Spider-Man, Dune, Justice League... les meilleures BO de 2021

La Rédaction | 22 janvier 2022
La Rédaction | 22 janvier 2022

Les BO de Spider-Man, Dune, Justice League, Annette... Les 20 meilleures musiques de films, de séries et de jeux vidéo de 2021.

Dans l'open space comme en télétravail, une bonne partie de la rédaction d'Ecran Large a l'habitude de rédiger ses articles primesautiers en cherchant l'inspiration du côté des bandes-originales. Quoi de mieux pour parler de cinéma, de séries ou de jeux vidéo que d'emplir ses oreilles des douces notes qui accompagnent les sorties du moment ?

Indépendamment de notre avis sur les œuvres qu'elles soutiennent, voilà donc notre top 20 des BO les plus marquantes de 2021 (sans ordre de préférence), classement dont la variété n'a d'égal que la passion qui l'anime. On précise cependant que bande-originale implique une création pour le film, la série ou le jeu vidéo concerné, ce qui exclut toute playlist tarantinesque, aussi stylée puisse-t-elle être.

 

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Dune

C'était la BO incontournable de 2021. L'une des plus attendues, entendues, et donc débattues. Dune était un vieux fantasme pour le réalisateur Denis Villeneuve, qui rêvait d'adapter les livres de Frank Herbert depuis sa jeunesse, et ça l'était également pour Hans Zimmer. "Ce qui m'a vraiment décidé, c'est Denis, simplement en prononçant le mot Dune. Ça m'a renvoyé à mes 13 ans", disait-il à ReelBlend. Dune vient donc d'un endroit de pure passion, à tel point que Hans Zimmer a lui-même composé la reprise d'Eclipse, des Pink Floyd, pour la bande-annonce - chose rare à Hollywood, où des boîtes spécialisées composent souvent ces morceaux de pure promo, ensuite oubliés. Et au passage, il a refusé Tenet de Christopher Nolan pour aller sur Arrakis.

Considéré par beaucoup de monde comme le meilleur des compositeurs ronflants depuis des années, la faute à un certain nombre de BO peu inspirées et tournant en rond, Hans Zimmer a parfois retrouvé la grâce de ses grands moments (Man of Steel, Interstellar, voire X-Men : Dark Phoenix). Blade Runner 2049 en faisait partie, et ses retrouvailles avec Denis Villeneuve ont été à la hauteur.

Les deux hommes voulaient d'emblée une musique qui ne ressemble à rien d'autre (et certainement pas à la très belle BO du Dune de Lynch, par Toto). Une musique abstraite et sans orchestre selon Zimmer, à la croisée du western et de la science-fiction, avec des notes inattendues (les cornemuses pour la Maison Atréides : une idée de Villeneuve). Il suffit d'écouter Paul's Dream pour sentir cette soif de sons et sensations, qui donne le tournis : sept minutes riches et épiques, tour à tour lyriques et guerrières, où s'affrontent voix, percussions, violons et guitares électriques, avec en plus une rupture de rythme au milieu. Oui, on l'a écoutée en boucle en écrivant nos articles sur ce film.

Notre critique du film Dune

 

 

Sable

Encore des dunes dans Sable, jeu vidéo du studio Shedworks, imaginé par Daniel Fineberg and Gregorios Kythreotis comme un immense et magnifique hommage à Moebius. Pour bercer les aventures de l'héroïne (la dénommée Sable), Michelle Zauner alias Japanese Breakfast a été choisie. Et pour la musicienne qui a grandi avec Nintendo et PlayStation, c'était une occasion en or, notamment pour rendre hommage à son jeu fétiche, Secret of Mana.

Avec comme point de départ quelques visuels et éléments sur l'univers, Michelle Zauner (en collaboration avec le sound designer Martin Kvale) a ainsi composé une BO planante, qui peut discrètement tourner en boucle pendant le jeu. De quoi permettre à l'esprit d'être envoûté pour glisser, tandis que Sable explore les dunes et les ruines au fil d'une aventure pas comme les autres, puisque tout repose sur l'exploration et l'émerveillement, sans combat ni objectif classique.

