Halloween - La Saga

Thomas Messias | 31 octobre 2006
Thomas Messias | 31 octobre 2006

Chaque 31 octobre, c'est Halloween : des visages creusés dans des citrouilles, des fausses toiles d'araignée un peu partout, des mioches déguisés en Casper qui sonnent à la porte pour réclamer des friandises, et surtout l'occasion pour les loueurs de costumes et les vendeurs de confiseries de s'en mettre plein les poches.

Un peu de culture : Halloween est un mot d'origine anglaise venant de « All hallow's eve », qui signifie « veille de la Toussaint » (et pour cause). Elle trouve son origine dans une ancienne fête celte célébrée en l'honneur du dieu de la mort. Voilà. Mais le 31 octobre, pour tout cinéphile qui se respecte, c'est d'abord l'anniversaire d'un type nommé Michael Myers. Michael naît en 1957, le jour d'Halloween, et devient rapidement un petit garçon précoce. Rendez-vous compte : il devient un assassin dès l'âge de six ans, tuant sauvagement sa grande soeur Judith. Déjà, le petit a un sérieux grain. Depuis, ça ne s'est pas arrangé : en trente ans, huit films, la légende Myers a pris de l'ampleur et fait de nombreuses victimes, pour le meilleur et pour le pire.

Tout commence dans La Nuit des masques (1978), plus connu sous le titre d'Halloween. Aux manettes, John Carpenter, jeune cinéaste déjà à la mode suite au succès d'estime de son Assaut. Avec sa collaboratrice Debra Hill, Carpenter a l'idée de raconter le calvaire d'une baby-sitter poursuivie par un psychopathe. L'idée de situer l'action le soir d'Halloween n'arrive que quelques temps plus tard, par le biais du producteur exécutif Irwin Yablans. Creusant davantage cette idée d'un personnage semant la mort la nuit même où celle-ci est fêtée et dédramatisée, Carpenter et Hill créent bientôt le personnage de Michael Myers, lui imaginant une jeunesse morbide passée dans un asile jusqu'au jour de ses 21 ans. Ce jour-là, Myers s'évade et rejoint Haddonfield, la petite ville dont il est originaire, multipliant les meurtres et se rapprochant inexplicablement de Laurie Strode (Jamie Lee Curtis), paisible baby-sitter apparemment sans lien avec lui. Poursuivi par le docteur Loomis (Donald Pleasence), le tenace Michael Myers fait tout pour liquider la jeune femme.

Triomphe pour Carpenter, dont la mise en scène inspirée et méthodique parvient à créer un véritable sentiment d'angoisse. Aujourd'hui encore, Halloween est cité comme LE slasher efficace en diable, où l'utilisation du hors cadre et de la profondeur de champ relèvent du génie. Quant à notre ami Michael, sous son masque inquiétant, il se révèle invincible, indécrottable, plus démoniaque que le diable en personne. Le plan final, d'une sobriété exemplaire, montre que ni le spectateur ni la pauvre Laurie ne sont au bout de leurs peurs.

En effet, après s'être mystérieusement éclipsé, Myers refait surface. Sorti en 1981, Halloween 2 se déroule quelques heures après la fin du premier épisode. Soignée à l'hôpital pour des blessures, Laurie Strode est à nouveau pourchassée par le tueur. Cette fois, Carpenter se contente de signer le scénario, laissant volontiers sa place à Rick Rosenthal derrière la caméra. D'où un film plus sanguinolent que vraiment terrifiant, où les bonnes idées de scénario sont mal mises en valeur par une mise en scène sans âme qui tente grossièrement de reproduire le style Carpenter. La rumeur affirme d'ailleurs que Carpenter aurait tourné lui-même plusieurs des scènes-clés du film. Pour filer un gentil coup de main à son successeur ou pour éviter à l'univers qu'il a créé de sombrer dans le ridicule? Le mystère demeure. Rétrospectivement, il s'agit tout de même de l'un des meilleurs épisodes d'une saga qui tend déjà à s'essouffler.

