Rambo II : cette fois c’est bien sa guerre, on repart au front

Simon Riaux | 6 juin 2023 - MAJ : 07/06/2023 12:02
Simon Riaux | 6 juin 2023 - MAJ : 07/06/2023 12:02

Après le film à charge contre le gouvernement américain, il y a le jouissif Rambo II : La mission et sa propagande revancharde.

Devenue une des franchises emblématiques de la carrière de son interprète, la saga s’est transformée et a muté à travers les âges, au gré des changements de mode, des bouleversements politiques et de la carrière de Sylvester Stallone. On revient sur chaque épisode de la série culte.

On a attaqué les hostilités avec Rambo et on poursuit avec Rambo II : La Mission, réalisé par George P. Cosmatos en 1985.

 

Photo Sylvester StalloneL'arc fait enfin son apparition !

 

POURQUOI C’EST GRAVE SA GUERRE

Après avoir laissé sa rage s’exprimer dans le comté de Hope, John Rambo purge une longue peine de prison. Mais le colonel Trautman ne tarde pas à réapparaître pour lui annoncer une terrible nouvelle. Les Vietnamiens, ces salauds, ont toujours en leur possession des prisonniers de guerre américains, qu’ils se plaisent à torturer sans fin, comme le fut notre héros des années plus tôt. Pour John, c’est l’occasion de renverser la vapeur, de venger la terrible défaite et les pertes lourdes essuyées par l’armée américaine et de sauver d’autres héros américains.

Il accepte donc de repartir pour le Viêtnam. Ses ordres sont simples : photographier les prisonniers afin de prouver leur existence au public, sans engager le feu avec l’ennemi, afin de préserver les USA de tout souci diplomatique. Parachuté à proximité de son objectif, Rambo perd tout son équipement, et se retrouve seulement avec son mythe et son couteau.

 

Photo Sylvester StalloneL'heure de la vengeance a sonné

 

Sur place, il retrouve Co-Bao, combattante avec qui il a manifestement échangé des gamètes jadis. Mais il ne peut se résoudre à seulement photographier les prisonniers, et tente d’en sauver un. Redoutant l’incident diplomatique, Murdock refuse donc d’extrader John, qui est fait prisonnier. Il n’était donc qu’un élément de communication, un outil sacrifiable par la même administration pleutre qui lui fit connaître l’enfer du Nam des années plus tôt.

Très colère, tout musclé et pas d’une super humeur, Rambo transforme la moitié du pays en compote, retrouve Murdock et le menace de lui offrir un détartrage à la soude s’il n’aide pas tous ces soldats innocents que les USA ont laissé tomber.

 

Photo Sylvester StalloneLa passion du... heu... de Sly

 

BOX(E)-OFFICE

Le premier Rambo fut une belle opération, un véritable succès… Mais c’est Rambo II : La Mission qui transforme cette réussite initiale en phénomène populaire mondial, transformant le personnage en icône. Les 125 millions de dollars de recette du précédent film sont tout simplement pulvérisés puisqu’au total, ce nouveau Rambo amasse 300 millions de dollars de recettes, pour un budget de 44 millions.

L’opération est un succès monstrueux, qui reviendrait, en ajustant l’inflation, à miser 105 millions pour en toucher 715. À titre de comparaison, le film de l’année 2019, John Wick : Parabellum, a coûté moins cher puisque son budget avoisine les 75 millions de dollars, mais n’a rapporté que 321 millions. Quelques données qui permettent de saisir l’impact du film sur Hollywood.

En France, Rambo II transforme Stallone en légende instantanément. Le film opère d’ailleurs une bascule symbolique, puisqu’il permet à la star hollywoodienne de passer devant Belmondo au box-office français, soit un succès que personne n’avait anticipé. Au niveau des entrées, la réussite est tout aussi phénoménale, puisque dans l’Hexagone, 5,8 millions de spectateurs sont allés assister au film.