Un peu comme un Disasterpeace sur Fez (une BO fabuleuse), Michelle Zauner a ainsi créé une bulle musicale étonnante, quelque part entre Final Fantasy et Emilie Simon (pour le très beau morceau Glider), qui donne envie de planer comme Sable dans sa bulle.

 

 

Les Olympiades

Face à l'architecture brutaliste de la dalle du 13e arrondissement, les notes de Rone sonnent tout de suite comme une évidence. À partir de synthés aériens, le compositeur capte à la perfection le cocon de Jacques Audiard, jusqu'à ce que l'acidité de ses sonorités électro vienne magnifier le tourbillon émotionnel de personnages en quête de sens dans cet espace si particulier de Paris.

Qu'elle s'amuse avec les voix, le piano ou le violoncelle, la musique des Olympiades est un terrain d'expérimentation fascinant, dont l'écoute isolée fait encore plus ressortir son énergie démente. Traitant Paris comme une immense toile connectée, où les corps et les esprits se croisent, Rone pense ses morceaux comme un ensemble de plans larges et de gros plans, alternant par ses instrumentalisations l'échelle plus ou moins intime du récit (on pense notamment au piano étouffé de Camille & Emilie).

C'est d'autant plus impressionnant que le musicien n'a eu qu'un petit mois pour composer l'ensemble de cet album pour Jacques Audiard. En tout cas, derrière ce travail intense, il y a une alchimie évidente entre les images du cinéaste et cette BO.

Notre critique du film Les Olympiades

 

 

Zack Snyder's Justice League

Quoi qu'on pense du Snyder Cut de Justice League, il demeure une petite aberration industrielle, offrant à son démiurgique auteur la possibilité de repenser un projet dont on l'a dépossédé. Parmi les immenses ratés du montage de 2017, on est obligé de prendre en compte la bande-originale ubuesque de Danny Elfman, qui s'est amusé à mélanger n'importe comment les thèmes des héros DC issus des précédentes itérations cinématographiques.

Dès lors, Zack Snyder a pu de nouveau faire appel à Tom Holkenborg (plus connu sous son nom de scène Junkie XL) pour offrir un écrin à la mesure de cette titanesque réécriture. Le compositeur, viré comme un malpropre en 2017, a jeté à la poubelle tout ce qu'il avait déjà créé. Ce retour à la case départ a sans doute été bénéfique, car l'artiste ne s'était pas montré aussi inspiré depuis Mad Max : Fury Road.

Entre la brutalité de ses percussions, ses guitares électriques saturées et les élans lyriques de ses plages orchestrales, la BO de Zack Snyder's Justice League est une proposition hautement généreuse, à la hauteur de ce grand fourre-tout mythologique de l'univers DC. Aux côtés d'un thème principal à la montée d'octave magistrale (The Crew at Warpower), il est impossible de ne pas citer At the Speed of Force, dont le riff de guitare lointain et entêtant sublime par un ostinato monstrueux la meilleure scène du film : la remontée du temps par Flash. Frissons garantis ! 

Notre analyse détaillée de la bande-originale de Zack Snyder's Justice League

 

 

 

Loki

Des samples de tic-tac d'aiguilles, quelques instruments venus de Scandinavie et de superbes aplats de synthétiseurs analogiques : pas de doute, la bande-originale de Loki se plaît à représenter le melting-pot culturel invoqué par la série pour se créer une identité musicale unique. En collant à une ambiance kafkaïenne et mystérieuse, Natalie Holt façonne une musique aussi facétieuse que le personnage de Tom Hiddleston.

Pour autant, l'artiste n'en oublie jamais une certaine gravité, laissant à ses instruments acoustiques la place qu'il faut pour embrasser la crise existentielle d'un anti-héros coincé dans le temps et l'espace. Mais surtout, Holt accorde petit à petit sa partition aux envolées cosmiques du récit. Si les fluctuations étranges du thérémine ont accompagné la science-fiction depuis les années 50, la compositrice a su réinvestir l'instrument avec brio, au point d'en faire la cerise sur le gâteau d'une BO inventive, et dont il est plaisant de décortiquer les diverses sonorités de son orchestration.

