Les Immortels : le nanar antique improbable entre 300 et Gods of Egypt

Lino Cassinat | 23 juin 2022 - MAJ : 23/06/2022 18:50
Lino Cassinat | 23 juin 2022 - MAJ : 23/06/2022 18:50

Mieux qu'un nanar, un nanar en jupe. La preuve avec Les immortels, un péplum antique plus proche de Gods of Egypt que de 300 avec Henry Cavill et Mickey Rourke.

En 2006, Zack Snyder effectuait sa percée auprès du grand public avec 300, un long-métrage reconnu pour sa qualité technique, mais également controversé. Imagerie virilisto-beauf, racisme larvé, style esthétisant... autant de reproches qui ouvrent sur des débats passionnants et passionnés, mais qui ont tendance à ranger un peu trop rapidement 300 dans la catégorie des mauvais films aux yeux de certains. Ces gens-là n'ont jamais vu Les immortels de Tarsem Singh avec Henry Cavill et Mickey Rourke, qui n'est rien d'autre que le même film, mais en complètement raté de bout en bout.

 

Les immortels : photoZack qui ?

 

O TEMPORA, O MORES

En 2000, Gladiator ressuscite le péplum et tout le monde est content. Le genre manquait cruellement aux écrans et grâce à Ridley Scott il connaît un nouvel emballement. Troie, Alexandre... Même la télé s'y met avec Rome. Mais il est soudain télescopé par la popularité également grandissante des romans graphiques et leurs adaptations très... graphiques, justement. Sin City lance la mode, mais c'est le succès impressionnant de 300 qui l'ancre dans le paysage. Parti d'une veine réaliste, le péplum amorce un tournant définitivement plus kitscho-fantasy, très critiqué, mais aussi très rentable. Et c'est sur cette vague qu'entend surfer Les immortels.

Sauf que Les immortels n'a ni le savoir-faire de 300, ni l'ambition poétique de La Légende de Beowulf, ni la débauche de La Colère des Titans. D'ailleurs, contrairement à ces trois films, il n'a même pas non plus de matériau de base auquel se référer, si ce n'est la mythologie grecque dans son ensemble. Et cette mythologie va prendre très cher, car Les immortels n'a pour ainsi dire pas la moindre envie de raconter quoi que ce soit. L'histoire n'est d'ailleurs même pas adaptée d'un épisode mythique en particulier, et n'est de toute façon qu'un prétexte pour voir de gros types huilés se taper dessus en jupe. Même les vieux God of War passeraient pour du Eschyle (et encore, l'écriture du troisième opus est à réévaluer).

 

Les immortels : photoNon ce n'est pas un vrai Minotaure, ici c'est juste un gros type dans une armure moche

 

Nous aurons ainsi droit à une histoire complètement sortie du chapeau, mais surtout totalement nulle, de lutte entre le Bien et le Mal. Un programme aussi générique que son titre. Cette lutte est incarnée par Mickey Rourke d'une part, incarnant le roi Hypérion, souhaitant la destruction des Dieux pour une raison obscure, et par Henry Cavill d'autre part, incarnant Thésée, un bon petit fils à sa maman (curieusement très Clark Kent dans l'esprit) éduqué et entraîné depuis l'enfance par un Zeus incognito. Le dieu le prépare en effet pour le conflit prophétisé contre les Titans qu'Hypérion souhaite libérer, un conflit dont il est dit que Thésée sera la clé et dans lequel l'Olympe n'a officiellement pas le droit d'intervenir.

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commentaires
Chris11
27/06/2022 à 18:31

"une métaphore pas très subtile des délires d'Extrême-droite sur les migrants qui déferlent par millions sur la civilisation occidentale et blanche - of course. À se demander comment les ancêtres de tous ces Suprémacistes blancs sont arrivés aux Amériques. Ah oui, je me souviens, par bâteau, en massacrant tout et tout le monde et en reléguant les survivants autochtones au rang de clochards sans droit."

