La Cité de l'indicible peur : monstres, poivrots et robots tueurs... c'est toujours le film français le plus fou

Simon Riaux | 26 juin 2022
Simon Riaux | 26 juin 2022

Un Bourvil mythique, un automate meurtrier, un monstre et une bourgade bizarroïde : La Cité de l'Indicible peur, chef d'oeuvre halluciné de Jean-Pierre Mocky.

Légende gueularde et indépendante du cinéma français, Jean-Pierre Mocky est un franc-tireur dont la silhouette a parfois éclipsé les films. En témoignent les innombrables évocations ou portraits établis au tournant des années 2000, ressuscités après sa mort en 2019, où figurent en bonne place les images, truculentes, spectaculaires (mais rarement questionnées ou contextualisées) de ses coups de gueule homérique. OVNI, créateur inclassable autant qu'électron libre, on l'aura souvent réduit à sa propre caricature, tornade cocasse.

Peu avare en prises de position outrées, en fions cosmiques adressés à la profession, il éventra autant de vaches sacrées qu'il contribua à leur bâtir de temples. S'il devint progressivement une sorte de bouffon mi-sorcier mi-ogre, qui dévorait jusqu'à ses longs-métrages pour ne plus devenir qu'une mitraillette à bons mots, peut-être à son corps défendant, peut-être à son avantage, il est impératif de se remémorer ses films.

D'autant plus que ces derniers ont été plus souvent qu'à leur tour présenté comme des curiosités cramées du bulbe, de sympathiques nanars dans lesquels l'aristocratie du cinéma français se précipitait pour jouer, histoire de retrouver de vieilles bandes, de tuer le temps, ou de conjurer les ingratitudes d'une industrie oublieuse.

Mais Mocky était, fut, demeurera un filmeur à part entière. On lui doit quelques films à la noirceur et à l'acuité politique désarçonnantes, tels Solo (sorte de Get Carter franchouille et anar), ou À mort l'arbitre. Mais il en est un, demeuré longtemps invisible, qui peut prétendre au rang de chef d'oeuvre. C'est La Cité de l'indicible peur.

 

La Cité de l'indicible peur : photoTirer fort pour ouvrir

 

RA Y DE LUMIÈRE

Au commencement était Jean Ray, écrivain de génie et de Belgique, dont la postérité dans l'Hexagone fut le plus souvent cantonnée aux cercles littéraires. En plus d'innombrables contes, nouvelles et reportages, on lui doit plusieurs romans géniaux. Il opéra un grand-écart improbable entre la littérature gothique britannique, le surréalisme et le réalisme magique. Érudit et tordant volontiers la langue française (dans laquelle il rédige la majeure partie de ses textes), il navigue volontiers entre la veine symboliste et poétique méconnue d'un Lovecraft (Les Chats d'Ulthar) et l'influence de William Hope Hodgson. 

Un mélange détonnant qui lui vaudra parfois d'être qualifié d'Edgar Allan Poe belge. Une dénomination prestigieuse, mais qui ne doit pas étouffer la profonde singularité de ses travaux.

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commentaires
Karlito
28/06/2022 à 11:43

Un film avec une atmosphère très étrange, accentuée par un beau noir et blanc et de belles idées de mise en scène. Pour les curieux de lecture, je recommande "les contes du whisky" de Jean Ray :)

Pat Rick
27/06/2022 à 09:41

C'est à voir mais c'est loin d'être génial.

rientintinchti2
27/06/2022 à 01:18

Article très intéressant. Je vais essayer de le voir. Merci

Bubble Ghost
26/06/2022 à 18:10

Je ne suis pas un vrai spécialiste de la longue filmo de Jean-Pierre Mocky. Mais je sais qu'il a fait un autre film pas mal barré, avec aussi un agréable Bourvil sorti des sentiers battus. La Grande Lessive sorti en 1968. Je ne m'en lasserais jamais. Je vous le recommande. Pour moi, c'est patrimoine.

Mouais Bof...
26/06/2022 à 17:52

Pas encore vu depuis le temps.

Je sais ce que je vais me matter ce soir.

L'indien Zarbi.
26/06/2022 à 11:02

Une pépite.
Un grand Bourvil, lunaire et attachant.
Mon préféré de Mocky avec "À mort l'arbitre".