Notre vidéo bilan sur la série Loki

 

 

 

The Power of the Dog

Jonny Greenwood avait déjà prouvé loin de Radiohead qu'il était un grand compositeur de musiques de film grâce à ses multiples passages chez Paul Thomas Anderson depuis There Will Be Blood. Et justement, s'il a marqué le western moderne de PTA en 2007, il a donné un peu plus d'ampleur à celui de Jane Campion dans le puissant The Power of the Dog.

Difficile de véritablement décrire la musique du film, jouant énormément des cordes pour accentuer la tension (l'élancé Prelude), l'atmosphère de plus en plus inquiétante du récit (Best Friends semble tout droit sorti d'un film noir lorgnant vers l'épouvante) et les retournements stridents à travers des partitions volontairement chaotiques pour bien signifier le trouble des protagonistes (l'étrange Paper Flowers).

Mais il suffit d'entendre 25 Years pour mesurer instantanément la beauté de cette compositionOuvrant le long-métrage, les notes de banjo s'accommodent parfaitement à l'ambiance du western, le rythme des notes accompagnant doucement le trot des chevaux avant de laisser résonner des sons moins doux pour annoncer l'ambiance plus grave à venir. Le moyen de glisser le spectateur dans The Power of the Dog, et de presque lui donner les clés du métrage, en seulement quelques secondes.

Notre critique du film The Power of the Dog

 

 

Don't Look up : Déni cosmique

Lors de la composition de cette liste, il s'est posé la question de Nicholas Britell, derrière nombre des plus belles partitions de cette année 2021 entre son retour à la barre de la série Succession, ses retrouvailles avec Barry Jenkins pour la sublime série The Underground Railroad voire son travail très plaisant sur le fade Cruella. Alors comme on voulait éviter qu'il prenne la moitié des spots de cette liste, on a choisi de parler uniquement de sa composition sur Don't Look Up : Déni cosmique.

D'autant plus qu'il s'agit d'une de ses créations les plus originales, véritable challenge l'obligeant à mêler des sonorités totalement opposées pour mieux rendre compte de la folie du récit. Ainsi, Nicholas Britell offre une partition très éclectique, jonglant savamment entre un orchestre classique (le sublime The Comet Appears), des sons plus électroniques (BASH Corporate Ident - "Liif"), des chansons inédites (délirant Just Look Up avec Ariana Grande et Kid Cudi ou frissonnant Second Nature avec Bon Iver) et surtout de nombreuses mélodies jazzy.

En jouant essentiellement avec son thème principal (Don't Look Up - Main Theme) qu'il module en fonction des situations dans lesquelles se retrouvent les personnages, l'Américain parvient alors à accompagner les émotions des spectateurs entre le clownesque My Boyfriend Broke Up With Me, le simple téléphonique On Hold ou le déchirant Thanksgiving (Overture To Logic And Knowledge). Difficile donc de choisir un seul titre, mais It’s A Strange Glorious World est peut-être celui qui contient le plus l'essence de cette bande-originale entre élan de folie et pause placide.

Notre critique du film Don't Look Up

 

 

Belle

Puisque Belle prolonge et réadapte les thèmes de Summer Wars, la bande originale devait au moins être au même niveau, et c’est peu de dire que c’est le cas. Moins guillerette que sa grande soeur, elle s'adapte aux univers virtuels contemporains, à la fois profondément mélancolique et technologique, sans jamais se laisser paraître noyée sous les promesses d'évasion.

L'album est généreux, c'est le moins qu'on puisse dire, et ce dès le premier morceau, l'entraînant U, emprunt au collectif Millenium Parade, et renvoi supplémentaire et réjouissant au Paprika de Satoshi Kon. Ludvig Forssell et Taisei Iwasaki assurent derrière avec une flopée de pistes très différentes les unes des autres et pourtant très cohérentes. Navigant entre le pur émerveillement (Dragon's Lair), la mélodie attachante (Distrust) et une électro minimaliste qu'on croirait sortie de l'imagination de Trent Reznor et Atticus Ross (Unveil the Beast), la musique épouse les contours d'un monde mi-naturel mi-numérique, avec une grande délicatesse.

Mais les tubes restent évidemment les morceaux chantés, tous incroyables, qu'il s'agisse de l'explosif A Million Miles Away, développant dans sa structure même le parcours de l'héroïne ou les multiples variations intimes du très touchant Lend Me Your Voice. La voix de Kaho Nakamura, très puissante, reste en tête aussi longtemps après l'écoute du long album qu'après le film.

