Le Seigneur des Anneaux : 5 raisons de préférer la version longue des Deux tours

La Rédaction | 8 septembre 2022 - MAJ : 09/09/2022 10:12
La Rédaction | 8 septembre 2022 - MAJ : 09/09/2022 10:12

Le Seigneur des anneaux, oui, mais en version longue : environ 45 minutes de plus pour Les Deux Tours.

Pour apprécier la trilogie culte de Peter Jackson, adaptée de J.R.R Tolkien, il est toujours mieux de préférer les versions longues de chaque épisode, et on vous dit pourquoi.

Retrouvez nos 5 raisons de préférer la version longue de La Communauté de l'anneau et nos 10 raisons de préférer la version longue du Retour du Roi.

 

photo, Ian McKellenVersion longue éclairant les zones d'ombre de la version cinéma

 

THEODRED

Comment quelques secondes peuvent profondément altérer la charge émotionnelle de tout un long-métrage ? Les funérailles de Theodred en constituent un excellent exemple. Dans le montage cinéma, il est à peine un personnage, vaguement mentionné, et n’a aucune chance de retenir l’attention d’un spectateur qui ne serait pas préalablement familier de l’œuvre de Tolkien. 

Dans la version longue, le fils de Theoden a beaucoup plus d’importance. Alors que nous l’avons découvert agonisant un peu plus tôt, nous le retrouvons juste après que le seigneur des Rohirrim soit sorti du joug de Sauron. Alors que nous assistons à une séquence plutôt réjouissante, où nos héros paraissent à nouveau sur le point de progresser dans leur quête, la gravité et la mort s’invitent, alors que la dépouille de son fils est présentée au roi. En une poignée de plans, le cinéaste opère un changement tonal, grâce à la lumière, mais aussi le découpage, qui, en s'éloignant des personnages, les contraint à retrouver leurs fonctions, alors que l'émotion, elle, s'abat sur eux.

 

photoC'est plus sa guerre

 

La séquence est relativement rapide, assez simple en termes de scénographie, mais ses conséquences se font immédiatement sentir. Tout d’abord, elles témoignent de l’aisance avec laquelle Peter Jackson parvient à basculer d’un sentiment à l’autre, presque sans crier gare, mais elle va aussi servir de noyau à la relation qui unira Eowyn (Miranda Otto) et Theodren, et comment ce deuil poussera chacun à dépasser son rang et ses limites. 

Enfin, le chant déchirant que lance Eowyn pour accompagner la dépouille de Theodred compte parmi les plus belles compositions musicales de la trilogie, tout comme il capture idéalement le mélange de force, de résolution et de vulnérabilité de cette héroïne, parmi les plus touchantes de cette grande fresque. Une étape importante pour établir notre empathie à l'égard de cette femme, dont le combat, les élans et le coeur seront soumis à rude épreuve, et qui toujours, tentera l'impossible pour articuler sens du devoir, rang et sincérité de l'âme.

 

photo, Miranda OttoUne dignité mise à rude épreuve

 

FARAMIR (ET BOROMIR)

L'histoire de Boromir et Faramir (David Wenham) est sans nul doute parmi les plus impactées dans les versions cinéma, où Sean Bean ne réapparaît pas après sa mort dans La Communauté de l'anneau, si ce n'est au détour des plans où le spectateur revoit Gandalf affronter le Balrog. En version longue, grâce à la magie des flashbacks, il est de retour dans Les Deux tours : d'abord en cadavre, lorsque son frère réceptionne le colis dans l'eau, et surtout après la bataille glorieuse à Osgiliath, avant que Boromir n'aille à Rivendell dans La Communauté de l'anneau.

Cette longue scène établit des éléments majeurs pour cette partie de l'univers : la relation entre les deux frères unis face à leur terrible père Denethor, filmé dès le départ comme une menace et un ogre affreusement injuste, qui voit autant de raisons d'être fier en Boromir que de raisons d'être déçu chez Faramir.

Autre moment important : c'est Denethor qui envoie Boromir à Rivendell pour s'emparer de l'anneau, en usant de son autorité et son influence de père, pour lui assurer qu'il est suffisamment fort pour résister à la tentation, que personne d'autre ne doit mettre la main sur l'anneau, et que celui-ci leur revient de droit. Une scène qui donne énormément d'humanité à Boromir, dont les faiblesses sont alors intimement liées à sa condition de fils, soldat et frère. Tout ça se répercute sur Le Retour du Roi, dans tout ce qui se déroule autour de Minas Tirith, la relation entre Faramir et son père devenant de plus en plus tragique.

