Le Hobbit : 5 raisons de préférer la version longue de La Désolation de Smaug

Mathieu Jaborska | 6 octobre 2022 - MAJ : 17/10/2022 18:12
Mathieu Jaborska | 6 octobre 2022 - MAJ : 17/10/2022 18:12

Le Hobbit, oui, mais en version longue : environ 25 minutes de plus pour La Désolation de Smaug.

On revient sur la version longue de La Désolation de Smaug, de la trilogie du Hobbit de Peter Jackson, adaptée de J.R.R Tolkien, pour dire pourquoi elle est largement préférable.

 

photo, Martin FreemanLa version longue, un trésor ?

 

Thrain Thrain quotidien

Si les coupes du premier volet sont très subtiles, évinçant vaguement des scènes de chant et des prises alternatives agrémentées, La Désolation de Smaug est découpé de façon bien plus franche. Certains gros pans du film réapparaissent dans la version longue, à l'image de scènes décrites plus bas, mais aussi d'un personnage, qui y ressuscite miraculeusement : Thrain. L'acteur Anthony Sher a été d'ailleurs rajouté au générique.

Présenté dans l'introduction d'Un voyage inattendu, il est le père de Thorin, et est présumé disparu dans la version cinéma. Mais dans la version longue, il apparait à deux reprises. Il est d'abord mentionné au tout début du long-métrage, lorsque Thorin (Richard Armitage) et Gandalf (Ian McKellen) se souviennent de la bataille de la Moria. Le chef des nains tente de convaincre le magicien que son paternel n'est pas mort, flashback à l'appui.

Dans le flashback en question, particulièrement guerrier, on le voit charger Azog pour ne pas exposer Thorin, dernier héritier de sa lignée. Comme toujours, toute séquence de bataille menée par Peter Jackson est bonne à prendre, et même si la scène n'est pas très riche en envolées épiques et expérimentations de réalisation délirantes (il faudra attendre le 3e opus pour ça), elle a le mérite de nous donner un autre point de vue sur ce combat. Après ça, on apprend aussi que le père de Thorin possédait un des sept anneaux des nains lors de sa disparition.

 

photoI'm on the night Thrain...

 

Ce n'est que bien plus tard qu'on retrouve Thrain en chair et en os, lors de l'exploration de la terrible cité de Dol Guldur par Gandalf. L'ex-chef nain lui tombe alors littéralement dessus. Après un nouveau micro-flashback rappelant son engagement, il discute brièvement avec le magicien et lui explique que son fils ne doit pas pénétrer à Erebor. Certes, le personnage complètement fou de Thrain n'est pas essentiel à la narration, mais il permet de donner du corps à la séquence, de fait bien plus intéressante, de Dol Guldur, en plus de préparer encore un peu le terrain pour la suite des évènements.

La façon dont cette séquence est construite bouleverse un peu le montage d'origine, puisque les découvertes de Bilbo de l'autre côté du montage parallèle sont quelque peu remaniées. Voilà qui prouve bien que cette exploration malheureuse prend une place bien plus importante, surtout sur sa fin, qu'on évoquera un peu plus tard.

 

VL...Never to return

 

Beorn to be wild

C'était un des personnages les plus attendus de ce deuxième opus, et s'il n'a pas déçu en général, la version longue est l'occasion de rester en sa compagnie bien plus longtemps. De nombreuses scènes avec l'homme ours ont été coupées, donnant à cette rencontre des airs de transition un peu rapide. Mais Jackson semble aimer autant que nous le brave Beorn, incarné par Mikael Persbrandt.

Ainsi, la version longue comprend l'adaptation d'un des passages les plus connus du roman, celui où les nains se présentent les uns après les autres à la bête, pour ne pas laisser transparaître leur nombre. On pensait, à la vision de la version cinéma, que le cinéaste avait définitivement abandonné l'idée de coller de temps à autre au texte. Mais cette séquence assez amusante prouve le contraire, tant elle refait lorgner le récit sur le conte un peu potache.

Outre ce passage, tout de même long de 4 minutes 30, plusieurs plans enlevés retrouvent leur place pour un montage plus fluide. Enfin, une longue discussion entre le changeur de peau et Gandalf continue de projeter de l'ombre sur la suite des aventures de la compagnie. Beorn apparait donc comme un personnage bien plus sage, et bien plus au courant du mal qui peuple ce monde. C'est d'ailleurs à se demander si le magicien gris n'est pas un peu paumé dans cette version étendue.

 

VLInviter des amis à la maison : étape 1

 

La forêt qui tue

Autre section de récit importante du roman, la traversée de la forêt noire (la forêt de Mirkwood) est considérablement allongée dans la version longue. Ce n'est pas pour rien si Gandalf donne quelques conseils de plus à Bilbo avant qu'il n'y pénètre : les aventuriers en auront bien besoin. Le montage cinéma perdait ses personnages de manière très rapide, à grand renfort d'ellipses et autres tours de manche. Dans cette version, Jackson consacre plusieurs scènes entières à leur égarement progressif, et à l'effet du sortilège qui hante les bois menaçants.