Notre critique du film Belle

 

 

Annette

Évidemment, Annette doit beaucoup au talent de metteur en scène de Leos Carax, aux interprétations sublimes de Marion Cotillard et Adam Driver et aussi à la sublime photographie de Caroline Champetier, mais il ne serait rien sans la partition des Sparks. Car si le musical a tant réussi à emporter, c'est avant tout grâce à leurs musiques capables d'entraîner les personnages, d'élever le récit et de conquérir les coeurs.

Ce n'est évidemment pas anodin si le long-métrage débute par So May We Start, invitation des interprètes à nous faire entrer dans leur danse, dans leur monde. Et tout son long, Annette continuera par à coups à s'adresser aux spectateurs pour mieux les intégrer au jeu se déroulant sous leurs yeux, de cette confession déchirante du chef d'orchestre incarné par Simon Helberg (The Conductor) au grand final conviant le public à partager son expérience avec le reste du monde, amis ou inconnus (It's The End).

En jouant des tonalités (l'effrayant Premiere Performance of Baby Annette précédant l'aérien Baby Aria ; le tragique We've Washed Ashore précède le miraculeux Baby Aria (The Moon) avant d'être suivi du fantomatique I Will Haunt You, Henry), la musique mélange les genres en passant de la romance à la tragédie, de l'opéra au rock'n roll, de la grâce à la malveillance. Une dualité qui vient trouver son apothéose dans le puissant Sympathy for the Abyss unissant la voix grave d'Adam Driver à la pureté enfantine de l'interprète d'Annette. Magique.

Notre critique du film Annette

 

 

The Artful Escape 

Plus qu’un jeu de plateforme 2D diablement bien conçu, The Artful Escape est une expérience visuelle et sonore qui ne ressemble à aucun autre jeu vidéo. Édité par l’écurie Annapurna Interactive, et développé par Beethoven & Dinosaur (prix spécial du meilleur nom de studio), le titre repense le concept de comédie musicale et d’opéra rock pour en faire une odyssée sensorielle unique.  

Lointain écho de l’épopée d’un certain Ziggy Stardust, le jeu met le joueur dans la peau de Francis Vendetti, neveu d’une légende de la musique folk. Lui-même musicien, il souffre d’un héritage bien trop lourd à porter, et à la veille de son premier concert, il se lance dans un voyage géographique et initiatique pour trouver son identité musicale.

L'OST composé par Johnny Galvatron et Josh Abrahams (deux figures du rock indépendant australien) constitue son cœur et sa colonne vertébrale. Le récit initiatique est guidé par la découverte de différents genres musicaux par le héros, de la folk délicieusement 70s de son oncle (The Banks of the River are Lined with Gold, belle à pleurer) aux expérimentations électroniques perchées (Alien Disco) ou le space-rock le plus épique (le solo de The City of Glimmer qui aurait pu sortir de l’esprit de Brian May). Une odyssée résolument rock qui se termine dans un immense spectacle de sons et lumières homériques. Assurément le plus grand concert de l’histoire du jeu vidéo. 

Notre article sur les meilleures annonces récentes de l'éditeur Annapurna Interactive

 

 

 

The Suicide Squad

Si James Gunn est devenu depuis Les Gardiens de la galaxie le roi de la playlist pop, on ne peut pas dire que les bandes-originales de ses films soient aussi inoubliables. Pourtant, le bougre vient de changer la donne avec son génial The Suicide Squad, en réveillant de sa léthargie John Murphy, qu'on n'avait pas vue autant en forme depuis sa BO mythique pour Sunshine.

Le compositeur accorde ainsi l'esprit de sale gosse du film avec un riff de guitare électrique bien vénère, socle solide à diverses expérimentations instrumentales. Face à la richesse de la mise en scène de Gunn, bouillon de pop-culture régurgitant avec malice les comics qui l'ont inspiré, la BO de The Suicide Squad se montre toute aussi inventive, sans jamais oublier le cœur émotionnel du récit.

