Love, Death & Robots : les 5 meilleurs épisodes de la série SF Netflix

Mathieu Jaborska | 11 juin 2022
Mathieu Jaborska | 11 juin 2022

La saison 3 de Love, Death & Robots aura rassuré les innombrables déçus par la saison 2. Mais si ces deux dernières salves de courts-métrages soulignent l'irrégularité de la série, celle-ci nous aura quand même proposé quelques beaux moments.

C'est le propre de sa nature anthologique : il y a à boire et à manger, mais on n'est pas à l'abri de tomber sur une pépite. Et des pépites, il y en a quelques-unes dans cette production de Tim Miller et David Fincher. Oublions donc les démonstrations techniques sans âme pour nous intéresser aux meilleurs épisodes de Love, Death & Robots, parfois poétiques, parfois spectaculaire, parfois flippants et même parfois assez émouvants, dans une petite liste non exhaustive.

 

photoCarton bleu pour les quelques petits spoilers

 

Bonne chasse (S1E8)

Ça raconte quoi ? Dans la Chine du début du XXe siècle, un garçon tombe amoureux d'une huli jing métamorphée après que son père a tué la mère de celle-ci.

Pourquoi c'est bien ? Exit la 3D (ou presque). Bienvenue dans un univers très relativement inspiré de l'animation traditionnelle. Un revirement esthétique logique : la tradition et la modernité sont justement les sujets du très beau Bonne Chasse, qui, après une comédie un peu vaine (La revanche du Yaourt), et un récit classique sauvé in extremis par une rupture de ton particulièrement horrifique (Derrière la faille), prend tout le monde de court.

Le court-métrage adapté de Ken Liu, pourtant sur le papier plombé par ses aspirations mythologiques, sort du lot en racontant l'histoire d'une transition, une transition entre une magie légendaire, héréditaire et une magie plus moderne, mécanique. Ou l'exploration du flou artistique entre la fantasy et le steampunk. Un flou dans lequel se complaisent les pires représentants de l'espèce humaine, obnubilés par la machine, seule entité qu'ils peuvent entièrement soumettre à leur volonté... et même à leurs désirs sexuels.

Parfois cru quand nécessaire, Bonne Chasse pouvait facilement tomber dans la technophobie, travers évident lorsqu'on oppose ainsi les rouages froids et la magie traditionnelle. Mais en profitant de son propre graphisme pour figer un changement d'esthétique plutôt que de bêtement fustiger le soi-disant progrès, il rassure sur le pouvoir de la fiction. Car pour les auteurs de cet épisode, la magie, c'est l'humanité. Une idée simple, mais sublimement mise en scène.

 

photoBattle Angel

 

L'oeuvre de Zima (S1E14)

Ça raconte quoi ? Un artiste solitaire donne une dernière interview au bout d'un siècle.

Pourquoi c'est bien ? La présence de cet épisode dans cette sélection ne crée que moyennement la surprise. En général, tout le monde s'accorde sur ce point : L'oeuvre de Zima est LA pépite de Love, Death & Robots. Diffusé sur une plateforme aussi populaire, au sein d'une anthologie largement promue, il constitue la meilleure publicité possible pour l'industrie du court-métrage en convainquant les néophytes qu'il est bien possible de se livrer à une réflexion métaphysique et émotionnelle sur l'art et la vérité en à peine plus de 10 minutes.

Oeuvre totale, dont le style se fond à merveille avec le propos, il nous entraine dans une quête artistique qui ne peut s'épanouir que dans la fiction. Si les meilleurs épisodes de la série portent en eux une visée métaphorique ou un message plus ou moins subtil, il est un des seuls à ouvrir le champ des interprétations. Ode à la simplicité ? Rappel que la vérité ne dépend que de notre champ de vision ? Projection philosophique du futur de la robotique ? Prolongation de l'oeuvre de Yves Klein ? Publicité pour un laveur de piscines ?

