Stephen King - Les adaptations au cinéma - 2ème partie

Patrick Antona | 28 février 2008
Patrick Antona | 28 février 2008

À l'occasion de la sortie du très réussi The Mist de Frank Darabont, nouvelle adaptation d'un roman de Stephen King sur grand écran, nous vous proposons un retour sur les très nombreux films ayant comme source d'inspiration les écrits du célèbre romancier du Maine. Une ballade pour le moins houleuse tant les livres du King ne sont pas toujours sortis grandis de leur passage cinématographique. D'où l'idée de proposer trois catégories de films : ceux qui s'en sont bien sortis, ceux qu'il serait préférable d'oublier et ceux qui prêtent à polémique.

 

 

 

DEUXIEME PARTIE : LES RATÉES

 

 

Firestarter (Charlie) de Mark L. Lester (1984)

 

Après E.T. , Firestarter est un des films qui a contribué à la réputation d'enfant-star-tête à claque que va se coltiner Drew Barrymore jusqu'à sa majorité (regardez Divorce à Hollywood pour vous en convaincre). Quant au film, il peut prétendre à être vu comme un adroit ersatz de Furie et de Scanners, auxquels il ne cesse de faire des emprunts, mais l'ensemble n'arrive pas à convaincre, trop de personnages secondaires mal exploités venant parasités un récit qui se traîne en longueur. Et il faut attendre le tout dernier quart d'heure pour que le spectacle pyrotechnique tant espéré puisse enfin se déchaîner...si le sommeil ne s'est point emparé de vous avant. On ne saurait trop vous conseiller la vision des bien plus passionnants Spontaneous combustion de Tobe Hooper ou du plus rare Wilder napalm de Glen Gordon Carron, sur des sujets équivalents.

 

 

 

Children of the Corn (Horror Kid / Les Démons du maïs) de  Fritz Kiersch (1984)

 

L'Amérique a peur de ses enfants, l'Amérique a aussi peur de ses sectes. En puisant sur ces deux sujets, Stephen King a créé avec ses Children of the Corn un adroit roman, savant mélange entre Sa majesté des Mouches et Le Village des damnés, mais dont le potentiel inquiétant a plus ou moins été évacué dans la version cinéma. Il s'avère que la première réalisation de Fritz Kiersch possède quelques atouts à son actif, surtout les scènes du début avec une montée de la tension puis l'exécution des parents qui s'en suit.

 

Mais à trop se focaliser sur la traque des derniers adultes survivants (Peter Horton et Linda Hamilton dans sa période pre-Terminator), le réalisateur oublie d'explorer le mystère sous-jacent à l'émergence de ce culte païen au cœur d'une Amérique bigote, et ses enfants-assassins en sont réduits à de simples figures qui ne font que s'invectiver et courir dans tous les sens. Et le final qui occulte la vision d'une créature qui se prêtait alors à toutes les formes de matérialisation de la terreur lovecraftienne finit de faire de Children of the corn  une déception de plus dans les nombreuses adaptations de Stephen King.

 

Ce qui n'empêcha pas le film d'engendrer pas moins de cinq suites de qualité diverse, destinées en priorité aux rayons des vidéo-clubs, et dont le mérite serait d'avoir permis la révélation de jeunes débutantes telles que Naomi Watts ou Eva Mendès !

 

 

 

Peur bleue (Silver bullet) de Daniel Attias (1985)

 

Le film de Daniel Attias (retourné depuis à la TV) partage avec le nanard Hurlements II le redoutable privilège de mettre en scène les pires loups-garous du cinéma. A l'origine de ce look si particulier qui annihile tout l'impact du film, on retrouve l'ineffable Carlo Rambaldi, qui, tout au long de sa longue carrière, alterna le pire (Conan le destructeur, King Kong de 1976) avec le meilleur (Alien, Dune). Si on peut apprécier ces trognes de Gary Busey et d' Everett McGill qui assurent plutôt bien leur personnage stéréotypé, l'intrigue de Peur bleue se trouve très vite éventée et la suite du film se limite à de mornes péripéties qui ne pourront faire frissonner que les moins de 10 ans . Et encore...

 

 

 

Maximum overdrive de Stephen King (1986)

 

Stephen King le reconnaît aisément , ce film est une daube : « J'ai réalisé le Plan 9 from outer space des années 80 » aime-t-il à se répéter. Et encore le film d'Ed Wood avait le mérite d'être drôle du fait de sa maladresse. N'exploitant qu'une mince partie d'une intrigue se basant sur la menace des machines, devenus vivantes et meurtrières suite au passage d'une comète, le film s'enlise dans le statisme le plus total, où les camions se bornent à tourner d'une station-service, en attendant q'un des survivants au destin inintéressant au possible viennent se jeter bêtement sous leurs roues.

 

En ratant l'adaptation de sa propre nouvelle, Trucks, Stephen King ne réussira pas l'exploit que Clive Barker fera l'année d'après avec Hellraiser et se dégoûtera à jamais de la réalisation. A réserver uniquement aux fans hard-core de AC/DC qui ont composé l'essentiel de la bande-son de cet accident filmique.

 

 

 

Le Cobaye (The Lawnmower man)  de Brett Leonard (1992)

 

Film-prétexte au titre opportuniste qui tente de surfer sur la notoriété de Stephen King en n'adaptant en rien la nouvelle originale, si ce n'est une séance de rêve tirée par les cheveux, Le Cobaye vit d'ailleurs sa référence à l'œuvre de l'écrivain promptement retirée suite à une mise en demeure judiciaire.

