Les films de jeunes à la française

Vincent Julé | 16 juillet 2008
Vincent Julé | 16 juillet 2008

A l'occasion de la sortie de Nos 18 ans, il est intéressant de revenir non pas sur les remakes, bien que le film soit librement adapté de l'italien Le jour d'avant l'examen de Fausto Brizzi, mais sur les films pour adolescents à la française. Car contrairement aux Etats-Unis où il y a une vraie culture du teen movie avec ses stars, ses codes, ses courants, ses déclinaisons (American Girl 4 et American Pie 6 en DVD !!) et même un mémoire par notre Julien Foussereau, la France reste un parent pauvre. Il faut y réfléchir à deux fois avant de trouver de vraies comédies ados, les équivalents des films de John Hughes, d'Elle est trop bien, Sex Academy ou American Pie. Et pourtant il y en a, une poignée, et c'est le sourire aux lèvres qu'on se les remémore, car chacun a marqué à sa façon une génération. Pas de quantité donc, mais de la qualité oserait-on dire, ou du moins une formule qui fonctionne, parfois clairement copiée sur celle de son oncle d'Amérique, parfois complètement franco-française.

 

 

Comme il faut bien commencer à un moment donné, quoi de mieux que les années 70, son réveil post-soixante-huitard, ce léger vent libertaire. C'est ainsi en 1976 que les écrans français accueillent A nous les petites anglaises. Comédie potache par excellence, le film titille le bas du ventre de cette nouvelle génération en perte de repères et en quête de libertés. Qui a dit de sexe ? Il est aussi intéressant, car il touche du doigt le sujet du chauvinisme qui nous est cher, et fait des anglaises la personnification de la luxure et de la liberté sexuelle. Plus sage et plus nostalgique, Diane Kurys joue la carte féminine avec Diabolo menthe, douce chronique sur le passage à l'âge adulte.

 

Les années 80 se révèlent plus studieuses mais pas pour autant sérieuses. S'il y a moins de romance et de sexe, plus d'études et le Bac, c'est du point de vue des cancres, des insolents, des Sous-doués. Le film de Claude Zidi et sa suite en vacances sont bas de plafond, préfère la tarte dans la gueule à la réplique qui fait mouche, mais ils respirent une telle générosité et un tel je-m'en-foutisme qu'ils trouvent un écho dans le cœur de tous les lycéens, de toutes les générations.

 

 

Plus générationnel et plus culte encore, la même année sort La Boum (suivi vite pour cause de triomphe, de La Boum 2, et plus tard, d'une suite non officielle, L'Etudiante) où une Sophie Marceau rougissante découvre l'amour et les premières soirées dansantes. Il peut être vu comme le pendant féminin du film de jeune, qui aura souvent (toujours ?) l'habitude de se placer d'un point de vue strictement masculin. D'où la future omniprésence, voire la toute-puissance, du sexe, du passage à l'acte, de l'éclate.

 

En 1995, Cédric Klapisch offre un nouveau regard sur la jeunesse et les années lycée avec Le péril jeune. Le ton hyperréaliste et tragicomique le place un peu à part des autres comédies (certains diront au-dessus), mais il n'en multiplie pas moins les scènes anthologiques, les répliques cultes et... Tomasi ! Branleur, insolent, tête à claque, sûr de lui, Romain Duris devient une icône, le summum de la coolitude à la française.

 

 

Deux ans plus tard, ce sont quatre étudiants en droit à Aix-en-provence qui viennent squatter les salles, et pour tout dire nous pourrir la vie. Quatre garçons plein d'avenir parlent encore de losers, versent toujours dans la potacherie mais en fait du grand art, du nanar ! Mais du nanar culte en puissance, avec un nivellement constant vers le bas, des personnages aberrants, des acteurs enterrés vivants et un réalisateur qui commit dans la foulée HS Hors service.

 

En 1999, alors que Jamel est devenu une icône de l'humour sur Canal + grâce au Cinéma de Jamel et à la sitcom H,  le cinéma le récupère et tente de le sacrer avec Le ciel, les oiseaux et ta mère. Le plus intéressant du premier film de Djamel Bensalah (à 22 ans !) reste qu'enfin, les minorités sont représentées dans la jeunesse au cinéma et que les emprunts aux teen movies commencent à être digérés.

 

 

On ne peut pas vraiment dire que ce soit le cas avec Sexy Boys en 2001, la réponse directe et presque copiée/collée à American Pie. Tout y est, même la tarte aux pommes... euh le plat de pâtes. Même si l'on peut avoir une certaine affection, quoi que un peu perverse, pour le film, difficile a priori de s'en relever. Pourtant, 7 ans après, le réalisateur Stéphane Kazandjian revient avec le gentil et malin Modern Love.

 

Pour le Jackass national, c'est du côté de Michaël Youn qu'il faut se tourner avec Les 11 commandements. Une version soft de Johnny Knoxville et sa bande, mais toujours crétine et jouissive. Le duo de réalisateurs quant à lui persiste et signe dans ce genre mal compris et mal reconnu en France avec le foutraque mais généreux 15 ans et demi. C'est aussi le pari risqué de James Huth qui après avoir cassé la baraque avec Brice de Nice tente un retour aux comédies pop des eighties avec Hellphone. Une sympathique et régressive parenthèse avant son Lucky Luke avec Jean Dujardin.

 

 

Finalement, la sortie de Nos 18 ans est aussi la preuve qu'il ne faut plus attendre des années, voire des décennies, mais seulement des mois pour voir un nouveau film de jeunes à la française au cinéma. D'ailleurs, Fracassés ! de Franck Llopis débarque fin août. Si ça, c'est pas un bon signe. Des temps ? D'un changement ? Peu importe, il faut juste en profiter.

 

Dossier réalisé par Vincent Julé et Lucile Bellan 

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