FEFFS 2013 : Stras Bourre

Simon Riaux | 15 septembre 2013
Simon Riaux | 15 septembre 2013

« Le Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg, c'est un endroit magique », tels furent les derniers mots prononcés par Tonton BDM à votre serviteur, juste avant que les médecins ne jugent plus prudent de le plonger dans un coma artificiel. Victime d'une brusque rupture du corps caverneux, le héraut du bon goût germanopratin voyait son escapade au pays de la choucroute définitivement compromise. Toujours prêt à secourir un proche en pleine détresse, surtout si cela s'avère l'occasion de découvrir un festival de cinéma de genre à la chouette réputation, l'auteur de ces lignes ne se fit pas prier pour ramener ses fesses jusqu'à Strasbourg. Direction le FEFFS.

 

Quelques minutes de TGV, une saucisse à la moutarde et une bière plus tard, le temps était venu de découvrir le village fantastique, haut lieu de rassemblement pour festivaliers, goreux, bisseux, spectateurs et autres geeks de tout poil. Entre un stand particulièrement bien fourni en goodies de première classe, un autre consacré à de très belles affiches de collection, un vaste espace dédié à la consommation frénétique d'alcool, tartes flambées et autres hot dogs, il y en a pour tout le monde. Littéralement. La délégation de la Team EL ne put toutefois s'empêcher de remarquer l'usage répandu d'une sentence particulière, un quasi-mantra répété ad nauseam par de jeunes femmes, arborant toutes un joli nourrisson sous le bras : « TapavuTonTon ? Hein dis, TapavuTonTon ? » Nos compétences en ethno-sociologie étant ce qu'elles sont, nous décidâmes de ne pas nous immiscer tout de suite dans la population, et de profiter du film et du cocktail d'ouverture. On ne s'attardera pas trop sur We are what we are, film soigné mais trop connecté à l'œuvre dont il est le remake, et pas beaucoup plus palpitante, en dépit d'évidentes qualités esthétiques.

La petite collation qui suivit fut l'occasion de vérifier à nouveau combien les équipes de Dark Star savent y faire pour recevoir le chaland (le chaland affamé et au bord de la déshydratation), ainsi que de prendre la température d'une sélection aussi éclectique qu'intrigante. Le grand (par la taille et par The WomanLucky McKee semblait extrêmement impatient de présenter son attendu All Cheerleaders die au public, accompagné d'une de ses magnétiques comédiennes.

 

Et le moins que l'on puisse dire, c'est que l'on ne fut pas déçu. Nonobstant une difficile nuit passée à repousser les assauts de myriades de mère célibataires au comportement erratique, pour ne pas dire troublant - « TapavuTonTon, TapavuTonTon » - la dernière création de Lucky McKee sut nous offrir une gentille claque au réveil. C'est qu'il faut avoir des cojones de la taille d'un petit tracteur pour tenir éveillé le spectateur moyen face à un conte macabre et girly consacré aux pratiques Wica, à la résurrection et au dépiotage de pom-pom girls. En dépit d'une mise en place longuette et de deux ou trois errements numériques, all Cheerleaders die s'avèra une belle surprise, remplie ras la gueule d'idées aussi folles qu'à priori stupides, magnifiées l'énergie d'un scénario et d'une mise en scène toujours paroxystique. Notez qu'on y voit des pom-pom girls massacrer et dévorer des mâles libidineux pendant deux bonnes bobines. Et comme dirait Tonton : « Quand la bobine est bonne... »

Une mise en jambe qui nous amène jusqu'à l'un des premiers plats de résistance d'une sixième édition du FEFFS que l'on annonce gargantuesque, la désormais incontournable Zombie Walk. Qu'est-ce que la zombie walk ? Et bien c'est une sorte de gay pride, mais sans Regine, et avec beaucoup moins de Poppers. Dit comme ça, cela n'a pas l'air très drôle, mais ne vous fiez pas à cette description un tantinet aride. On pouvait y croiser en ce pluvieux jours de septembre quelques 4 000 énervés déguisés en zomblards (d'après les forces de police), maquillés par les bons soins des organisateurs, ou les leurs. Imaginez un peu, trois mille individus mimant la putréfaction, sautant sur le premier bourgeois qui passe, se roulant avec un enthousiasme non feint sur le sol pour faire flipper les bambins.

 

Un tel événement est non seulement particulièrement impressionnant, mais charrie un grand nombre de questions essentielles à la nécessaire radiographie d'une culture populaire dont il convient de se demander si elle se renouvelle ou -justement- se zombifie. Le mort-vivant est-il de gauche ? Son apparente attaque en règle contre les symboles d'une société de consommation devenue folle ne dissimule-t-elle pas plutôt un désir réprimé de dévoration de l'individu par un collectif, lequel se voit alors débordé idéologiquement par l'impensé de ses propres limites ? (copyright Guillaume Meral)

Tout cela pour dire que nous aurons eu l'occasion de faire une poignée de rencontres hilarantes et décisives lors de la Zombie Walk 2013. Ainsi avons-nous fait la connaissance d'une infirmière crado, toute pourrie, mais très sexy ; d'un adorable bambin de moins de douze mois zombifié par ses irresponsables géniteurs, d'à peu près 2 284 geeks que la présence massive de geekettes portées sur le faux sang et les bas résilles poussaient sérieusement au priapisme ; de tout un tas de petit vieux venus se rincer l'œil, mais pas certains de reluquer des garçons ou des fifilles ; de morts-vivants foutrement inventifs (mention spéciale au zombie Jack Sparrow, qui a dû passer dans son costume la moitié du PIB de la Corée) et enfin d'un Zombie Leader au charisme improbable et électrique, qui parvint à déclencher un défilé pas piqué des vers devant la cathédrale strasbourgeoise.

 

Voilà où en est la Team EL quelques vingt-quatre heures après son arrivée en Alsace. Bientôt viendra l'heure d'enchaîner avec Cheap Thrills, avec les folies du catcheur Santo, pour terminer, si le cœur nous en dit, par un second visionnage de The Battery, qui avait fortement marqué la ville de Tour il y a quelques mois.


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