Probablement (presque) tout ça à la fois, et c'est justement ça qui fait de L'oeuvre de Zima un objet fascinant. La pointe d'émotion finale, très impressionnante, en devient presque irréelle : le sentiment provoqué est-il réellement humain ? Paradoxalement, on reproche souvent à la série une certaine déshumanisation, causée par sa technicité parfois absconse. Et pourtant, le court-métrage le plus chargé émotionnellement est justement celui qui exige de nous de sortir de notre propre humanité. S'il ne fallait en garder qu'un, ce serait donc celui-là.

 

photoZima's blues

 

L'âge de glace (s1e16)

Ça raconte quoi ? Un couple découvre une civilisation vivant dans leur congélateur.

Pourquoi c'est bien ? Il n'est pas tant apprécié, ce Ice Age. C'est probablement à cause de son look, clairement le plus spectaculaire de la série, si avancé dans le photo-réalisme qu'on se prend, les premières minutes, à croire aux prises de vue réelles. Le travail du studio d'effets spéciaux Atomic Fiction est si désarmant qu'il semble renfermer un piège, une vacuité technologique cynique.

Et pourtant, l'histoire qu'il met en scène agit presque comme une métaphore du pouvoir de l'animation. Ce couple regarde une civilisation entière progresser, s'éteindre et se surpasser, au point d'entrer en contact, comme on contemple, d'un air hagard, assis sur notre canapé, les miracles que peuvent désormais accomplir les animateurs. Les derniers instants de ce petit monde, projetant des mini-fusées partout dans la pièce, ne sont d'ailleurs pas sans rappeler l'émergence de la 3D, qui permet justement à la fiction de s'inviter encore un peu plus dans le salon des spectateurs.

Certes, le concept aurait pu être propulsé dans la stratosphère des théories philosophiques, mais ce n'est pas le but du scénariste Philip Gelatt, responsable d'une grosse partie des épisodes. Avec cette petite pastille techniquement ébouriffante, il nous rappelle juste que, grâce au travail acharné d'artistes aguerris, il est possible de constater - la main droite dans le slip, la main gauche sur le tire-bouchon -, les évolutions d'univers entiers. Et ça, c'est quand même sympa.

 

photoEt en plus, il y a Mary Elizabeth Winstead

 

Le géant noyé (S2E8)

Ça raconte quoi ? Un jour sur la côte anglaise, un géant s'échoue sur la plage, attirant l'attention des habitants.

Pourquoi c'est bien ? Il fallait bien incorporer à cette sélection un épisode de la saison 2. Néanmoins, le choix reste famélique en dehors de cet ultime court-métrage, réalisé et scénarisé par le producteur de la série, Tim Miller. Il est de loin le plus original, et s'impose finalement comme l'un des plus poétiques morceaux d'animation de la série.

Évidemment, ses qualités proviennent principalement de la nouvelle dont il est adapté, écrite par J.G. Ballard, un des auteurs les plus fascinants du XXe siècle. Reste que porter à l'écran un monstre pareil n'est pas chose aisée (rappelez-vous High-Rise), les deux cinéastes qui ont réussi à relever le défi étant eux-mêmes deux sommités (Steven Spielberg avec Empire du soleil et David Cronenberg avec Crash). Miller s'en sort très bien, notamment car il sait transposer en animation une situation impossible à représenter en prises de vue réelles.

La direction artistique, la voix off obligatoire et la photographie grisâtre font le reste. Voir le géant mort se décomposer devant nos yeux renforce vraiment la poésie macabre de cette histoire et vient titiller la part morbide de notre humanité. Voilà exactement le genre de proposition qu'on aurait aimé voir plus dans cette saison 2 qui démontre, dans son ultime coup de poker, qu'elle était elle aussi capable de raconter quelque chose de fort, pour peu qu'elle s'en donne les moyens.

 

photoParle à ma main

 

Mauvais voyage (S3e2)

Ça raconte quoi ? L'équipage d'un navire voguant sur de bien sinistres eaux se fait déchiqueter par un monstre crustacé affamé. Pour s'en sortir, il va falloir négocier...

Pourquoi c'est bien ? La série emprunte très, très régulièrement à H.P. Lovecraft. Les récits cosmiques de l'auteur américain constituent en effet un terrain d'expérimentation idéal pour ces ambitieux studios d'animation. Toutefois, force est de constater que la plupart de ces hommages se contentent de décliner la même formule. Écueil qu'évite agilement David Fincher, prestigieux réalisateur de ce Mauvais Voyage, pure démonstration de terreur lovecraftienne.

