La Nuit a dévoré le monde : 5 raisons de dévorer ce film de zombie frenchy

La Rédaction | 2 mars 2018 - MAJ : 09/03/2021 15:58
La Rédaction | 2 mars 2018 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Cette année le Festival de Gérardmer accueillait un premier film français particulièrement remuant et énervé : La Nuit a dévoré le monde.

Signe que le cinéma de genre français se réveille avec de plus en plus de hargne et de créativité, c’est désormais le film de zombie qui se paie un réveil bienvenu sous nos latitudes. Histoire que vous ne ratiez pas cette proposition affamée, voici 5 raisons de ne pas rater cette œuvre adaptée du roman de Pit Agarmen, en salles le 7 mars prochain.

 

 

LE ZOMBIE COMME ON L’AIME

S’il est bien un genre qui paraît essoré, en dépit de sa grande popularité, c’est le zombie flick. Décliné à toutes les sauces cinématographiques et revenu sur le devant de la scène après l’avènement de 28 jours plus tard et de ses infectés enragés, ce type de récit a vu son couronnement – et sa léthargie – advenir avec le succès mondial de Walking Dead.

 

Photo Anders Danielsen LieAnders Danielsen Lie

 

Par conséquent, c’est toujours avec la crainte de tomber sur un exercice de style un peu artificiel et désincarné qu’on se penche sur un nouveau trip plein de morts-vivants. Preuve qu’il ne faut jurer de rien, La Nuit a dévoré le monde trace un sillon singulier dans ce type de productions et s’offre même de vraies trouvailles.

En montrant peu ses zombies, mais en assumant totalement leur brutalité, en ne donnant jamais l’ascendant physique à son héros, Dominique Rocher nous plonge frontalement dans une apocalypse anthropophage redoutable. Et c’est son travail du son qui achève de parfaire les moments de tension du métrage. Plutôt que d’opter pour un mixage brutal qui se contenterait de transformer ses zombies en meute rugissantes, c’est le son des pas et la spatialité que privilégie le metteur en scène. Le résultat s’avère non seulement claustrophobique, mais aussi incroyablement efficace dès lors qu’il est question d’établir l’arrivée d’une menace.

 

Photo Anders Danielsen LieUne vision pertinente et terrible de Paris

 

FRENCH FRAYEUR

Comment s’approprier un genre essentiellement américain ? Dominique Rocher y est parvenu de la plus simple des manières : en greffant le mort-vivant au sein d’un cadre typiquement français, à savoir un immeuble Haussmanien. L’effet est immédiat, car quand la problématique du genre surgit (au bout de quelques minutes de film), elle rencontre organiquement un univers inhabituel.

Comment  une apocalypse putrescente et cannibale se répand-elle et évolue-t-elle dans ce décor que nous connaissons tous parfaitement ? On se souvient qu’une logique similaire avait animé [Rec] de Plaza et Balaguero, leur permettant de marier très harmonieusement infectés et culture hispanique. Et pour exactement les mêmes raisons, les lieux que traverse l’anti-héros de La Nuit a dévoré le monde font de ce songe horrifique un cauchemar éminemment français, et donc inhabituel sur nos écrans.

 

PhotoDe l'importance de rafraîchir son intérieur

 

DENIS LAVANT

Subtil mélange de turbine imaginative, de ressort indestructible et de pantomime de l’apocalypse, Denis Lavant est ce miracle sans cesse renouvelé du cinéma français, virtuose et imprévisible. En bon couteau suisse, il tient ici un rôle parfaitement inattendu, bruyant et muet, immobile et physique, poétique et funèbre. Le parallèle avec le Bub du Jour des morts-vivants, quand bien même Dominique Rocher ne cherche pas du tout à en dupliquer la mécanique, est à la fois évident et passionnant, sorte de passerelle mortelle entre deux oeuvres et deux époques. C’est encore le réalisateur du film qui en parle le mieux.

« À ce moment, notre personnage principal entre dans la solitude, et il nous fallait une interface qui ne soit pas une simple surface à laquelle il s’adresse. Au moment de penser le rôle de Denis, je pensais à Seul au monde, il nous fallait notre Wilson. »

Et si Dominique Rocher n’est pas – encore – Robert Zemeckis, Denis Lavant, c’est quand même mieux qu’un ballon.

 

PhotoDenis Lavant comme vous ne l'avez jamais vu 

 

ANTISOCIAL TU PERDS TON SANG FROID

La Nuit a dévoré le monde nous précipite donc aux côtés d’un homme seul, retranché dans un immeuble parisien alors que la ville autour de lui sombre dans le chaos le plus total. Cette position d’assiégé nous renvoie bien sûr à Je Suis une Légende, dont le métrage est une bien meilleure adaptation que le film de Francis Lawrence.

C’est donc aussi à une horreur existentielle que le spectateur devra faire face, alors que se pose la question de pourquoi survivre, dans un monde déserté de toute humanité. Simultanément, la narration en profite pour interroger la société française en auscultant son décor. Cette immeuble recèle ainsi nombre d’espaces, comme autant de solitudes et de bulles d’aliénation, qui raconte brillamment la solitude d’un pays où les individus semblent avoir renoncé à tout horizon collectif.

 

PhotoDes voisins pas super chaleureux

 

ANDERS DANIELSEN LIE

Vous avez pu le voir dans Oslo, 31 août ou encore dans Personal Shopper. L’acteur fétiche de Joachim Trier est également médecin et batteur. Ce cocktail détonnant se retrouve jusque dans la présence physique de l’artiste, mélange étonnant de pur magnétisme, de vulnérabilité et d’électricité toujours sur le point de surgir. Les origines norvégiennes d’Anders Danielsen Lie, loin de limiter son jeu, consacrent son statut d’outisder, d’étranger isolé, là où son corps nous permet d’établir avec lui une communication évidente, essentielle, qui confère au film une tension inhabituelle et constante.

La Nuit a dévoré le monde remporte haut la main deux défis de taille. Celui de s’imposer comme un bon film de zombie, et celui de proposer un mort-vivant hexagonal, sorte de contre-modèle passionnant, qui questionne et attaque la culture française avec les dents. On n’en demandait pas tant, et on en reprendrait bien une tranche sanguinolente.

 

Affiche

Tout savoir sur La Nuit a dévoré le monde

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commentaires
Dennis
13/05/2018 à 11:07

When will it be out on DVD?

Cyril
25/04/2018 à 16:31

Si le film est à la hauteur du livre... mangez-en !

Domi
06/03/2018 à 20:24

A lire ce commentaire si intelligent et qui ne dissimule pas touten soulignant le pastiche d'un genre que l'on croyait épuisé l'efficacité terrifiante du film, je suis déjà sous le charme.

Sylvie
04/03/2018 à 01:37

À matrice de ce genre de film, j'ai hâte de le voir.

goti
02/03/2018 à 20:21

À voir également, Les Affamés, dans le même genre mais venant du Québec.

Ratatak
02/03/2018 à 18:39

Merci le spoil...