Bah disons qu'une grande partie des invasions s'est faite via la mer et les océans qui recouvrent 70% du globe (le Japon en Chine et en Corée, les vikings en Angleterre, les européens en Amérique comme tu le dis toi même, les romains en Afrique du Nord...). Ca s'appelle l'Histoire en fait.
Du coup, tout film historique ou non sur le prisme d'un attaquant qui arrive par la mer est une métaphore des migrants? C'est un peu nombriliste et stupide non?

Lino Cassinat
24/06/2022 à 18:03

@ Pi
Ah mais je nie rien de tout ça., je suis même bien au courant de tout ça Je pense comme vous que le système de représentations du film est très limite, d'ailleurs le fait que 300 soit une des plus grosses caisses de résonance de l'extrême droite en ligne (surtout aux US) n'est pas un hasard.

Mais je crois aussi que le film est beaucoup trop bête pour avoir un agenda politique construit, ça reste globalement une oeuvre cosmétique exécutée par un réalisateur qui a un talent technique indéniable pour construire des visuels marquants et des enchaînements d'action jouissifs. Un genre de gros délire orientalisant très benêt impossible à prendre au sérieux... mais qui a été récupéré assez sérieusement par l'alt-right.

Après il appartient à chacun de rejeter le film ou pas pour ces raisons... ou même de faire les deux en même temps parce que chaque individu est traversé de paradoxes et de contradictions.

Pi
24/06/2022 à 13:31

@Lino Cassinat - Rédaction

300, le film est une adaptation d'une oeuvre qui elle véhicule des stéréotype racistes et masculinistes. Frank Miller réécris l'Histoire pour la faire coïncider avec ses obsessions racistes.

300 est un film extrêmenent esthétique dans tous les sens du terme, marque de fabrique de Snyder. Il esthétise tout, même le pire et notamment la violence gratuite et complaisante. Et c'est bien le problème, parce qu'au final, ce divertissement véhicule des idées politiques et une vision du monde très réactionnaire et bipolaire, et c'est un euphémisme.

Les Perses sont présentés dans le comic et donc le film comme des méchants monstrueux et grotesques qui arrivent en hordes par mer - of course -, une métaphore pas très subtile des délires d'Extrême-droite sur les migrants qui déferlent par millions sur la civilisation occidentale et blanche - of course. À se demander comment les ancêtres de tous ces Suprémacistes blancs sont arrivés aux Amériques. Ah oui, je me souviens, par bâteau, en massacrant tout et tout le monde et en reléguant les survivants autochtones au rang de clochards sans droit.

À se demander si ce péché originel de l'Occident ne s'est pas ancré dans son inconscient collectif et lui fait redouter qu'un jour les dominés pourraient bien les balayer à leur tour de la surface du globe.

Bref, présenter les Perses comme des barbares voulant "grand remplacer" ces débiles de Spartes et leur société nationalistes et viriliste, c'est juste se foutre du fait historique pour tordre la réalité et la faire ressembler à ses fantasmes.

Quant à la réprésentation du corps masculiniste dans le film au travers de ce collectifs d'acteurs bodybuildés, c'est juste pathétique, et relève d'une vision primaire et simpliste de ce qu'est le corps masculin dans l'imaginaire de ces hommes qui pensent être des dominants naturels. Je parle de Miller, de Snyder et des spectateurs qui ont trouvé dans un spectacle un écho à leurs désirs les plus profonds.

Néanmoins, ça restera une oeuvre importante du 7ème art et la consécration pour Snyder de sa vision du cinéma.

Fox
24/06/2022 à 13:21

Cette contre-plongée finale sur un combat céleste dantesque augurait d'une suite complètement folle !
Malheureusement, ça n'a pas abouti.

Ce qui est le plus problématique dans ce film reste certains CGI, le tournage en fond vert permanent (alors que Tarsem avait su magnifier des décors naturels complètement fous dans The Fall) et la reprise quasiment à l'identique de la "forme 300" (ultra slo-mo, étalonnage ocre...). Du coup, ça donnait vraiment l'impression que la prod avait cherché à reproduire tous les éléments qui avaient fait son succès pour engranger un max de billets. Perdu !

