House of cards : 10 raisons d'aimer ou de détester

Simon Riaux | 11 février 2014
Simon Riaux | 11 février 2014

Tout juste un an après la diffusion de son premier épisode, House of Cards n'a pas fini de sidérer son monde. Issue de la première génération de productions initiées par l'ogre Netflix (aux côtés de la très estimable Orange is the new black), cette odyssée politique retint tout d'abord l'attention grâce au parrainage prestigieux de David Fincher, invité à réaliser le pilote du show et à l'imprégner de son style techno-dépressif. Toutefois, House of cards devait rapidement dépasser son statut d'évènement ponctuel pour se tailler à une vitesse sidérante une place de choix dans le panthéon des séries américaines capables de tailler des croupières au Septième Art. Alors que s'ouvre sa très attendue deuxième saison, voici l'heure de passer en revue les points forts et faibles de cette œuvre à l'ambition dévorante.

 


Bien : Ça parle de politique !

Il y avait Boss, lancée par Gus Van Sant et quelques autres shows prêts à ausculter les vicissitudes des politicards, mais aucun n'avait osé mettre à ce point les mains dans le cambouis de la démocratie, pas même l'excellent Borgen. Sans noirceur artificielle ni simplification malvenue, le scénario nous propulse au cœur de l'état et nous donne à voir comment un homme de pouvoir peut, à force d'intelligence et de manipulations, détourner le système de son but premier.


Pas bien : Ça (ne) parle (que) de politique !

À trop vouloir nous immerger dans la réalité et le quotidien d'un dirigeant de la majorité démocrate, le script prend parfois le risque de nous balader de scènes abstraites en discussions interminables. À fortiori pour nous autres français, l'intrigue peut parfois manquer de chair, de motivations humaines tangibles, tandis que certaines subtilités échapperont forcément à ceux qui ne se sont jamais penchés sur le système politique américain.


Bien : Kevin Spacey est de retour !

Ces dernières années, il y avait presque de quoi oublier l'immense talent de Kevin. Entre Les Chèvres du Pentagone, Las Vegas 21 ou encore Casino Jack, on ne peut pas dire que le comédien nous ait offert de prestation inoubliable. Et comme pour beaucoup d'autres avant lui, l'eldorado télévisuel est arrivé à point nommé, puisque House of cards constitue sans doute la meilleure opportunité jamais donnée à Spacey en dehors du théâtre. Veule, sadique, manipulateur, brillant et joueur, son personnage est un régal de composition, une partition subtile et puissante qui n'en finit pas de nous impressionner et que l'artiste décline à merveille.


Pas bien : où sont les autres ?

Pour éviter toute mauvaise foi, il faut reconnaître que Robin Wright tire admirablement son épingle du jeu. Toujours est-il que son rôle n'est pas des plus étoffés, quand celui de ses petits camarades est souvent réduit à une part congrue. Même l'électrique Kate Mara dispose finalement de bien peu de temps de présence, quand son rôle est pourtant l'un des plus influents sur les différents arcs narratifs. De même, il fallut attendre la conclusion de la première saison pour découvrir un antagoniste à la mesure de notre anti-héros. Une découverte trop tardive pour pleinement convaincre.


Bien : La vache c'est beau !

Avec David Fincher pour donner le la, il fallait s'y attendre : la série est somptueuse. Photographie clinique et profonde, couleurs anthracites et piqué glaçant, absolue netteté de l'image, bienvenue dans l'univers polaire et luxueux des animaux politiques. L'ensemble de la première saison s'est révélé d'un aboutissement esthétique rare, qui permet souvent aux très longues séquences dialoguées de passer comme une lettre à la poste, la mise en scène s'avérant souvent d'un éclat aussi discret que ravageur. Le spectateur se souviendra ainsi longtemps de l'image de Kate Mara se débarrassant de ses talons aiguilles face à Kevin Spacey, dans une séquence en apparence classique, mais où la mise en scène révèle au détour d'un plan cruel la hiérarchie entre les personnages.


Pas bien : La vache c'est froid !

Étant donné que l'on comprend très vite et grâce à l'image que nous pénétrons dans le terrain de chasse de créatures à sang froid prêtes à toutes les compromissions pour parvenir au pouvoir, la série peut vite sembler répétitive. Plans fixes, visages de trois quart, teintes bleutées, lents traveling, découpage ultra-travaillé, on a vite fait le tour de ce dispositif implacable mais systématique. Pour l'instant, c'est du tout bon, mais il deviendra vite indispensable de renouveler un peu cette esthétique, qui finira par lasser.


Bien : Qu'il est fort ce Frank !

Frank Underwood est donc notre ténébreux héros, prêt à tout pour faire sombrer le Président qui l'a trahit. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'en plus d'être riche, génial et influent, ce sacripant jouit d'une bonne étoile diabolique. Suivre les fourches caudines empruntées par M. Underwood, c'est se sentir aussi doué et puissant que lui, c'est se sentir également intelligent, capable de décoder un univers complexe et dangereux. Votre maman vous a toujours dit que vous auriez dû faire de la politique ? Elle a bien raison, puisque vous comprenez parfaitement House of Cards !


Pas bien : Pourquoi tous les autres sont-ils si nuls ?

S'il est délectable de voir le personnage principal mettre sur pied un complot aussi intelligent qu'ambitieux, après une dizaine d'épisodes, on a bien du mal à comprendre comment il a pu atteindre aussi rapidement l'un de ses objectifs principaux. Pourquoi personne ne comprend-t-il jamais rien aux manœuvres du terrible Franck ? Comment fait-il pour toujours les faire plier ? Cela va tout de même un peu vite en besogne... Sans compter que pour structurer le show et nous y intéresser, les scénaristes vont devoir rapidement lui trouver un adversaire durable et à sa mesure. On espère que Gerald McRaney tiendra ce rôle, relativement proche de la figure de nabab pervers qu'il sut tenir dans la tétanisante troisième saison de Deadwood.


Bien : Qu'ils sont méchants ces politiciens

À l'heure où la politique s'est définitivement muée en métier et ses professionnels en caste inamovible, voir ce petit monde représenté comme un gang de manipulateurs a quelque chose de profondément jouissif. House of cards ne se cache jamais derrière son petit doigt et aborde frontalement les questions de détournement du pouvoir, de destruction du bien public et n'a pas peur de décrire les hommes politiques comme autant de criminels prêts à tout. « Democracy ? So overrated ! »


Pas bien : Sont vraiment trop méchants ces politiciens

Ne pas craindre de dire les vérités qui font mal, voilà une bonne chose. Pour autant, fallait-il pousser le personnage principal jusqu'aux terribles actes commis en fin de première saison ? Quelque soit le degré d'amoralité de Frank Underwood, ses dernières actions sont un choc autant qu'une sacrée couleuvre à avaler. Car le spectateur a un peu de mal à croire qu'un homme de sa stature ne délègue pas certaines besognes aux conséquences dramatiques. En ce début de saison 2, Frank Underwood a de terribles agissements sur la conscience, que le scénario ne pourra rendre crédible qu'en évitant de nous resservir des rebondissements du même accabit, certes spectaculaires, mais un tantinet too much.

 

  

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