Présidentielles américaines, quand le cinéma entre dans l'arène

Simon Riaux | 29 août 2012
Simon Riaux | 29 août 2012
George W. Bush, le dernier président républicain des États-Unis avait dû essuyer nombre d'attaques cinématographiques, lesquelles n'avaient pu empêcher sa réélection, ni ternir tout à fait son image dans le cœur de ses partisans les plus ardents. C'est ce que doit méditer l'actuel président, alors qu'un brûlot à son encontre est en passe de devenir un succès surprise sur le territoire américain. En effet, 2016 Obama's America a débuté son exploitation dans une unique salle texane, à Houston, au mois de juillet, et le film joue désormais à guichets fermés dans pas mois de 1090 salles, sur tout le territoire.

Réalisé par l'essayiste d'origine indienne Dinesh D'Souza, le documentaire se base officiellement sur l'autobiographie du président, intitulée Rêves de mon père. Le réalisateur y aurait trouvé l'expression d'un anti-américanisme, d'un anti-sionisme et d'un anti-colonialisme forcené, issu du paternel Obama, supposé guider l'action du président. Une forme d'attaque à peine polissée, comparée à celles qu'il endura le long de sa première campagne présidentielle, où de nombreux tracts, spots et autres militants interrogeaient carrément la nationalité du candidat, son amour de l'Amérique, voire son identité, n'hésitant pas à scander son deuxième prénom, Hussein.

Le procédé, aussi grossier soit-il, n'est pas nouveau, il est systématiquement question depuis le Watergate, à chaque élection, de savoir si l'adversaire ne serait pas un dissimulateur, un manipulateur, s'il ne cacherait pas son jeu au peuple américain. À cela vient s'ajouter une peur nouvelle, venue avec la crise, celle d'un déclassement généralisé. Affirmant sa volonté de défaire les U.S.A. de leur image de nation impérialiste, Obama a pris le risque de passer pour faible, ou pire, de passer pour un anti-patriote, prêt à piétiner la puissance passée des États-Unis.

Le succès et la virulence de 2016 Obama's America sont le fruit de ces tensions, de la propension du public américain à sombrer joyeusement dans de grand barouds à tendance paranoïaque, et constituent une réponse aux attaques menées par le camp démocrate depuis plusieurs mois au sujet du candidat Romney, présenté comme un ancien grand patron sans scrupule, soit un des hommes responsables de la crise qui étreint actuellement l'Amérique.

Sachant que le président actuel n'a pas su entretenir l'élan qui avait porté son élection, qu'il n'a pas encore remporté la bataille idéologique (Medicare un des projets phares de son mandat est encore perçu comme une intrusion socialiste dans le fonctionnement d'un état libéral), et ne bénéficie pas comme son prédécesseur d'un contexte fédérateur (Bush avait pour lui une guerre en cours, qui fit hésiter nombre d'électeurs à l'éjecter). On est en droit de penser que les attaques vont se multiplier, dans les deux camps, et que les enjeux pousseront les acteurs de la politique américaine à faire du Septième Art un champ de bataille à part entière.

Il suffit de voir les tensions générées par The Dark Knight rises, qui suscita autant d'exégèses de gauche que de droite, pour comprendre que 2016 Obama's America n'est que le premier jalon d'une campagne de propagande cinématographique qu'il sera particulièrement intéressant de suivre.

 

 

 

 

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