 

photo, David Wenham, Sean BeanDans la ligne des -mir

 

À noter que pas mal de choses ici relèvent de libertés prises par Peter Jackson et ses co-scénaristes par rapport aux livres. Parmi les plus importantes : Faramir capture Frodon, Sam et Gollum, et les libère après l'attaque des Nazguls à Osgiliath ; il maltraite Gollum, et le regarde avec dégoût et inquiétude ; et il est très sensible à la tentation de l'anneau, contrairement à ce qu'a écrit Tolkien. Même chose pour Denethor, transformé en homme vil, faible, avec un mépris grandissant pour son plus jeune fils, soit une grande différence avec les bouquins, où il est présenté comme un leader sage et respectable.

Dans tous les cas, la version longue donne bien plus de nuances à Boromir et surtout Faramir, qui n'est plus un simple frère qui s'interpose dans le périple de Frodon (Elijah Wood) avec une envie de l'anneau, mais un fils qui cherche désespérément l'amour de son père.

 

photo, David WenhamFaramineux Faramir en version longue

 

GANDALF LE BEAU ET LE SAGE

Un beau moment en suspens, dans la fausse tranquillité d'une nuit silencieuse, sorte de calme bleuté avant la tempête infernale. Pendant que Legolas et Gimli dorment près d'un feu de camp, Aragorn se réveille, et rejoint un Gandalf inquiet et captivé par l'horizon. C'est le début d'un monologue, où le sage sorcier explique que la peur existe bien chez Sauron : il sait que l'héritier de Numeror est là, et que cet espoir le menace. Gandalf explique aussi que malgré le chaos à venir, l'autre espoir persiste : l'Anneau est caché, et Frodon avance, jour après jour. Une scène qui permet ainsi de rappeler à quel point Sauron se trompe de cible.

Cette scène a beau être articulée autour d'un simple champ-contrechamp, avec une mise en scène statique et théâtrale, elle est marquante pour plusieurs raisons. La première, la plus évidente : elle est belle. Ce paysage nocturne, avec cet horizon bouché par l'éveil de Sauron qui semble se lever tel un soleil des enfers, est une image particulièrement forte. Les personnages sont baignés dans un halo bleuté typique des nuits hollywoodiennes, mais qui tranche avec le reste de la trilogie. D'où la sensation d'être témoin d'une scène précieuse, rare, comme une parenthèse intime entre les héros, au milieu de leur course.

 

photoEvent Horizon

 

La deuxième : Ian McKellen. En moins de deux minutes, l'acteur invoque toute la solennité, la malice, la tendresse, et l'humanité de ce personnage unique. Il avait été nommé à l'Oscar du meilleur second rôle pour La Communauté de l'Anneau, mais il a été formidable dans toute la trilogie, et le démontre ici en passant de l'inquiétude à l'espoir avec une aisance formidable.

Par ailleurs, cette courte scène insiste sur la valeur de Sam dans cette aventure, et l'importance inattendue qu'il prend dans la victoire face à Sauron. Ou comment rappeler qu'il suffira de cet amour puissant entre les deux hobbits, pour vaincre l'adversité.

 

photo, Ian McKellenIan McKellen est magnétique

 

ARAGORN, TOUJOURS PLUS D'ARAGORN

La version longue de La Communauté de l'Anneau nuançait déjà beaucoup cette figure de l’héroïsme devenue un emblème de la fantasy, qui a inspiré maints héros depuis sa publication. Et dans Les Deux Tours, le réalisateur s’efforce à nouveau de travailler en profondeur ce protagoniste qui a en charge une dimension importante de l’aspect épique du récit. Loin des archétypes badass, Aragorn s’impose plus encore comme un homme pétri de nuances, en proie à une mélancolie profonde. 

Deux scènes coupées en témoignent explicitement. Celle où il apaise Brego notamment, qui pourrait paraître classique, si plutôt que d’établir un rapport de domination venant de l’humain, elle n’avait pas pour but d’établir un parallèle évident entre l’aventurier et le cheval. Tous deux apparaissent comme des créatures isolées, que leur colère menace à chaque instant de briser, mais qui peuvent trouver, dans leur alliance et la profondeur de leur solitude, un apaisement. 

