La grève menace à Hollywood

Zorg | 19 février 2007
Zorg | 19 février 2007

Les studios qui développent des programmes pour la télévision américaine préparent actuellement le terrain pour limiter au maximum les dommages collatéraux qu'une grève des scénaristes pourrait provoquer.

Le 31 octobre prochain, le contrat entre la Writers Guild of America, l'organisation syndicale des scénaristes américains, et l'AMPTP (Alliance of Motion Pictures and Television Producers, alliance regroupant studios et producteurs et en charge des négociations syndicales) et les grands networks prendra fin. Le contrat en question (Writers Guild of America Minimum Basic Agreement – MBA pour faire court - Accord Syndical Minimal) régit les conditions, la compensation, les droits et les responsabilités sous lesquelles les membres de la WGA travaillent. C'est l'équivalent de nos conventions collectives nationales, il est renégocié tous les trois ou quatre ans, par la WGA, l'AMPTP et les networks, et il concerne approximativement 12 000 scénaristes travaillant pour Hollywood.


Les négociations n'ont pas encore été entamées par les différents partis en présence, mais échaudés par des expériences similaires (la dernière grande grève remonte à 1988) et redoutant des grilles de programmation exsangues de nouveautés et perfusées aux talk-shows et autres rediffusions, les networks ont malgré tout déclenché les grandes manœuvres en coulisses pour désamorcer au maximum à une hypothétique grève qui les priverait de scripts frais lors de la rentrée. Le risque ultime est bien évidemment de voir les téléspectateurs fuir vers d'autres horizons durant la grève et de ne pas les voir revenir après coup.

Première méthode : la thésaurisation. Avant d'arriver à la sécheresse, avoir à sa disposition tout un stock d'épisodes prêts à l'emploi peut être une bonne solution. C'est pourquoi la production de séries comme Nip/Tuck ou Rescue Me, toutes deux diffusées sur FX, ont été approchées pour augmenter leur quota de 13 épisodes à 22, chiffre habituellement pratiqué par les grands networks et pas sur le câble.

Seconde méthode : raccourcir les vacances, pour la production comme pour les acteurs. La période estivale est traditionnellement utilisée par les acteurs de série les plus en vue pour prendre part à des longs métrages (Kiefer Sutherland en est l'un des meilleurs exemples), mais elle sert aussi aux équipes de production pour recharger les batteries et préparer avec sérénité la saison à venir (Lost est un bon exemple, la série étant réalisée à Hawaii). Les networks ont ainsi approché les agents représentants les acteurs en vue de raccourcis leurs périodes de disponibilité à des délais allant jusqu'à six semaines, ce qui laisserait à peine le temps de tourner un film pour certains.


Cette double solution : raccourcir les pauses et augmenter les stocks pose cependant des contraintes différentes selon que l'on est un show ancien ou un pilote à peine sorti du four.

Pour les équipes de production déjà en place depuis longtemps, soit des shows comme CSI ou Law & Order, les networks peuvent ainsi décider de repousser la coupure estivale et maintenir les équipes de production plus longtemps qu'à l'accoutumée, au lieu d'avoir à rappeler tout le monde en plein mois de juillet. Comme précisé précédemment, les hiatus estivaux sont nécessaires aux équipes de production, particulièrement celle utilisant de multiples locations, comme 24, et relancer un cycle de production de manière anticipée est un exercice périlleux.

Pour les pilotes, le problème est différent. Les présentations des grilles de rentrée par les networks, les « upfronts », ont lieu dans le courant du mois de mai, et sont suivies par deux à trois mois de développement qui permettent souvent d'affiner le concept d'une série ou de remplacer un acteur ou une actrice avant de développer réellement un show. Dans la situation présente, les networks ont averti les acteurs qu'ils pourraient être mis à contribution dès que les annonces auront été faites. Un rush inhabituel mais dicté une fois encore par le besoin de stocker les nouveautés pour la rentrée.


Si aucun aménagement de planning n'est malgré tout possible pour une équipe de production, le stockage de scripts est toujours envisageable. Mais réaliser un épisode sans avoir de scénariste sous la main reste un exercice très délicat, la moindre retouche au script étant en effet régie par des réglementations strictes pour protéger le travail des scénaristes.

Autre solution parfois envisagée par les networks : la programmation alternative, soit la télé-réalité, les talk-shows et le sport. Lors de la grève de 1988, de nombreux talk-shows ont fleuri pour boucher les trous dans les grilles et certains ont réussi à rester. Avec le boom des émissions de télé-réalité ces dernières années, un nombre croissant de programmes est en cours d'élaboration et le genre pourrait bien constituer une planche de salut de première importance.

À l'inverse, un tel mouvement serait pour l'heure moins susceptible de gêner la production de longs métrages. La demande en matière première est moindre et les délais de développements sont moins frénétiques que pour la télévision.

Quoi qu'il en soit, même si l'on est encore loin d'une grève sanglante où des hordes de scénaristes enragés monteraient des barricades sur Rodeo Drive et affronteraient la Garde Nationale pour le contrôle de Beverly Hills, les échéances se rapprochent malgré tout à grande vitesse (dans trois mois, la saison sera achevée).

Source : Yahoo News

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