La fin du film a l'intérêt de perpétuer le mythe Myers : piégé par le docteur Loomis, qui se fait sauter avec lui, notre psychopathe favori ne serait pas tout à fait mort que ça ne serait pas étonnant. Le Mal est immortel. Par conséquent, pas de raison pour que la série Halloween s'arrête là, et on imagine bien une saga sans fin, où les épisodes se suivent et se ressemblent, et où Laurie Strode passe sa vie à tenter d'échapper à Michael Myers (qui est en fait son frère, nous apprend ce deuxième volet).

La suite ne se fait pas attendre, mais elle est plutôt inattendue : écrit et réalisé par Tommy Lee Wallace (monteur de La Nuit des masques), Halloween 3 – Le sang du sorcier (1982) n'a en fait strictement aucun rapport avec les épisodes précédents. Il y est question d'un fabricant de masques d'Halloween qui met au point un plan démoniaque à base de magie noire pour éliminer des millions d'enfants avec ses créations. Plus de Jamie Lee Curtis ni de Donald Pleasence, et aucune référence à Myers. Les rares spectateurs à s'y être aventurés le regrettent encore : film opportuniste par excellence, se contentant d'utiliser un titre bien connu pour engranger les dollars, Halloween 3 est une incongruité totale qui aurait pu sonner la fin prématurée de la franchise. Aurait-ce vraiment été une mauvaise nouvelle?



Les épisodes suivants, qui reviennent à des thèmes plus classiques, signent le retour en fanfare de Michael Myers, mais pas celui de la qualité. Sorti en 1988, Halloween 4 (sous-titré The Return of Michael Myers aux USA pour bien montrer que cette fois, il n'y a pas tromperie sur la marchandise) voit à nouveau l'affreux jojo s'échapper lors d'un transfert en ambulance. Si tout le monde semble persuadé de son décès lors de l'accident de la route qui s'en suit (c'est fou comme les gens sont naïfs), ce n'est pas le cas du docteur Loomis, bien décidé à traquer un tueur décidément fascinant (pour lui, en tout cas). Cette fois, Myers veut tuer Jamie Lloyd, 8 ans, la fille de Laurie Strode, dont on apprend le récent décès (ce qui devrait logiquement assurer le fait que Jamie Lee Curtis ne réapparaisse jamais dans un Halloween). Et devinez comment se clôt le film? Eh bien, figurez-vous, Myers est abattu par de multiples balles et laissé pour mort. Sauf que non. Étonnant, non? Et en plus, la petite Jamie n'est pas morte, et elle montre elle aussi des velléités de tueuse psychopathe… Bref, le film de Dwight H. Little (qui a réalisé depuis Meurtre à la Maison Blanche ou encore Anacondas 2 et un bon paquet de séries de qualité) est grand guignol à souhait et bourré d'une consternante psychologie de bazar. Mais au millième degré, ça peut être extrêmement savoureux.

Ce n'est pas l'originalité qui étouffe les producteurs, mais plutôt les dollars : un an plus tard, voici Halloween 5 de Dominique Othenin-Girard. Une nouvelle fois, le film voit s'affronter Myers et Loomis (l'inoxydable Donald Pleasence). Internée elle aussi, et muette depuis un an, la petite Jamie peut entrer en télépathie avec son tonton Michael, qui réapparaît pour la énième fois et dézingue à tout va. S'en suit une course-poursuite lénifiante et montée à la hache, qui se termine encore plus n'importe comment que d'habitude : cette fois, Michael est capturé par la police, mais un mystérieux homme en noir défonce le commissariat à la mitraillette, tuant tous les policiers mais pas Myers, qui s'échappe à nouveau, le tout sous les yeux de Jamie. De l'avis des experts, et en mettant à part l'improbable Halloween 3, ce cinquième épisode est sans doute le plus mauvais de la série. L'avantage étant qu'après un navet pareil le niveau ne peut que remonter.

