Gérardmer 2011 : Jour 3

Jonathan Deladerriere | 29 janvier 2011
Jonathan Deladerriere | 29 janvier 2011
« Bon, Jonathan, demain à 9h, tu vas voir The Dead Outside, un inédit vidéo ». Même rédac-chef, même remarque que la veille... Les yeux mis clos, à peine 4 heures de sommeil plus tard, direction donc Le Paradiso pour une nouvelle journée de plaisir cinéphilique! Enfin, plaisir , tout dépend du film...

Réalisé par la britannique Kerry Anne Mullaney, le métrage post-apocalyptique qui entame cette journée ne parvient malheureusement pas à réveiller les sens. N'ayant ni les moyens de Danny Boyle pour son 28 Jours Plus Tard, ni le talent de John Hillcoat (le magnifique La Route) pour ce qui est de poser une ambiance dramatique oppressante aux enjeux universels, le film ne convainc pas et peine à illustrer un propos qui le dépasse. Enième circonvolution de scénariste en mal d'inspiration, celui-ci se contente de réciter les poncifs du genre:  attaques surprises d'infectés (5 tout au plus pour tout le métrage), rencontre de sujets sains, étalonnage grisâtre de la photo, et récit dramatique des convergentes destinées. On passe.

 

11 heures : Simon et Jonathan, prêts à tous les sacrifices pour les lecteurs d'Ecran Large, continuent leur périple à travers les montagnes enneigées. Direction L'Espace-Lac pour la projection de Ne Nous Jugez pas, en compétition, 1er film du mexicain Jorge Michel Grau. Doté d'un pitch que Simon qualifiera d'alléchant (après la mort de son père, un jeune adolescent marginal se doit de subvenir aux besoins du foyer, en l'occurrence : rapporter de la chair humaine!), le film ne parvient malheureusement pas totalement à maitriser son sujet. Malgré un Scope plutôt soigné et une interprétation sans faille, les nombreuses baisses de rythme et les multiples zones d'ombres scénaristiques handicapent le métrage. On se pourlèchera pourtant des mises à mort traumatisantes et du ton décalé bienvenu.

Voir un film de Noël à Gérardmer, on se dit que c'est un peu comme faire goûter un steak tartare à une prof d'éducation civique végétarienne. Sauf que Rare Exports : a christmas tale n'est pas un conte classique. En suivant le Noël bien particulier d'un jeune scandinave qui va découvrir avec effroi Santa Claus n'a rien d'un affable vieillard, et que s'il aime les enfants, c'est cuits à point. Le film étonne de bout en bout et passe avec aisance de l'humour à l'effroi. Classé hors-compétition, le métrage aurait pu légitimement bousculer les challengers, et s'est taillé une place de choix dans le coeur grelottant des festivaliers.  

Revenu d'une sieste salvatrice pour l'un d'entre eux (le mystère restera entier), les deux compères se dirigent en cette fin d'après-midi glacée à la séance de l'attendu Cold Prey 3.
Bien qu'hors compétition, la «saga» possède ses aficionados et il faut jouer des après-skis pour pouvoir assister au slasher venu du grand nord. Une fois encore, nos amis se décomposent devant une resucée du récent Vendredi 13, pourtant piètre maître-étalon. La réalisation est soignée, la première bobine fait illusion : c'est un fait. Mais une photo magnifique ne suffit pas et cette nouvelle mouture n'est qu'un prétexte à l'auto-citation. Script bancal, fin bâclée, personnages souffrant d'un manque de profondeur évident, la déception est de mise. Dommage pour une saga qui avait pourtant révélé le talent des norvégiens en matière de survival. Un constat s'impose : se procurer d'urgence de grands verres de vin chaud !

La dépendance alcoolique satisfaite, les deux émissaires font preuve eux aussi d'une grande originalité en... Ben en allant voir un film...C'est quand même pour ça qu'on se les gèle !

On arrive au plat de résistance avec le roi du bouche à oreille : The Troll Hunter. Déjà le titre donne la bave aux lèvres. Mis en scène par André Ovredal, le cinéaste nous conte l'histoire de jeunes étudiants partant à la recherche de mystérieux ragondins. Ah non, merde, trolls, je suis con, c'est dans le titre ! Et là, chers internautes adorés, on plonge tête la première dans cette péloche très bien troussée, de celles qui font leur renommées grâce aux festivals. Cédant pourtant à la mode un peu facile et assez agaçante du « documenteur », le capital sympathie est immédiat et le métrage, chose rare, s 'améliore au fil des minutes. Les personnages sont attachants et le film, aux vues d'un sujet très casse-gueule, se veut humble et une pure déclaration d'amour au cinéma de genre. Bourré d'humour ( Vous pisserez littéralement sur vous lors de la scène de « l'affrontement en armure »!), celui-ci se permet même le luxe d'effets spéciaux très corrects et d'un final d'ampleur. Tout juste, mais vraiment pour pinailler, peut-on lui reprocher quelques minutes inutiles. La compétition aurait-elle trouvé son vainqueur ? Possible.

 

 

 

Nous n'étions en effet pas au bout de nos surprises et n'imaginions pas tel consternation devant l'involontairement risible Prowl. Hors compétition, le film de Patrik Syversen, auteur de Manhunt, réussit l'exploit d'être encore plus bidon que Devil !

Mis en scène avec les pieds, l'histoire se veut elle aussi particulièrement... Inventive ! Amber et ses amis tombent en panne et sont pris en stop par un méchant routier. Respect. Comme à l'habitude, les personnages taillés au cuter sont caricaturaux aux possibles, on n'éprouve d'ailleurs aucune empathie quant à leurs tragiques destins, et le festin ne fait malheureusement que commencer... De festin, justement il en sera question, mais nous nous en voudrions de vous dévoiler les aboutissants d'un tel chef d'oeuvre, que vous vous devez de déguster, entre potes accompagnés de quelques pizzas. Alors que toute la salle est déjà à terre, évanouie devant un tel manque de talent, nous tachons de conserver notre esprit d'analyse. Quid de ces acteurs tous plus mauvais les uns que les autres, quid d'une intrigue totalement abracadabrante ou d'un final affligeant. Prowl est donc, avec toute la retenue qui nous caractérise, une purge.

Difficilement debout après un tel bijou de septième art, nous achevons notre studieuse journée avec la bien nommée séance de minuit et la projection du dernier Éric Valette : Hybrid. Quand un calamar mutant prend l'apparence d'une voiture pour attaquer les malheureux employés d'un garage, la question n'est pas de savoir si le film est bon, mais s'il procure du plaisir. Et là, force est de constater que même si les fans d'Antonioni n'y trouveront peut-être pas leur compte, les autres devraient prendre leur pied comme rarement. Tout y est : morts cartoonesques, dialogues over the top, effets spéciaux à vous crever les yeux. Il se dégage de l'ensemble une atmosphère délirante et assumée de bisserie à la papa. Un régal que nous avons eu le privilège de déguster en 2D, et non dans l'abominable version convertie en troisième dimension.

A dans quelques heures pour de nouvelles aventures !

 

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