 

Tout en surfant sur la vogue naissante des films aux SFX générés par ordinateur et les prémisses de la réalité virtuelle, Le Cobaye n'est en fait qu'une énième variation sur la créature de Frankenstein, avec quelques tentatives de recoller à l'univers de King en y ajoutant un prêtre fanatique et description de banlieue pépère qui cache une menace, et où finalement rien ne fonctionne, si ce n'est une interprétation des plus potables de Jeff Fahey en simplet devenue l'équivalent d'un dieu en deux coups de clavier.

 

 

La Créature du cimetière (Graveyard Shift) de Ralph S. Singleton (1990)

 

Le film avec des gros rats possède ses sommets (Soudain les monstres, Of Unknown origin) et aussi ses ratés (Night eyes). Graveyard Shift appartient à cette dernière catégorie et participe, avec de nombreux films des années 90, à cette vogue de films où il suffisait d'y ajouter le préfixe Stephen King's pour s'imaginer que le public allait se jeter en masse dans les salles.

 

Mais à la différences des rats envoûtés par le joueur de flûte de Hamelin, se fut plutôt le chemin inverse qui fut choisit. Le seul regret que l'on peut avoir réside dans le cas de Brad Dourif, acteur épatant qui gâche son talent dans des séries B anecdotiques, et qui est ici excellent en exterminateur vétéran du Vietnam.  

 

 

La Nuit déchirée (Sleepwalkers) de Mick Garris (1992)

 

Après Cat's eye et un des sketchs de Creepshow, Sleepwalkers est un des rares scripts écrits directement pour le cinéma par Stephen King. En tentant d'apporter au panthéon des monstres du cinéma ses « félidés », hommes-chats se nourisant du sang des vierges, Stephen King, assisté de Mick Garris à la réalisation, a de nouveau raté son coup.

 

Intrigue alignant les lieux communs et les trous narratifs, créatures aux maquillages peu crédibles, effets gore plus parodiques que vraiment horrifiques, Sleepwalkers ne survit que grâce à l'interprétation intense d'Alice Krige, parfaite en mère incestueuse et monstrueuse, et à la curiosité de voir un défilé de stars faire des apparitions (Stephen King, Tobe Hooper, Joe Dante, John Landis Clive Barker, Mark Hamill). Depuis le duo Garris/King a réussi une reconversion plus aboutie dans les adaptations TV avec The Stand, Shining version 1997 et Desperation.

 

 

 

The Mangler de Tobe Hooper (1995)

 

Encore un des innombrables films-prétextes se basant sur la notoriété de Stephen King pour une banale histoire de machine possédée par un démon, à l'instar de Christine, sauf qu'ici nous avons droit à une repasseuse géante !

 

N'ayant peur de rien, et surtout pas du ridicule, Tobe Hooper alors au creux de la vague (il n'y a que depuis les Masters of Horror qu'il refait preuve de talent) cumule les fautes de goût, le mélange horreur/comédie ne fonctionnant absolument pas, et noie Robert Englund sous une tonne de make-up lui empêchant toute tentative de jeu un tant soit peu en relation avec son rôle. Mais vouloir tirer quelque chose de cohérent d'une nouvelle qui était bien décevante était sans aucun doute partie perdue à l'avance.

 

 

La Ligne verte (The Green mile) de Frank Darabont (1999)

 

N'étant pas fan des deux premiers films de Frank Darabont (Les Evadés, La Ligne verte), les histoires d'amitié entre taulards ayant été mieux été traités dans Luke la main froide ou L'Evadé d'Alcatraz, on ne peut que saluer avec The Mist la bonne évolution du réalisateur qui en a fini avec ses tics pour ne se focaliser qu'avec talent sur son histoire et ses personnages.

 

Pour en revenir à La Ligne verte, à l'origine publiée sous forme de feuilleton, les détours scénaristiques pris par Darabont pour se garder de prendre parti pour ou contre la peine de mort et ses efforts pour ne montrer que le visage humain des matons (pas trop de risque en prenant Tom Hanks qui a rarement été aussi mollasson) rendent le film complètement inodore et inoffensif.

 

De plus, tout le côté féerique et sympa de l'histoire (avec la petite souris) est promptement évacué par le perso Michael Clarke Duncan et son pouvoir de guérison miraculeuse, faisant basculer alors le film dans le grotesque et le préchi-precha. Et de finir le tout sur une note conservatrice et extrémiste à l'opposé du message humaniste censé être délivré au début, rendant finalement cette longue Ligne verte (plus de 3h) pas si inoffensive que cela.

 

 

 

 

Dreamcatcher - L'attrape-rêves de Lawrence Kasdan (2003)

 

Prenez  un groupe d'amis dont l'enfance a été marquée par un trauma (Ça), l'influence magique d'un cimetière indien (Simetierre), une invasion extra-terrestre aux influences pernicieuses (Les Tommyknockers), laissez mijoter le tout avec un soupçon de X-Files et vous aurez au résultat un des plus gros pavés de Stephen King avec 700 pages à la clé.

 

Mais une fois passée la moulinette du scénariste multi-oscarisé William Goldman, il ne reste pratiquement rien de l'édifice mis en place par l'écrivain. Entre un début où Lawrence Kasdan nous refait le coup de la réunion des anciens comme dans Les Copains d'abord et un final spectaculaire grâce aux effets spéciaux de ILM, Dreamcatcher enfile les poncifs du genre  comme des perles, fait apparaître ou disparaître des personnages sans aucune motivation (la palme à Morgan Freeman en colonel aux desseins plus que brumeux) et finit par ne devenir mémorable que pour une seule séquence : celle de l'alien-étron qui mérite de figurer au panthéon des scènes dites « psychotroniques », dans le plus beau sens du terme.

 

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