On note ainsi l'ajout de la traversée d'une sorte de tourbière étrangement attractive. Si Thorin, par exemple, parvient à la passer sans problèmes, d'autres membres de la compagnie s'endorment au beau milieu de lianes, perdues entre les deux rives. Le cinéaste prolonge dans cette séquence le petit jeu esthétique avec son décor, si unilatéral, dans sa caractérisation visuelle, qu'il peut y fondre ce qu'il veut et balader ses personnages à souhait, du moins jusqu'à ce que Bilbo ne retrouve la couleur.

 

VLThe floor is lava

 

Une prouesse marquée et accentuée dans la version longue par la visite d'un genre de cerf, dont la blancheur éclatante annonce la nécessité d'une échappatoire colorée. Un détail inutile narrativement, mais cohérent esthétiquement, qui accentue la logique imparable et parfois très belle de la composition du metteur en scène. C'est Thorin qui tire sur l'animal pour le faire fuir, révélant encore un peu plus son mauvais fond. Comme quoi, tout a un sens.

La transition avec l'arrivée des araignées est également rallongée quelque peu. On voit Bilbon toucher un fil blanc, et la vibration causée par son doigt se propage dans le réseau de toiles, action présente dans la version cinéma, mais très raccourcie. Mirkwood est décidément le lieu qui a poussé Jackson à prendre son temps, temps dont ne disposait pas le montage cinéma.

 

photoDard VS Dard

 

De l'eau sous les ponts à Lacville

Dernier lieu à bénéficier d'une caractérisation bien plus poussée, et pas des moindres : Lacville, dirigée par l'opportuniste maître, l'archétype du politicien véreux. C'est sur celui-ci que les ajouts se concentrent. Il faut dire que le montage original, suivant à la trace Alfrid et son monosourcil, faisait apparaitre le personnage joué par Stephen Fry comme très caricatural.

Il ne l'est pas beaucoup moins dans la version longue, mais il a au moins plus le temps de s'exprimer. La scène qui l'introduit, par exemple, rallonge le dialogue avec Alfrid. Le maître justifie l'idéal de révolte de Bard comme le signe qu'il veut lui ressembler, dans un excès de prétention amusant. Le personnage bedonnant est ainsi aussi ridicule que vaguement menaçant. Plus loin, d'autres scènes montreront avec un humour un peu sérieux sur les bords son incompétence face aux libertés que prend l'archer et à la popularité des nains. Le maître est plus présent, mais pas moins bête.

 

VL, Stephen FryFry and beer

 

Bien sûr, toute une partie du voyage des nains gagne également en profondeur. En plus d'un discours au pied de la mairie qui jouit de quelques plans et de quelques répliques supplémentaires, la découverte de la cité des hommes est bien plus soulignée, ancrant davantage cette étape dans la grande aventure que constitue La Désolation de Smaug. En parallèle, Bard est toujours vu comme un dissident, traqué par l'armée du maître.

C'est la principale qualité de la version longue du film : son intrigue consistant à traverser plusieurs décors successivement, le montage étendu permet de donner un peu plus de chair à chacune de ces étapes, que ce soit la maison de Beorn, la forêt noire ou Lacville, bien plus incarnée que dans le montage cinéma.

 

photo, Luke EvansÇa va Barder

 

Crypt of the Necromancer

Et planquée dans toutes ces scènes rajoutées, une menace est bien plus présente dans la version longue. L'avènement de Sauron à venir est encore plus souligné, que ce soit au détour d'un dialogue avec Beorn, lors d'un flashback montrant brièvement les funérailles du fameux Roi-sorcier d'Angmar ou de la traversée de Dol Guldur, puisque Thrain disparait définitivement, aspiré par l'ombre représentant l'œil de feu.

Cette saga admet en effet deux antagonistes principaux. Le premier, Smaug, est annoncé depuis le début. La majesté de son design et de sa mise en image est laissée pure dans la version longue. Le dragon n'est jamais coupé, tant il est convaincant.

 

photoSmaug ou Sauron, quelle menace est la plus grande ?

 

La deuxième menace est plus diffuse, et veut se terrer en arrière-plan pour, à la fois, motiver les orcs attaquant la compagnie (Azog et sa troupe) et anticiper l'ascension de Sauron dans Le Seigneur des Anneaux. Et dans ce dernier cas, on sent qu'il est difficile pour Jackson de placer le curseur. À quel point cette menace doit-elle être présente ?

L'emphase mise sur le Nécromancien dans la version longue de La Désolation de Smaug est témoin de ce dilemme, qui constitue pour beaucoup un réel point faible de la trilogie. Le Hobbit devait-il se passer d'autant de références au Seigneur des Anneaux ? C'est un autre débat. Mais en attendant, les personnages ajoutés comme Legolas et Tauriel n'ont eux aussi subi aucune coupe.

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commentaires
TofVW
21/10/2020 à 13:21

Jolies références musicales dans les légendes des photos. ;)