos quatre films de 2004 (le quatrième étant Tout le plaisir est pour moi).
Ce sont les producteurs qui ont soufflé mon nom à Bernard Jeanjean, le réalisateur. Marina Foïs était déjà choisie. Je lis le scénario, j'appelle aussitôt Bernard et après notre rencontre, je suis rentré chez moi et j'ai dit à ma copine : « Je crois avoir rencontré quelqu'un de très important dans ma vie. » On s'est tout de suite compris. Au bout du compte, J'me sens pas belle est le film le plus rentable de 2004. (Le budget avoisine 1,3 millions d'euros, Ndlr)

 

 

Vos points communs avec ces trois personnages ?
Il y a un peu de moi dans tout ça. Je suis assez sensible mais j'aime aussi fumer des pétards en écoutant de la techno, et comme dans Clara et moi, je suis aussi dans un rapport de séduction avec les gens. C'est notre métier d'offrir des vraies facettes de notre personnalité. J'essaie de composer de plus en plus. J'irais plus du côté des Dustin Hoffman, Jean-Louis Trintignant, Michel Bouquet, ou encore Michel Serrault capables d'interpréter toute sorte de personnages, que vers les natures comme Gabin. J'ai aussi une admiration sans bornes pour Patrick Dewaere. Il y a des pôles d'inspiration selon les périodes et les rôles. En ce moment, je répète une pièce et me suis focalisé sur Isabelle Huppert car je joue quelqu'un de très cérébral.

Cinéphile ?
Je vais souvent au cinéma et regarde beaucoup de DVD, j'ai un grand écran chez moi et je visionne quasiment un film tous les jours, de styles totalement différents.

Prochain rôle au cinéma ?
Je vais tourner avec Ivan Calbérac, qui avait réalisé Irène. Ca sera une comédie musicale avec une intrigue à la Woody Allen derrière. Mélanie Doutey sera à mes côtés. On m'a proposé une tonne de rôles de séducteurs et je réponds que j'aurais l'impression de me répéter et que le résultat ne risque d'être bon pour personne.

 

 

Votre favori pour le César du meilleur acteur ?
Benoît Poelvoorde. J'ai travaillé avec lui sur Les portes de la gloire et pour moi, Benoît est un génie, nous n'avons pas vu le quart de ce qu'il sait faire. Il peut tout jouer ou improviser, son registre est immense. Quand il entend « Action », ça y est, la Ferrari est partie. Sa capacité de concentration et d'énergie sur un plateau est hallucinante. Il est l'un des plus grands acteurs du moment en France, et dans le monde aussi, d'ailleurs ! Je ne serais pas étonné qu'un jour, il soit dirigé par Tarantino. Podium n'est pas à sa hauteur mais je lui filerais quand même le César !

Propos recueillis par Didier Verdurand.
Photo de Côme Bardon , devant une œoeuvre du peintre Ed Paschke.

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