Ainsi, derrière la frime supposée de sa démarche, la musique se permet, à l'instar du métrage, des pas de côté inattendus, de ceux qui cueillent le spectateur au moment où il s'y attend le moins. En témoigne le morceau Ratism, rock touchant et mélancolique porté par un chœur d'enfants, pour accompagner avec brio le climax du film, et le parcours dément de ses personnages.

Notre critique du film The Suicide Squad

 

 

 

Bo Burnham : Inside

Comme on l’a vu avec Songbird, Locked Down, Connectés, Borat 2 ou 8 Rue de l’Humanité, la pandémie et le confinement n’ont pas tardé à inspirer les réalisateurs et scénaristes, mais peu d’oeuvres ont traité la crise sanitaire mondiale avec autant de justesse, de sensibilité et de groove que l’Américain Bo Burnham. Pour son nouveau Special, Bo Burnham : Inside, l’artiste - au sens large du terme puisqu’il est comédien de stand-up, auteur-compositeur-interprète, musicien, rappeur, acteur, réalisateur et scénariste - a écrit et produit entièrement seul un album de 20 titres pour extérioriser ses démons enfouis et faire un état des lieux du monde en musique après une année d’isolement complet. 

Sur des accords de piano mineurs discrets, des sons régressifs à la Sesame Street, des notes électro aux tendances rock ou des synthés pop plus rétro, il se sert de sa plume acérée pour asséner des vérités crues sous une forme légère et moqueuse en apparence inoffensive. En passant d’un rythme enjoué à des tonalités plus graves et un tempo plus lent, ses mélodies s’adaptent cependant à ses différents états d’esprit pour les illustrer plus que simplement les accompagner.

Et même si certaines partitions semblent assez basiques dans leur construction musicale, la plupart est diaboliquement entêtante, comme la chanson Welcolme to the Internet et sa fin frénétique (pour ne citer qu'elle). Les différents titres de l'album étaient d'ailleurs disponibles sur les plateformes de streaming, mais vont également être gravés sur vinyle, donnant un peu plus de poids et de légitimité à la création de l'inventif Bo Burnham.

 

 

Spider-Man : No Way Home

On ne le dit jamais assez, mais dans le domaine de la musique de film, Michael Giacchino demeure le compositeur le plus impressionnant de ces vingt dernières années. Et même sur l'exercice souvent peu mémorable des films Marvel, l'artiste sait se démarquer, que ce soit par les sonorités orientales et le clavecin de Doctor Strange, où les cordes piquées symbolisant l'insouciance du Spider-Man de Tom Holland.

Dès lors, en retrouvant Jon Watts sur le final pétaradant de la nouvelle trilogie dédiée à l'Homme-Araignée, Giacchino a l'opportunité de signer un album proprement orgasmique. La présence de Doctor Strange lui permet de mixer toutes ses créations passées pour le MCU (notamment dans le génial morceau d'action Sling vs Bling), tout en ayant le défi de devoir rameuter les thèmes des personnages venus d'autres "dimensions". Cette démarche casse-gueule est pourtant transcendée par la maîtrise que Giacchino a de son orchestre. Il suffit de voir comment la piste Shield of Pain réinvestit deux leitmotivs nostalgiques avec une fluidité qui hérisse les poils sur l'épiderme.

Mais surtout, l'artiste a eu l'intelligence de penser à l'évolution du Spider-Man de Tom Holland sur le long terme. Faisant évoluer son thème léger et sautillant d'opus en opus, le compositeur lui offre ici plus de gravité, et alterne habilement ses élans épiques (Liberty Parlance) et de déchirants instants plus intimes au piano et violoncelle (Exit Through the Lobby). D'une bien meilleure manière que la mise en scène de Jon Watts, Michael Giacchino croque avec justesse le passage de Peter Parker vers l'âge adulte.

La sublime suite finale de Spider-Man : No Way Home, intitulée Arachnoverture, assemble justement toutes ces variations pour en souligner le génie. Tout simplement l'une des BO les plus fondamentales du Marvel Cinematic Universe !

Notre critique du film Spider-Man : No Way Home

 

 

 

Candyman

La musique du nouveau Candyman s'est taillé une place inattendue dans la course aux Oscars, et tant mieux : la BO composée par Robert A. A. Lowe (alias Lichens, artiste performeur adepte de l'improvisation en live) mérite une deuxième écoute, tant elle respire l'angoisse, l'étrangeté et donc, le talent. Ce qui est d'autant plus fort qu'il passe après le génie Philip Glass, compositeur du film culte de 1992.