 

photo, Viggo MortensenLe meilleur ami (et steak) de l'homme

 

Apaisement qui ne manque pas de marquer Eowyn, laquelle tentera d’en apprendre plus sur Aragorn dans une autre scène coupée, au cours de laquelle elle lui sert un fameux ragoût et lui demande son âge. On l’oublie trop souvent, mais la lignée royale dont provient le héros n’est pas tout à fait semblable à celle de la plupart des humains, et en dépit de sa robuste constitution, le personnage est âgé de 87 ans. Voilà une information capitale, qui nous permet de bien mieux comprendre son caractère, la douceur mêlée de tristesse qui l’accompagne. 

Parfaitement interprété par Viggo Mortensen, le combattant livre ici une des clefs psychologiques pour le comprendre. Las des affrontements, familier de la mort et des sacrifices vains, il ne cherche pas la Grande Aventure, ne se rêve pas un destin dont il sait qu’il sera probablement parsemé de larmes. C’est ce caractère qui frappe et séduit si évidemment Eowyn, tout en consacrant l’impossibilité de leur amour, non seulement car le cœur d’Aragorn est pris, mais aussi parce que l’expérience et le spleen qui l’habitent l’éloignent encore de la condition de son interlocutrice. 

 

photo, Viggo MortensenUn très bon ragoût qu'on vous dit !

 

LES TOUCHES D'HUMOUR

Il est évident que ce deuxième opus a bien plus été allégé que son prédécesseur, la faute à une durée qui commence à être nuisible à une exploitation en salles. Il a donc fallu couper large, et vu la densité de la narration, figurant de façon frontale l'intensité des enjeux monumentaux de cette quête grâce notamment à une scène de bataille gargantuesque, ça n'a pas été de gaité de coeur. Plutôt que de se débarrasser de ces moments cruciaux, il a été décidé de couper une bonne grosse dose d'humour distillée à plusieurs points du récit.

La séquence du ragoût, développée ci-dessus, est déjà centrée sur un ressort comique classique, à savoir la cuisine douteuse d'un personnage. Mais ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. La rencontre entre Sylvebarbe et le duo de Hobbits, qui traine volontairement les pieds dans la version cinéma, est par exemple bien plus longue à l'origine, tant elle veut contrebalancer l'intrigue principale par un arc narratif plus léger. Comic reliefs efficaces, Pippin et Merry se retrouvent donc à boire l'eau des Ents, une eau qui les fait grandir, en dépit des avertissements de leur nouvel ami sylvestre.

 

photo, I Billy BoydIl s'agirait de grandir

 

Se concluant avec une pointe de noirceur, une manie chez Jackson, la scène prolonge dans Les Deux Tours la dynamique comique qui émane des deux compères. Quelque peu effacée dans le montage cinéma, leur relation tout en chamailleries colle avec l'image qu'on se fait d'eux dans La Commmunauté de l'Anneau.

Mais ce ne sont pas les seuls à connaitre leur moment de gloire humoristique. La version longue est parcourue de parts et d'autres de petites blagues souvent bien plus sombres que dans le premier opus. Ainsi, le jeu de comparaison perpétuel de Legolas et Gimli, s'affrontant pour déterminer lequel des deux est le plus meurtrier, se termine avec un ultime assassinat polémique. L'elfe tue un Orc, que le nain contrôlait en fait avec sa hache, plantée dans son système nerveux. La réplique, bien connue des connaisseurs, aurait pu être largement plus culte si elle avait été conservée.

 

photo, John Rhys-DaviesLe visage de la victoire

 

Toujours concernant le gouffre de Helm, l'issue de la bataille est rallongée. L'armée ennemie, en déroute, se réfugie dans la forêt de Fangorn. Mauvaise idée. En plus de relier encore un peu plus les deux arcs narratifs qui se chevauchent à cet instant, la séquence joue sur la satisfaction du spectateur, heureux de voir les arbres achever encore un peu plus les rejetons de Saruman. Une humiliation supplémentaire avant la fameuse scène coupée du Retour du roi, très célèbre.