Après deux films en deux ans, le rythme décroît, le temps que Myers et son copain l'homme en noir se reposent un peu. Ce n'est que six ans plus tard, en 1995, que Joe Chappelle nous offre un sixième épisode pas vraiment inspiré mais meilleur que le précédent. Dans Halloween 6 – La malédiction, Jamie Lloyd donne naissance à un bébé qui lui est enlevé pour faire l'objet d'un culte satanique. Elle parvient à s'échapper avec lui et rejoint sa famille, qui habite dans la maison d'enfance des Strode (et donc de Michael). Cette fois, le méchant meurtrier a décidé de s'occuper de tous les habitants de la maison. Une fois de plus, il semble avoir été tué après l'injection de produits chimiques ultra toxiques dans son sang. Le film ne se termine pas comme dans le scénario d'origine : en effet, au moment du montage, Donald Pleasence est décédé, d'où son incapacité totale à apparaître dans l'épisode suivant. Chappelle a donc tourné une nouvelle scène finale avec le personnage de Loomis, mais sans Pleasence. Le résultat est quasiment digne d'Ed Wood : derrière une porte, on entend Loomis vérifier si le cadavre de Myers est toujours présent, puis pousser un long hurlement, avant que se fasse entendre le bruit de plusieurs coups de couteau. Ô surprise : Myers n'était pas mort et a poignardé à mort son adversaire de toujours.

Après la mort de Pleasence, les producteurs semblent manquer d'idées : plus de famille Strode, plus de Sam Loomis, difficile de construire un nouveau film sur la mythologie Myers. C'est sans compter sur Kevin Williamson, alors auteur à la mode (les deux premiers Scream et la série Dawson, c'est lui). Persuadé d'être le plus malin des petits malins, Williamson trouve une idée à laquelle personne n'aurait pensé : en fait, Laurie Strode ne serait pas morte. Quel talent. Sur ce postulat au génie indéniable, Williamson laisse à d'autres le soin d'écrire le scénario de Halloween H20 (1999). Réalisé par Steve Miner (Forever young), le film est un slasher ultra classique, moins cheap que les précédents mais pas vraiment passionnant, qui permet à Jamie Lee Curtis d'opérer un retour idéal pour relancer une carrière assez poussive. LL Cool J, Michelle Williams, Josh Hartnett, Joseph Gordon-Levitt : autour d'elle, un casting jeune et à peu près dynamique permettra au film d'engranger les dollars et de donner envie aux jeunes de (re)découvrir les premiers volets. C'est à peu près le seul intérêt d'un film bourré de références à La Nuit des masques sans jamais lui arriver à la cheville.

Dernier volet en date de ce qui est pour l'instant une octologie (c'est moins que les Vendredi 13 mais plus que les Freddy), Halloween résurrection (2002) sonne plus comme un produit dérivé que comme une véritable suite, et c'est tant mieux. Réalisé par Rick Rosenthal (déjà auteur d'Halloween 2), le film exploite un scénario malin et rigolard qui dépoussière sérieusement le mythe pour donner un vrai divertissement à la fraîcheur salutaire. Le film suit une bande de jeunes participant à une émission de télé-réalité. Le but : passer une nuit dans l'ancienne maison de Michael Myers sans faire pipi sous soi. Mais ce qui en apparence relève de la formalité devient tout de suite moins simple lorsque le vrai Myers débarque pour faire un peu de ménage. Rosenthal offre un nouvel univers visuel assez riche pour un scénario qui patine par endroits mais offre de vrais bons moments.

Quelques anecdotes :
Le masque de Michael Myers n'a pas été spécialement fabriqué pour le tournage de La Nuit des masques. À cause d'un budget très serré, Carpenter a dû utiliser un masque déjà existant : celui du capitaine Kirk, acheté 1,98 dollars, et simplement recouvert de peinture.
Dans le scénario original, Michael portait un masque de clown.
Concernant les noms des personnages : Laurie Strode est celui de la première petite amie de Carpenter, Sam Loomis celui d'un personnage de Psychose et Michael Myers celui d'un distributeur européen ayant contribué au succès d'Assaut. Une étrange façon de lui rendre hommage…

Et la suite, alors? On a appris il y a quelques mois qu'elle explorerait une nouvelle voie : c'est en effet Rob Zombie, auréolé du succès de son très bon Devil's rejects, qui a signé pour réaliser celui qui est temporairement titré Halloween : Retribution. Dans ce film, Zombie reviendra aux origines et expliquera comment et pourquoi le petit Michael est devenu un taré invincible voulant trucider toute sa famille. Un projet casse-gueule mais alléchant.

Tout savoir sur Halloween, la nuit des masques

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