Voix distordues et entêtantes, sons d'instruments à vent et basses vibrantes, notes de piano faussement douces et synthés enivrants : la musique de Candyman embrasse la nature de conte horrifique de l'histoire pour s'échapper des codes du genre, et créer une pure atmosphère où même le quasi-silence devient une source de malaise.

La nervosité de The Sweet crée une boucle infernale, qui annonce la couleur dès le générique du film, pour résonner jusqu'à la fin. La douceur de Music Box (très belle reprise du morceau de Philip Glass) mute en discrète agonie à venir. Et des morceaux comme Brianna’s Mirror Dream ou Brianna Says His Name, plus simples et épurés, contiennent de petites touches d'étrangeté, pour sans cesser surprendre et stimuler l'imaginaire - notamment en jouant sur la frontière entre musique et bruitages. Une BO remarquable donc, qui mérite (comme le film) plus d'attention.

Notre critique du nouveau Candyman

 

 

Le Sommet des dieux

Comme on le disait dans notre critique, Le Sommet des dieux est un régal pour les yeux, mais pas uniquement. Pour l’adaptation du manga de Jiro Taniguchi, le réalisateur et scénariste Patrick Imbert a fait appel au compositeur Amine Bouhafa qui avait déjà signé les partitions de Timbuktu - pour lequel il a remporté le César de la meilleure musique originale - et plus récemment derrière la musique de la chanson Ya Tara de Gagarine (présent dans notre top des meilleurs films de 2021). 

Pour accompagner la périlleuse ascension des alpinistes, l’artiste livre une bande-originale discrète et contemplative, qui souligne la puissante aura de la montagne et sa majestuosité tout en renforçant l’immersion sensorielle avec un souffle épique et romanesque. Les choeurs lointains participent également à cette dimension éthérée, tandis que les sonorités plus asiatiques renouent avec l’héritage de l’oeuvre sans tomber dans la caricature ou dénoter avec le reste des accords. La bande-originale présente également des morceaux plus oppressants constitués de notes stridentes de cordes et de percussions pour illustrer le danger et le vertige que les sommets représentent pour les hommes, et ainsi faire monter la tension à des moments choisis.

Notre critique du film Le Sommet des dieux

 

 

Being the Ricardos

Toujours au top dans l'expérimentation musicale, Daniel Pemberton s'impose au fil des ans parmi les compositeurs en activité les plus importants. Depuis Steve Jobs, le bonhomme est même devenu le nouveau chouchou d'Aaron Sorkin, qu'il a accompagné sur ses deux premiers passages à la réalisation : Le Grand jeu et Les Sept de Chicago.

Avec Being the Ricardos, anti-biopic ultra-malin sur Lucille Ball et sa mythique sitcom I Love Lucy, le duo se retrouve pour une plongée dans les coulisses d'Hollywood. Jamais prompt à se contenter de l'évidence, Pemberton alterne ici entre l'ampleur d'un orchestre symphonique et des incursions plus jazzy, où la basse et les percussions prennent l'ascendant. Cette démarche s'amuse d'un côté avec des aplats de cordes et de cuivres hérités de l'âge d'or hollywoodien, et de l'autre avec une rythmique plus endiablée, soulignant la panique qui s'empare du studio durant cette folle semaine dépeinte à l'écran.

De cette façon, Daniel Pemberton trouve une opportunité exquise de lier sa musique à l'intériorité des personnages, notamment aux vives pensées de Lucille Ball et son tempo comique que Sorkin matérialise à l'image. En bref, face au montage si particulier du roi du dialogue, Pemberton gagne de plus en plus d'assurance, jusqu'à atteindre ici une harmonie impressionnante.

Notre critique du film Being the Ricardos

 

 

 

Bad Dreams

Omniprésente, la musique contribue largement à l'ambiance onirique qui émane de ce génial Bad Dreams. On la doit à un trio de rêve, formé par Pilotpriest, alias le réalisateur Anthony Scott Burns, musicien talentueux qui peut ainsi garder une main-mise sensorielle complète sur sa création, et les géniaux Electric Youth, qui l'ont en plus autorisé à remixer deux de leurs morceaux, Modern Fears et Runaway.