Enfin, la séquence coupée de La Communauté de l'Anneau montrant Galadriel récompenser d'un présent les membres de la Compagnie paie dans une scène d'escalade certes pas essentielle au récit, mais introduisant en douceur la partie plus dure du périple de Frodon et Sam. Amusante, elle prépare aussi l'intervention de Gollum, qui se plaindra de la corde elfique brulante. Comme souvent, ces gags ne sont pas gratuits et traduisent une volonté chez Jackson de caractériser son univers par tous les moyens possibles. Dans Les Deux Tours, le procédé fait souvent mouche.

Tout savoir sur Le Seigneur des anneaux : Les Deux Tours

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commentaires
Faurefrc
08/09/2022 à 21:54

Pour avoir lu aussi Tolkien, il faut tout de même reconnaître l’incroyable boulot (aussi bien qualitativement que quantitativement) de Jackson. Et puis tout de même, quelle maestria dans tant de scènes.
C’est encore plus frappant en revoyant les films aujourd’hui. Techniquement ça n’a (presque) pas pris une ride.

Ethan
03/09/2021 à 19:45

Vu une seule fois et adoré

Harry
11/12/2020 à 11:00

Il n'y a pour moi, si j'ose, aucune discussion plausible quant à l'intérêt des versions longues quelque soit l'un des 3 volets. Indispensable ! Et elles revêtent encore plus d'importance si on tente de les caler avec le roman. Ce dernier est d'un ennui terrible ! Et il y a une multitude de moment, de passage que Jackson n'a pas repris. Et il a bien fait. Et c'est en ayant lu Tolkien que l'on peut décerner le titre d'oeuvre cinématographique à Peter Jackson.

Nico
10/12/2020 à 20:18

Il est vrai que le traitement de Faramir dans les films est toujours sujet à discussion. Ce dernier a un caractère plus fort dans les livres, et à voit Boromir non pas comme un modèle mais comme un homme brutal et sans nuances. Cela dit après la vision de la version longue des deux tours, il est indéniable que les scènes supplémentaires rendent beaucoup plus profonde et intéressante les différences d'écriture des relations entre Dénéthor, Boromir et Faramir. Encore une belle réussite pour cette version longue des Deux Tours après celle de la Communauté de l'Anneau.

Bennn
17/06/2020 à 15:56

J'ai un problème avec le montage alterné entre des arcs narratifs d'intérêt et d'enjeux complètements différents. Exemple Gouffre de Elm alterné avec les Ents. Ça passe au premier visionnage. Au suivants c'est assez ennuyeux. Ça en fait celui que j'apprécie le moins. Au moins, contrairement à un Nolan il n'en fait pas des tonnes via Zimmer pour essayer d'égaliser artificiellement l'importance des enjeux.

Martin
17/06/2020 à 03:57

Toutes les versions longues de cette trilogie sont bien meilleures. D'ailleurs au ciné je suis de ceux qui n'a pas aimé les deux premiers films. Paradoxalement je les trouvais trop long et je n'ai pas accroché. Il a fallu passer par les versions longues pour avoir le déclic et apprécier enfin.

Nyl
17/06/2020 à 01:32

Moi, je le trouve toujours aussi lent dans son récit ( ça ne bouge pas beaucoup) . Je n'arrive pas à y accrocher, perso (surtout les aventures de Frodon que je trouve ennuyeux (la tentation de Faramir trop semblable à Boromir) . Hormis le gouffre de Helm et la chute de l'Isangard que je trouve toujours aussi plaisant à regarder. Mais c'est long avant d'y parvenir.

Pseudo1
17/06/2020 à 00:47

Revu ce soir sur TF1. Le film est toujours aussi bon, mais souffre quand même de l'absence d'une scène de la version longue qui aurait mérité de figurer dans la version cinéma : le passage où Faramir, au bord de la rivière, voit passer la barque funéraire de Boromir. Quelques secondes qui, en plus de développer un peu plus Faramir, permettent de comprendre comment il est au courant de la mort de son frère.

C'est comme la mort de Saroumane dans le Retour du Roi, qui aurait mérité de figurer dans la version cinéma.

Opale
16/06/2020 à 20:50

Total chef-d'oeuvre. 45 minutes de bonheur en plus, en tous les cas pour moi.

Geoffrey Crété - Rédaction
16/06/2020 à 19:54

@Bob

Tout à fait, approximation corrigée.

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