Cannes 2008 : En parallèle (2)

Vincent Julé | 25 mai 2008
Vincent Julé | 25 mai 2008

Cette année, La Quinzaine des réalisateurs et La Semaine de la critique se sont dotés de programmes un peu différents avec deux documentaires, mais des documentaires « autres ». Dans une séance spéciale, La Quinzaine a fêté ses 40 ans avec le film 40X15 d'Olivier Jahan. L'occasion tout d'abord de faire monter sur scène 30 réalisateurs de Chantal Akerman à Jim Jarmusch, d'honorer  et Oliver Père ses délégués généraux respectivement le plus connu et le plus récent, mais surtout de revenir sur une histoire mouvementé. Riche en informations et en anecdotes, le film explique comment dans la foulée de mai 68 un groupe de réalisateurs a fondé la Société des Réalisateurs de Films et lancé La Quinzaine pour lutter contre l'académisme du cinéma français et plus précisément du festival de Cannes. Conté et rythmé par Pierre-Henri Deleau lui-même, le documentaire révèle bien vite sa vraie nature, à savoir un objet engagé, politisé. Entre les témoignages des auteurs, des organisateurs et les faits historiques, l'indépendance de La Quinzaine ne fait aucun doute, ni même sa rebelle attitude. Pourtant, une certaine complaisance transpire que cela soit dans ses attaques contre le festival officiel, qui lui a mis de bâtons dans les roues avec la création d'Un Certain Regard, ou le mépris difficilement compréhensible envers La Semaine de la critique. Le point culminant de cette autosatisfaction étant dans la partie making of de l'édition 2007, où après découvert et misé sur 4 mois, 3 semaines et 2 jours, l'équipe regarde, coups d'oeils complices à l'appui, le film remporté la Palme d'or. Reste que ce positionnement semble tout à fait réfléchi, conscient, provocateur et donc par la même ouvert à la critique. (3/5)

 

 

Pour sa journée particulière, La Semaine de la critique a décidé de mettre l'accent sur les liens entre cinéma et politique. Film phare et attendu, Les enfants de Don Quichotte (Acte 1) s'est révélée une belle surprise citoyenne et cinématographique. En effet, a priori, qu'attendre d'une action déjà surmédiatisée, d'un Augustin Legrand omniprésent, d'une victoire silencieuse ? Et bah, c'est exactement la problématique du documentaire qui remet en perspective ces questions, les doutes, les vérités. Si le film reste un outil militant, il n'est jamais manipulateur. Le portrait des sans-abris n'est jamais unilatéral, ils sont agressifs, dépassés, solidaires et laissés pour compte. Celui des citoyens qui les rejoignent dans la rue, et le long du Canal Saint-Martin, non plus, Augustin Legrand ne prétend pas être autre chose qu'un acteur au sens de porte-parole, d'identité publique. Ses textes, ses choix, ce sont surtout son frère Jean-Baptiste et Pascal Oumaklouf qui les font. Par contre, dans cette immersion salutaire et presque addictive, la sincérité de tous face aux petites victoires et grandes désillusions n'est jamais à remettre en cause. Acte1, le combat continue, le cinéma est aussi là pour le rappeler. (3,5/5)

 

 

Enfin, La Quinzaine et La Semaine se retrouvent dans leur(s) joli(s) portrait(s) de l'adolescence. Dans l'argentino espagno mexiquo-uruguayen Acne, le jeune Rafael est initié à la sexualité par la gouvernante puis les prostitués mais ne sait comment s'y prendre pour son premier baiser, surtout avec la belle Nicole. Rien de nouveau sous le soleil de la jeunesse à problèmes (de peau et de timidité), mais le réalisateur Federico Veiroj fait preuve d'une pudeur et d'un humour touchants. On a tout de même connu passage à l'âge adulte moins sage et plus difficile. (2,5) Pour son premier long-métrage Les grandes personnes, la française Anna Novion part en Suède comme Albert et sa fille Jeanne. En effet, chaque année pour son anniversaire, il l'emmène visiter un nouveau pays d'Europe. Mais sur cette petite île suédoise, il compte aussi mettre la main sur un trésor viking, un plan contrecarré lorsqu'il se découvre que la maison qu'il a louée est déjà occupée par deux femmes. Déjà en forme dans Le voyage aux Pyrénées, Jean-Pierre Darroussin fait encore des siennes ici dans un registre plus bougon mais plus subtil aussi. Face à lui, Anaïs Demoustier révélée par L'année suivante, est à l'image du film : calme en apparence, bouillonnante de l'intérieur. Car à l‘ambiance éthérée créée par les paysages, la musique et le rythme répond toujours un bon mot, un personnage succulent ou un coup d'éclat de Darroussin. Alors qu'il se laisse aller, à rêver, à se reposer, le spectateur se voit alors rappeler de manière judicieuse et jouissive qu'adolescents ou adultes, il n'y en a pas un pour rattraper l'autre. (3,5/5)

 

 

 

  

Mais la vraie surprise, la claque disent même certains, vient de l'Elève libre de Joachim Lafosse (Nue Propriété) et sa drôle d'éducation, qui mérite qu'on y revienne plus amplement lors de sa sortie en salles en septembre.

 

 

 

 



 

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