 

Photo Sylvester StalloneTendu ce AirB'n B

 

GUERRE SALE

À bien y regarder, Rambo II est un reniement total du premier film. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que son titre original est « First Blood : Part Two », comme si le projet du blockbuster était bien de nier la dimension unitaire du premier volet, le rattacher indiscutablement à sa suite, et amoindrir ainsi sa charge politique contre les USA tout en effaçant a posteriori le désespoir qui le traverse.

Jusque dans l’affiche se noue un dialogue étrange. Nous retrouvons l’image de John Rambo, de face et armé. Mais les vêtements sales du précédent opus et la mitraillette ont disparu. C’est désormais un corps idéalisé de super héros qui prend toute la place, tandis que la sulfateuse a laissé la place à un surréaliste lance-roquettes. Le ton est donné.

Psychologiquement et politiquement, le personnage a totalement changé. « Cette fois, on y va pour gagner, colonel ». Une réplique qui explique le plus simplement du monde le programme de Rambo II, totalement impensable dans la bouche du vétéran traumatisé que nous suivions dans le premier épisode. Il faut désormais recommencer la guerre, porter le fer chez l’ennemi et triompher symboliquement, tout un programme. Oubliez les larmes, oubliez l’homme brisé, Sylvester Stallone joue ici un dieu de la guerre convoqué pour punir les belligérants d’hier.

 

Photo Sylvester Stallone"Pourritures communistes !"

 

Le film est une sorte de bizarrerie idéologique, de rêve reaganien humide et simpliste, qui 35 ans après sa sortie témoigne jusqu’à l’absurde de la toute-puissance des États-Unis et de leur cinéma. Imagine-t-on à l’époque un film vietnamien présentant un commando décidé à botter des culs américains, ou une production française narrant comment un soldat partirait venger les victimes du FLN par dizaines sur le territoire algérien ?

Non, la proposition semble d’un mauvais goût et d’une violence politique invraisemblable. Et pourtant, si quelques-uns font alors de Stallone le héraut du conservatisme américain, ils ne peuvent nier que le récit file à toute allure, va à l’essentiel, ne perd jamais de temps. On considère le film bourré de clichés, mais on oublie souvent combien il a justement contribué à créer ces archétypes, et donc la puissance de son système de représentation.

 

Photo Sylvester StalloneLe dieu de la guerre vous salue bien

 

Abandonnant presque toute chorégraphie pour prioriser une vision guerrière presque antique, le film accouche d’images inoubliables, tel le corps sculpté de Stallone, luisant de sueur et de cordite, illuminé par un ciel orangé, les douilles fendant l’air tout autour de lui. Le long-métrage devient pur objet de propagande, mais un objet particulier, assez fascinant, un tract qui croit en lui-même. Car à aucun moment le projet ne semble phagocyté par un quelconque cynisme, jamais il ne paraît téléguidé par un mépris quelconque pour ses personnages ou son public.

Ainsi, Rambo II : La Mission, jusque dans ses clichés les plus foireux (le personnage sacrifié minablement de Co incarné par Julia Nickson) ou la vision fantasmée de la guerre (si on y souffre c'est à cause des bureaucrates, pas à cause... de la guerre), affiche une candeur étonnamment communicative.

 

photoLa faute à pas de chance

 

Enfin, George P. Cosmatos est tout sauf un manchot, et emballe l’ensemble avec un solide sens du spectacle et une grande lisibilité. Maintes fois caricaturé, son travail n’en demeure pas moins un énorme moment d’aventure sur grand écran, qui témoigne d’une forme de candeur guerrière presque inimaginable aujourd’hui. C'est d'ailleurs grâce à la réussite iconographique de son blockbuster que nous avons pu nous repaître de parodies telles que Hot shots !, ou de prolongations folles, telle la saga Delta Force.

En fin de compte, ce Rambo II : La Mission rappelle son aîné en cela qu'à sa manière, il adopte totalement le ton de son époque, ses thèmes, ses outrances, sa naïveté, son trop-plein de folie. Le tout avec une puissance d'arrêt qui en fait un classique instantané.