Se réapproprier des mythes, légendes ou même des faits historiques ne me dérangent pas nécessairement (ça ne choque personne que Braveheart soit complètement à côté de la plaque de la véracité historique !), il faut juste le faire avec le coeur. Et je pense que, dans les Immortels, au-delà de l'opportunisme flagrant des prods, Tarsem arrive parfois à montrer qu'il a envie de s'amuser (d'ailleurs, c'est pour moi son dernier bon film. Oui, oui : j'ai dit "bon" !).
Les Dieux de la scène finale, jeunes, beaux, à l'armure rutilante... : n'est-ce pas une idée possible qu'on pourrait se faire de la "perfection divine" (plutôt qu'un vieux barbu) ? J'ai trouvé ce parti-pris intéressant qui tranche vraiment avec l'idée habituelle qu'on se fait des divinités helléniques. Et ça contraste même méchamment avec la scène qui s'ensuit d'ailleurs !

Pas parfait, de la repompe sur la forme, mais c'est généreux et parfois même beau !

Lino Cassinat
24/06/2022 à 11:02

@T.
Attention à force de dire des âneries sur ce que je pense vous pourriez vous mettre à braire.

Guepard
24/06/2022 à 08:30

Se film n'est pas construit comme gladiateur par exemple sa ses claire , le début m'aver donner envie de stopper le film , mes frenchement sa se laisse regarder , la scène avec les dieux en or est juste mitique , il invente, il se loupe , pour moi loin d'être un nanard ses un film à regarder qui a pour lui une bonne imagination

T.
23/06/2022 à 23:26

"Pour le dire vite, je dirais pour ma part que le film 300 n'est pas animé par une idéologie raciste, mais l'imaginaire qu'il charrie dans son sillage est par bien des aspects vraiment limite - et toute la nuance est là, entre idéologie (= expression consciente d'un propos politique clair et verbalisé, ce que le film n'a pas) et imaginaire (= expression d'un inconscient individuel ou collectif produisant des images et des mythes et mettant en oppositions des entités pour produire des valeurs voire de la morale, et oui c'est une matière beaucoup plus élastique et complexe)."

Et bah ça fait beaucoup de mots inutiles pour pas avoir à dire que comme le casting est pas multicolore du côté des spartiates ça vous a pas plu (et pourtant ça respecte une certaine cohérence historique, et Snyder est loin de ne pas mettre en avant toutes les diversités dans ses films).

Lino Cassinat
23/06/2022 à 20:41

@Jason Bourne

Peut-être que mon intro n'était pas claire, mais c'est une liste de reproches souvent adressés à 300, pas l'expression d'une opinion de la rédaction (qui est d'ailleurs je crois assez partagée sur ce film mais j'ai pas fait de sondage), ni de ma propre opinion.

Cela dit je ne vais pas me cacher derrière mon petit doigt et vous répondre quand même : pour moi, c'est à la fois un reproche que je trouve un peu "facile" et en même temps je comprends tout à fait d'où il vient et le trouve légitime. Pour le dire vite, je dirais pour ma part que le film 300 n'est pas animé par une idéologie raciste, mais l'imaginaire qu'il charrie dans son sillage est par bien des aspects vraiment limite - et toute la nuance est là, entre idéologie (= expression consciente d'un propos politique clair et verbalisé, ce que le film n'a pas) et imaginaire (= expression d'un inconscient individuel ou collectif produisant des images et des mythes et mettant en oppositions des entités pour produire des valeurs voire de la morale, et oui c'est une matière beaucoup plus élastique et complexe). Je précise par ailleurs qu'en ce qui me concerne, ça me peine de dire ça parce qu'à la base j'aime plutôt bien 300. Je prends le temps de vous répondre plus complètement en arrivant devant un ordi, la question est très intéressante et là sur mon téléphone dans un RER c'est un peu pénible.

BOUH
23/06/2022 à 20:25

C'est un très bon film, je ne suis pas d'accord. L'un des meilleurs de ces dernières années sur la mythologie. A voir et à revoir, de très bons acteurs et une superbe mise en scène

Chris11
23/06/2022 à 20:23

Le film ne m'a pas laissé de souvenir particulier, hormis la scène finale de baston entre les dieux en jupette et les titans qui s'échappent de la cage. Violence crue et brute, des morts des deux cotés, j'ai surkiffé. Rien que pour cette scène le film est à voir.

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