Celui qui avait bien failli mettre en scène une adaptation de 20 000 lieues sous les mers lâche sur de pauvres marins une créature particulièrement glaçante et en profite surtout pour les confronter aux limites de leur propre humanité, dans la stricte tradition de l'écrivain. Le personnage principal affronte à la fois la monstruosité animale et la monstruosité humaine. Une fable d'autant plus cruelle que la mise en scène du cinéaste et le production design poussent les potards du cauchemar désespéré au maximum.

 

Love, Death & Robots : photoUn jeu sur le hors-champ impressionnant

 

Fincher ne pouvait que s'épanouir avec les techniciens de Blur, parfaitement alignés avec la rigueur - pour ne pas dire le perfectionnisme maladif - qui caractérise son oeuvre. Non seulement il y a vu une occasion d'orchestrer un jeu de massacre, mais il s'est permis de s'amuser un peu avec l'animation, le temps notamment d'une mutinerie musclée. On en sort avec une seule envie : le voir se réessayer à l'animation et persister dans l'horreur.

Tout savoir sur Love, Death & Robots

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commentaires
ni3o
04/07/2022 à 20:22

@Bilbo, on parle du même épisode en faite donc je ne comprends pas votre commentaire.

Kongzilla
13/06/2022 à 18:20

Dans l’épisode 1 de la saison 3 (L’age de glace), Miller et Winstead sont bien en prises de vues réelles pas en CGI.

Spooky
13/06/2022 à 09:38

L'épisode 2 de la saison 3 est énorme

Kailloux
12/06/2022 à 19:32

L'œuvre de Zima reste exceptionnel et mon préféré sur le sujet qu'il ne faut pas forcément être riche et tout posséder pour être heureux (même si ça aide).
Je suis cependant étonné que vous n'ayez pas mis "l'essaim" qui pour moi et le meilleur épisode de la saison 3 car il traite le sujet de la colonisation et de l'esclavage d'un point de vue qui n'avait jamais été exploitée et je trouve ça super innovant.
Vos explications sont très développé.

alshamanaac
12/06/2022 à 14:41

Je plussoie @ni3o ,
Jibaro est l'épisode qui m'a le plus marqué à tous les niveaux (design / son / story / expérimentation) - Je l'ai même regardé une seconde fois dans la foulée.

Après globalement, cette série est sympa mais effectivement très très inégale d'un épisode à un autre... Je trouve juste dommage qu'il n'y ait pas plus de variété et d'expérimentation dans les styles graphiques.

rientintinchti2
12/06/2022 à 13:12

Série intéressante même si inégale. Merci pour cet article. Les épisodes sur l'artiste Zima et sur le géant échoué au bord de la plage sont très bien écrits je trouve.

Kyle Reese
12/06/2022 à 10:49

@Mokuren

Excellente anecdote Mon chat a toujours ignoré la TV peu importe les programmes.
Les chats généralement ne distinguent pas bien de loin.

Blockbuster
12/06/2022 à 09:24

Dans cette saison 3 j'ai adoré les deux épisodes les plus courts : l'invasion zombies en maquette, géniale; ainsi que l'épisode avec les 3 robots en monde post apocalyptique, qui décrit notre avenir à tous dans quelques décennies?

Mokuren
12/06/2022 à 01:37

Mon anecdote perso sur Le Geant Noyé : mon chat est restée scotchée devant, fascinée par les images. Elle s'est assise solennellement devant la TV et a regardé le court du début à la fin. Je pense que la manière dont la scène sur la plage était éclairée rendait les images très lisible pour elle. :)
Anecdote à part, je n'aurais pas fait exactement les mêmes choix mais c'est toujours intéressant de savoir quels courts les autres ont préférés. Mauvais voyage était vraiment très bon.

Deny
11/06/2022 à 20:58

L'épisode 1 de la S3 m'a choqué. Le pire de toutes les saisons. Une horreur, on dirait une pub pour le Futuroscope. Une grosse vérue pour une S3 pourtant démente, mieux que la S2 décevante.

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