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commentaires
jorgio6924
06/06/2023 à 20:55

J'ai toujours plaisir à voir ce type de film et leur punch line absolument WTF.
Le Rambo 3 est à mourir de rire.
Mais celui là et son "Murdock !! Je vais revenir et j'aurai votre peau"... Hmmm délicieux :D

Dave695
26/10/2022 à 19:53

"ce que vous appelez l'enfer il appelle ça chez lui"

Franken
25/10/2022 à 12:16

@c’est sa Guerre
………………......"James Cameron l'une des idoles de Ecran Large est l'un ders papa caché de ce nanard pris au serieux en son temps"


C’est pas du tout caché, c’est connu par absolument tout le monde.
Le script de Cameron est même facilement trouvable. Il démarrait avec Rambo dans un asile.

Stallone a voulu simplifier, le box-office lui a donné raison.

c'est sa Guerre
25/10/2022 à 11:23

visiblement Rambo passe plus de temps en salle de muscu que sur le terrain,
il passe regulierment chez l'etheticienne pour avoir le corps bien lisse et sans poil,
en plus de suivre une dietetique certaine pour que muscle soit bien net et dessonéé et sculpteé
Respect!
James Cameron l'une des idoles de Ecran Large est l'un ders papa caché de ce nanard pris au serieux en son temps mais qui est comique et deconnant pour moi, c'est Cameron qui a pondi le scenar a mi temps pendant qu'il scriptait Alien 2

"So I wound up getting two writing gigs the same day. One was Rambo: First Blood Part II and the other one was Alien 2. Like I'd gone in on the meetings and I wound up getting the phone calls the same morning. So I took both jobs and I had a three month period to write Rambo and what became Aliens. So what I did was I got a desk for each script. I put one in the bedroom and one in the living room. That way when I moved from one desk to the other, all the notes and papers and everything were right where they were supposed to be."

Ghob_
25/10/2022 à 09:13

Je ne l'ai vu qu'une seule fois il y a très longtemps, mais j'en garde de très bons souvenirs, à condition de ne garder que les images et de poser son cerveau à l'entrée. Mais effectivement, c'était le cinéma d'action décomplexé de l'époque et Stallone y était parfait, je comprends avec le recul qu'il fasse partie des rôles qui ont contribué à forger le mythe.

Un de ces jours, il va falloir que je me procure ce film et ses suites (enfin surtout le 4 que je n'ai pas vu, le dernier peut rester là où il est au Mexique, ça m'intéresse absolument pas)...

Fauxpas
24/10/2022 à 20:49

@Zakari, si tu n'as encore compris quel genre de site c'est, cest mignon mais c'est de ta faute. Faut juste regarder les news, ne pas lire les articles et c'est très rare quand on peut échanger pour de vrai en commentaires. Mais surtout, règle la plus importante ; fuis dès que tu vois le nom de "Simon Riaux" (qui est beaucouo moins confiant sur les bêtises qu'il raconte quand on le croise en vrai ;) )

Faurefrc
24/10/2022 à 20:26

Film complètement débile mais hautement jouissif. Bien sûr que le 1 est mieux, mais le 2 est meilleur.

Il est à Rambo ce que Rocky 4 est à la saga du boxeur.

Une ode décomplexée à l’interventionnisme américain délicatement nappée d’un jus de grosses burnes !
Un film qui sent la douce odeur du napalm au petit matin et qu’il est bon d’appréhender dans toute sa dimension Reganienne

Rambedo
11/05/2021 à 16:02

On n'en voit plus des acteurs qui donnent autant de leur physique. Tout est aseptisé, plus rien n'est crédible désormais.

Bob
11/05/2021 à 10:11

Rambo c'est comme Bond, généralement un film sur deux est excellent.
Rambo 1: Chef d'oeuvre.
Rambo 2: Tuerie Jouïssive
Rambo 3: Daube Soporiphique.
Rambo 4: Chef d'oeuvre DE VIOLENCE !
Rambo 5: Bon Taken, Mauvais Rambo.
Rambo 6: Il faut que ce soit un chef d'oeuvre ! (RDV en 2027)

Pat Rick
10/05/2021 à 20:39

En le prenant comme un film d'action, il est très efficace.
Je l'ai revu récemment avec plaisir, et en effet les scènes d'action sont d'une grande lisibilité.

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