Frankenstein : la folle résurrection du monstre entre Shakespeare et Tim Burton

Geoffrey Fouillet | 30 octobre 2022
Geoffrey Fouillet | 30 octobre 2022

Le kitsch ne tue pas, mais rend plus fort Frankenstein, l'adaptation exaltée et exaltante de Kenneth Branagh avec le monstre Robert De Niro.

Dire que le roman culte de Mary Shelley a inspiré le cinéma serait un euphémisme, et on ne se risquera pas à dénombrer la foule d'adaptations produites à ce jour (allez, plus d'une soixantaine au bas mot). Si l'on retient évidemment la version de 1931, réalisée par James Whale avec Boris Karloff dans la peau de la créature iconique, peu d'entre elles ont su faire autant l'unanimité, malgré quelques efforts encore notables du côté des studios Universal. Pour les nouvelles générations en revanche, le lien avec l'oeuvre s'est surtout créé via Van Helsing ou Hôtel Transylvanie (après tout, on fait avec ce qu'on a).

Au rayon des adaptations les plus fidèles, le Frankenstein de 1994 signé Kenneth Branagh se tient en bonne position. Produit par Francis Ford Coppola, encore auréolé du succès phénoménal de son Dracula sorti deux ans plus tôt, le film profite également des talents de scénariste de Frank Darabont et de comédien de Robert De Niro, choisi pour incarner le monstre à la place d'Andy Garcia et Gérard Depardieu, aussi pressentis. Des différends artistiques entre Branagh et son producteur ont hélas malmené le projet, jugé trop emphatique par Coppola et même Darabont sur la base du montage final.

C'est dans ce contexte que sort Frankenstein et s'il se rembourse largement à l'international, ses recettes au box-office américain lui font payer sa folie des grandeurs (seulement 22 millions de dollars récoltés pour 45 millions de budget). Une contre-performance qui semble alors donner raison à ses nombreux détracteurs autant du côté de la presse que du public. Mais ne dit-on pas que les films les plus clivants sont aussi les plus fascinants ?

 

Frankenstein : photoLa main du vilain

 

C'EST VIVANT !

"J'ai occupé mon esprit à songer à une histoire qui parlerait aux craintes mystérieuses enfouies en notre nature et nous ferait palpiter de terreur. Une histoire telle que le lecteur serait épouvanté à l'idée de regarder autour de lui, une histoire à glacer le sang, à faire battre le cœur à coups redoublés", déclame une narratrice en voix off au début du film, redonnant vie à la parole de Mary Shelley l'espace d'un instant. Comme la créature de son roman, l'auteure semble ainsi revenir d'entre les morts et appartenir à son tour à la fiction. Une entrée en matière sous forme de mise en abyme qui séduit instantanément.

Quelques secondes plus tard, un navire surgit d'une mer démontée avant de s'échouer sur la banquise. On est en 1794 et l'expédition, menée par le capitaine Robert Walton, tombe sur un homme perdu en plein blizzard, le docteur Victor Frankenstein, joué par Branagh lui-même (oui, l'égo-trip est réel). L'équipage et par là même le spectateur l'écoutent alors raconter son histoire, de son idylle avec Elizabeth (Helena Bonham Carter, burtonienne avant l'heure) à sa passion pour les sciences, en passant par la création du monstre (Robert De Niro) et les conséquences terribles de ses actes.

 

Frankenstein : photo, Helena Bonham Carter, Kenneth BranaghAvant que tout ne bascule dans les larmes et le sang

 

S'il s'en tient dans les grandes lignes au texte de la romancière, le réalisateur imprime son style lyrique et flamboyant sur chaque photogramme du film. Parmi les astuces de mise en scène qu'il aime à répéter, de façon un peu systématique parfois, le travelling circulaire fait office de favori et traduit en un sens parfaitement le tourbillon tumultueux de l'existence. Les personnages peuvent bien danser, comme Victor et Elizabeth, ou se sacrifier, à l'image de la mère du docteur qui mettra au monde son petit frère avant de s'éteindre, la caméra, elle, continue de tournoyer autour d'eux, embrassant dans un même élan la vie et la mort, les joies et les peines.

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commentaires
Ray Peterson
31/10/2022 à 12:38

Adaptation un peu loupé pour moi et maquillage pas au top.
Par contre SPOILER la mort de Helena Bonham Carter est d'une violence inouïe !!!! END OF SPOILER
Reste une belle composition de Patrick Doyle, fidèle collaborateur du Brannagh.

Et je reste assez d'accord sur les commentaires ci-dessous, Brannagh a fait de très bonnes adaptations de Shakespeare et Ses Peter's Friend et Dead Again sont vraiment chouettes!
Après ses derniers films sont plus discutables....

Sanchez
30/10/2022 à 13:40

«@ankytos
Je trouve son cinema pompier à souhait , ses derniers films parfaitement inutiles en sont la parfaite démonstration. Et ce Frankenstein ridicule. Par contre c’est un excellent acteur.

EL laissez ce pauvre Burton tranquille.

Kyle Reese
30/10/2022 à 13:09

Perso j'avais beaucoup aimé. La fougue et l’énergie que Kenneth Branagh a mis dans son film sont assez excitant avec de belle envolés lyriques. Kitch peut être mais dans le bon sens du terme alors.

Ankytos
30/10/2022 à 12:00

@Sanchez
Marrant parce que pas du tout. Je vous invite à revoir la définition du nanar.
Quant à dire que Brannagh est un tâcheron, c'est juste drôle : quelques unes des meilleures adaptations du grand Shakespeare à l'écran (Henri V, Beaucoup de bruit pour rien, Hamlet), le sensible Peter's friend qui a été tant de fois imité, Dead again, etc, et bien sûr ce Frankenstein, ambitieux et qui nous dispense de la vision de la créature comme un gros dėbile, ce qui n'a rien à voir avec l'œuvre de Mary Shelley.
C'est vrai qu'il ne fait plus grand-chose d'importance depuis des années mais le traiter de tâcheron, surtout au vu de la production actuelle... tsss, tsss. Vous avez le droit (on a le droit de dire n'importe quoi) mais ce n'est pas raisonnable.
Pas grave, portez-vous bien.

Sanchez
30/10/2022 à 11:29

Juste un gros nanar réalisé par le tâcheron Branagh