La Momie : Tom Cruise est-il la véritable momie du film ?

Sophie Sthul | 13 juin 2017 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Sophie Sthul | 13 juin 2017 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Étrange démarrage que celui de La Momie, dépecée par la critique internationale, bide aux USA, mais bien parti pour s’imposer comme un véritable succès dans plusieurs territoires. Mais pourquoi un début si chaotique pour le Dark Universe, censé renouer avec les légendaires Universal Monsters, chers au cinéphile et au studio qui en détient les droits ? Et si Tom Cruise était la véritable momie de son propre film ?

 

LA CRUISIERE S’AMUSE

Il fut un acteur perfectionniste à l’extrême, dont la plasticité (Magnolia) étonna autant que la capacité à se transformer radicalement (Né un 4 juillet), aussi à l’aise dans le drame (Eyes Wide Shut) que dans l’exercice alerte du pur bombardement charismatique (Top Gun). Mais depuis une dizaine d’années, si l’artiste demeure un des seigneurs du 7ème art, quelque chose semble avoir profondément changé chez l’acteur.

 

Photo  Tom Cruise

Tom Cruise dans La Momie

Photo Jack Reacher

Tom Cruise dans Jack Reacher

 

Un indice, en apparence anodin, semble profondément révélateur. À la notable exception de Rock Forever, l’apparence de Tom Cruise est demeurée quasiment inchangée depuis la comédie Night and Day en 2010. Comme si le concept Cruise était définitivement passé devant les personnages, qu’il n’a même plus besoin d’incarner, puisqu’il les métamorphose tous en happening de relations publiques, en allégorie de sa toute puissance. A l'occasion de la sortie de Jack Reacher : Never Go Gack, un dossier spécial avait d'ailleurs été consacré à cette tendance mégalomaniaque, qui donne une couleur toute particulière à sa filmographie.

En témoigne ici la nonchalance avec laquelle l’acteur se glisse dans la peau de Nick Morton. Peu importe que le héros de La Momie ait de toute évidence été écrit pour un comédien de 30 ans de moins que lui, et affiche une forme de décontraction finalement très éloignée des personnages qu’il interprète habituellement. Cruise ne se fatigue même pas à s’approprier les répliques ringardos balancées par Morton, quand son adversaire en bandelettes l’assaille ou quand Annabelle Wallis est introduite dans le récit.

 

Photo Tom Cruise

Tom Cruise dans Jack Reacher 2

Photo Tom Cruise, Edge of Tomorrow

Tom Cruise Mission of Tomorrow Never Go Impossible

 

Non, comme dans Jack Reacher, Oblivion, ou encore Edge of Tomorrow, la star s’empare d’un rôle sur le papier aux antipodes de son image, et parasite cette dernière plutôt que de s’y conformer. Un bonheur pour les fans de l’artiste, mais une proposition aussi amère que vaine pour ceux qui ne guettent pas le moindre de ses films avec excitation.

 

 

NO MORE AMERICAN HEROE

Tom Cruise est indiscutablement une super star. En témoigne le démarrage de La Momie dans plusieurs dizaines de territoires, qui amoncèle plus de 110 millions de dollars en quelques heures. Rien qu’en Chine, le métrage a amassé 52 millions de dollars dès sa sortie, preuve que l’acteur demeure un investissement certain. À l’international.

 

Affiche

Tom Cruise, sauveur du monde depuis 1892

 

En effet, et ce malgré une disette médiatique doublée d’une série d’apparitions (Tonnerre sous les tropiques) visant à dédramatiser son légendaire partage en cacahouètes, le grand Tom ne fait plus automatiquement recette sur le territoire américain.

C'est particulièrement évident sur des films comme Oblivion, qui a encaissé à peine 90 millions aux Etats-Unis contre près de 200 dans le reste du monde. Même tendance pour Edge of Tomorrow : une centaine aux USA, 270 dans le monde.