Pour peu qu'on soit encore ému par l'expérience complète, l'album s'écoute d'une traite. Ses plages électroniques, tantôt angoissantes, tantôt émouvantes, happent directement, et ce dès le thème principal composé par Electric Youth, l'hypnotisante balade Coelocanth. Globalement, le duo s'occupe de la plupart des partitions élégiaques, tandis que Pilotpriest expérimente avec ses ambiances inquiétantes (Title), plus tendues (Nothing), entendues pendant les longs travellings avant cauchemardesques qui parsèment le film.

L'implémentation de la voix hypnotisante de Bronwyn Griffin (y compris sur la piste éponyme), qui entonne presque des berceuses, tient du coup de génie, autant que l'utilisation de synthétiseurs légendaires, représentant musicalement la science-fiction très rétro-futuriste de l'univers de Come True (titre original). Assurément l'un des plus beaux scores électroniques récents, qu'on ne se lasse pas d'écouter en attendant de revoir cette petite pépite.

Notre critique du film Bad Dreams

 

 

La Brigade des 800

L'énorme blockbuster chinois, aussi spectaculaire qu'il est capable de nuancer son propre patriotisme, venait accompagné d'une bande-originale à sa mesure, c'est-à-dire carrément épique. Composée par Andrew Kawczynski (chargé des musiques additionnelles sur de nombreuses productions hollywoodiennes), épaulé par l'Anglais Rupert Gregson-William, la partition assume de se placer dans le sillage des mastodontes cacophoniques de l'oncle Sam. 

Kawczynski s'inspire évidemment de son collaborateur régulier Hans Zimmer (qu'il a secondé sur certains de ses films les plus célèbres, dont plusieurs réalisés par Nolan) et accompagne 200 musiciens de grosses percussions, particulièrement adaptées au chaos héroïque du long-métrage. Pourtant traversée par quelques influences locales, la musique semble à première vue aussi indigeste que celle de certaines superproductions hollywoodiennes. Toutefois, elle prend définitivement aux tripes quand elle développe ses quelques thèmes principaux et les développe dans de grands crescendos.

Before the Dawn en est un brillant exemple, tandis que Take Cover et True Heroes se chargent - avec brio - d'exporter ces mélodies furieusement désespérées dans la cohue des combats. Impossible également de ne pas retenir Last Stand, envolée peu subtile, mais ultra efficace, soit le maître mot de cet album réjouissant.

Notre critique du film La Brigade des 800.

 

 

Ride Your Wave 

Même si elles sont douces et harmonieuses, les créations de la compositrice Michiru Oshima pour Ride Your Wave ne sont pas forcément d’une grande variété et restent plutôt accessoires dans la narration. Mais qu’importe puisque la musique la plus importante est Brand New Story, un titre original interprété par GENERATIONS from EXILE TRIBE et écrit pour servir de thème principal au long-métrage animé de Masaaki Yuasa. 

Pensée comme un tube de radio estival enjoué, mais finalement assez quelconque et commerciale, la chanson se charge progressivement d'émotivité, de tendresse, de complicité et de gaité quand elle est reprise par les deux personnages principaux, dont l’un deux est doublé par Ryōta Katayose, un des membres du boys-band japonais. En plus de faire partie intégrante du scénario et de leur relation amoureuse, la chanson reflète également l’évolution des sentiments d’Hinako face au deuil.

Cette même musique, à laquelle l'histoire prête indirectement des vertus fantastiques, devient alors de plus en plus triste et nostalgique, jusqu’à ce que les premières notes entêtantes qui mettaient en joie deviennent profondément dramatiques et provoquent quelques montées de larmes (et pas seulement d'un côté de l'écran). Un revirement émotionnel qu'on n'avait pas vu entendu venir au début du film.

Notre critique du film Ride Your Wave.

  

 

Nier Replicant VER.1.22...