Les raisons sont multiples, et on ne se risquera pas à en pointer une unique. L’origine de cet apparent désamour se situe probablement dans la volonté d’exister au sein de plusieurs franchises (Jack Reacher, Edge of Tomorrow, Mission : Impossible, le Dark Universe, Top Gun : des films qui ont été et seront dans son actualité) qui donnent le sentiment d’être hantées par un héros interchangeable plus que portées par une superstar fédératrice. Ainsi, toutes ces « marques » perdent en spécificité, tandis que Cruise devient lui-même moins instantanément identifiable alors qu’il dilue un peu son identité dans chacune d’elles.

 

tom cruise annabelle wallis

L'habituelle cascade aérienne

 

De même, l’acteur donne l’impression d’importer dans toutes ces productions une mécanique concoctée spécialement pour lui, à base de cascades hyper-exigeantes et de légèreté faussement badass. À la réflexion, personne n’a été surpris de le voir gesticuler mitraillette à la main dans le premier trailer de La Momie, pas plus qu’on ne s’est émus de le voir (encore) s’agiter en l’air à l’occasion d’un crash d’avion. Toutes ses participations à des blockbusters mutent pour devenir des échos plus ou moins lointain de Mission : Impossible, sa super franchise à la popularité très solide (694 millions au box-office pour Protocole fantôme, 682 pour Rogue Nation : meilleurs scores de la saga).

 

Photo Tom Cruise

 Tom Cruise : le syndrome Ethan Hunt, héros de Mission : Impossible

 

WORLD WIDE TOM

Ce n’est pas parce que le site IndieWire (et bien d’autres) ont émis l’hypothèse que La Momie était « le pire Tom Cruise de tous les temps », que le reste du monde partage cette opinion. On évoquait plus haut le très bon démarrage du blockbuster à l’international, mais en réalité, il ne s’agit pas simplement de chiffres et de bilan comptable.

 

Tom Cruise teaser

Et si ce sarcophage était celui de l'acteur ?

 

À bien des égards, Tom Cruise est le seul (peut-être le premier) acteur « virtuel ». Techniquement une star américaine, capable de provoquer la mise en chantier d’une super-production sur son seul nom, l’artiste n’est plus tout à fait un acteur « américain », puisque ce territoire paraît ne plus tant se pâmer devant ses performances.

Plus qu’un acteur Hollywoodien, Cruise est devenu le monstre qu’il ambitionnait d’incarner, celui qu’il devient lors du dernier acte de La Momie. Pas un pantin du système : une idée d’Hollywood et un pur concept, plus qu’une mode ou un produit daté. Sa volonté d’incarner des héros trop jeunes pour lui, de les accoupler avec des héroïnes interchangeables dont il pourrait être le père, son goût pour des séquences d’action où n’existe plus que son corps performatif, cette abstraction devenue immortelle adrénaline : tout cela concourt à générer un monstre, dont les incarnations filmiques sont de moins en moins stimulantes, mais le devenir légendaire sacrément intrigant.

C’est donc à un procédé inédit que se livre La Momie, dont le héros apparaît dans l’ombre ou visage masqué dans la dernière partie du métrage. Ce qui se cache dans les ténèbres où Cruise achève une énième mue est un mystère de plus que les archéologues du futur se chargeront de déterrer.

 

 

Photo Tom Cruise

Courir. Oui, mais jusqu'où ?

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commentaires
sandman
17/06/2017 à 18:32

oui ^^ mais peut importe le film est a chier et les persos tout autant donc .... peu importe

Cervo
14/06/2017 à 13:56

@sylvinception

Toi aussi deviens lecteur EL et prouve que tu ne sais pas faire la différence entre des fautes et des figures de style.

sylvinception
14/06/2017 à 12:50

"l’exercice alerte du pur bombardement charismatique"
"les répliques rindardos"
"mais une aussi amère que vaine"
"visant à dédramatiser son légendaire partage en cacahouètes"

Toi aussi, devient pigiste pour EL, même si t'as trop bu.

Kolby
14/06/2017 à 12:31

Juste du business et faire entrer du pognon au maxi. Plus rien à prouve ce tom cruiser... Si rester dans ce univers de ses saga perso permettent de se faire un pactole dans le monde pourquoi pas continuer?
A mon avis le fait de le voir trop souvent dans un même genre de film nous fait bizarre des qu'il change de registre, sinon son jeu d'acteur est aussi excellent que discutable

Snake SD Plissken
14/06/2017 à 11:18

La conclusion sonne très juste, Cruise est davantage considéré comme une sorte de moteur, une force identifiée (sa filmographie parle pour lui, son implication également) plutôt qu"une personnalité, un acteur que l'on apprécie pour son jeu en l’occurrence. Sa persona hors norme l'a souvent conduit à se dépasser et à toujours repousser les limites, à surprendre encore et encore avec des projets couillus jus qu’il y a encore quelques années (l'excellente surprise Edge of Tomorrow à l'antithèse de son autre projet de s-f plus minimaliste qu'est Oblivion, le revival hard boiled de Jack Reacher) sans oublié le très récent M:I Rogue Nation qui prouvait à juste titre qu'une franchise peu proposer autre chose que du réchauffé (cette séquence à l'opéra, la poursuite en moto,...) Mais car il y a un Mais, cette tendance semble s’essouffler depuis deux films.

Jack Reacher 2 est un pétard mouillé indigne de la fraîcheur du premier et cette Momie est un mauvais divertissement qui ferait passer le film de Stephen Sommers pour Les Aventuriers de l'Arche perdue. Il semble donc que la qualité, pourtant encore à l'oeuvre ces dernières années, n'arrive même plus à captiver au delà de la vitrine d'ego trip que lui fournit le cinéma.

raff8
14/06/2017 à 09:37

c'est vrai que Tom Cruise est plus devenu une marque qu'autre chose, et son non changement d'apparence entre chaque film est la preuve qu'il ne joue plus vraiment, il est Tom Cruise de film en film, toujours imbattable, toujours bien coiffé...
Ses succès passés lui ont permis d'imposer son statut aux studios et de phagocyter les films qui finissent par tourner autour de lui mais le public finit par se lasser
D'autant qu'avec le bon réalisateur qui arrive à la cadrer il montre qu'il est un très bon comédien comme dans Collatéral par exemple .
Il va falloir qu'il s'en rende compte avant de finir comme Delon!

Thierry
14/06/2017 à 08:16

Tom Cruise est ainsi et aussi devenu une marque et un acteur virtuel, une sorte d'avatar. Je pense à Simone (ou plutôt S1mone, pour Simulation One), cet excellent film d'Andrew Niccol avec Al Pacino. :))

Prometheus56
14/06/2017 à 05:16

J'adorais Cruise dont certains films sont emblématiques d'une certaine époque. Mais depuis la guerre des mondes c'est tjrs pareil. Non content de surenchérir a chaque Mission Impossible, voila qu'il se place dans un nouveau système de franchise c'est affligeant. Mais faut bien payer la pension alimentaire de sa fille....

Marty
14/06/2017 à 04:44

Il est 4h44 , je ne dors pas ... et je viens de m'exploser de rire rien qu'en lisant le titre de votre article ... merci X'D

Dirty Harry
14/06/2017 à 02:22

La fin de l'histoire est que Tom Cruise gagne à la fin de l'histoire ! C'est une mauvaise passe, une suite de trucs qu'il enchaine sans grand importance mais il reviendra : et avec un projet/réal/oeuvre qui bluffera tout le monde ! Certes en tant que cinéphile je n'ai qu'une envie : le retrouver dans un role de méchant style Collateral (dans lequel son coté froid et calculateur était merveilleusement bien mis en valeur par Mann) mais le fait qu'il vampirise un projet de Universe (La Momie) montre au contraire l'énorme pouvoir qu'il possède encore...

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