Si à l’évocation de musique de JRPG, on pense immédiatement aux icônes Nobuo Uematsu (Final Fantasy) ou Yasunori Mitsuda (Chrono Trigger), on ne saurait jamais assez louer l’œuvre de Keichii Okabe, bourreau de travail ayant composé plus d’une cinquantaine d’OST en 30 ans de carrière (Tekken, Ridge Racer…). Sa collaboration avec Yoko Taro, créateur de NieR Replicant ver.1.22, a débuté sur Drakengaard 3, et depuis les hommes ne se lâchent plus.

NieR Replicant ver.1.22 a permis à une nouvelle génération de joueurs de découvrir l’un des plus grands chefs-d’œuvre du RPG (originellement sorti sur PS3/Xbox360 et honteusement passé sous les radars). À l’occasion de la sortie de ce remaster HD, la bande-originale d’Okabe a eu droit à de nouveaux arrangements qui subliment le matériau d’origine (la nouvelle version de Kainé est bien plus lumineuse et touchante). La marque de visite d’Okabe, les chœurs aux voix cristallines, qu’il prend un malin plaisir à mêler à des cordes mélancoliques et à des percussions martiales, tirent des larmes à coup sûr.  

 

 

Une refonte bienvenue, qui offre l’une des plus belles OST de toute la saga NieR, largement à la hauteur de celle d’Automata. Épique, émotionnelle, bouleversante de bout en bout, cette BO est un sans-faute. Un must have pour tout amateur de musique et de RPG, où n'importe quelle chanson ne manquera pas de toucher en plein cœur. À moins de ne pas avoir d'âme.

Tout savoir sur Dune

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commentaires
Eusebio
23/01/2022 à 10:57

Merciiiiiii pour ce super article !! Des choix que je partage, et de belles découvertes qui donc m'attendent. Je vous kiffe !
Je ne l'aurais peut-être pas mis non plus dans les meilleures bo de l'année, mais celle de Shang-Shi, de Joel P West, a été une très bonne surprise pour moi (face à, comme vous dites, l'aspect peu mémorable des compos du MCU) ; bonne dose de percu entraînantes, orteils qui frétille et une couleur locale bien kitsch délicieusement jouissive. Mon petit guilty pleasure de l'année ! :)

Emynoduesp
22/01/2022 à 18:20

A part Justice League, je n en ai entendu aucune...Donc Junkie XL gagne haut la main.
Non, en fait il faudrait que je re regarde le film. Mais une chose m horripile et me fait sortir du film a chaque fois, c est le euh...comment appeler ca, les choeurs amazones, ca revient trop souvent et je trouve ca pas terrible du tout en fait.

T.
22/01/2022 à 18:04

Pourquoi mon commentaire a été supprimé Ecran large ?

Ais je dis quelque chose qui vous as offensé en disant que j'aime les compos japonaises ? -_-'

Scarface666
22/01/2022 à 17:16

Le remix de Modern Fear dans Come True dépasse l'original, même.
Une pure tuerie <3

Rakis
22/01/2022 à 14:05

Bel article qui ouvre des horizons sur un univers que j'adore et que je trouve moins marquant depuis pas mal d'années (avant, je sortais fréquemment d'une salle marqué par la musique qu'il me fallait à tout prix acheter, maintenant, c'est beaucoup moins fréquent). Perso, j'ai été très déçu par le score de Zimmer pour Dune, film que j'ai adoré au demeurant, mais je dois avouer ne pas être un fan des dernières ziques de Zimmer. Je pense par contre faire de belles découvertes grâce à cette liste... car y'a un paquet de film ou autres que je ne connais pas... Merci.

Geoffrey Crété - Rédaction
22/01/2022 à 13:16

@Fab69

Bien évidemment, on aurait pu en rajouter 40 autres. Et il y a des BO de séries ! Et des BO loin des têtes d'affiche (Sable, Ride Your Wave, Bad Dreams...) ! C'était une question de choix et équilibre, comme toujours.

Fab69
22/01/2022 à 12:53

beau sujet que ce palmarès que je partage en partie, même si il lorgne vers les films en tête d'affiche et que l'univers des séries télé propose aussi de belles bo, Foundation by by Bear McCreary, Invasion by Max Richter, For All Man kind by Jeff Russo, Maroni saison 2 by Clément Tery, coup de cœur pour Minari by Emile Mosseri, et Blue Bayou by Roger Suen et l’inédit The world to come by Daniel Blumberg, de quoi faire frissonner bien des oreilles ...