Critique : When animals dream

Chris Huby | 21 mai 2014
Chris Huby | 21 mai 2014

Marie est une jeune femme marginale et solitaire. Vivant près de la mer, elle a pourtant bien du mal à s'intégrer et à se faire comprendre du monde extérieur. De fait sa famille semble cacher un terrible secret, celui de la lycanthropie.

Le film fait immédiatement penser à Morse de Tomas Alfredson dans son choix naturaliste et dans l'écriture des personnages, sans toutefois traiter du même sujet. Ici on a plus affaire à une réflexion sur la venue de la sexualité adolescente dans un milieu conservateur et répressif. Si l'on devait s'orienter vers une seule référence, ce serait donc celle de Carrie de De Palma, modèle sous-jacent qui habite inconsciemment l'écriture très particulière et très maitrisée du scénario.

D'une facture extrêmement classique, When Animals Dream propose pourtant un traitement équilibré entre le documentaire cru sur un petit village rigide danois et la vision fantasmée d'une post ado qui tente vaille que vaille d'exister pour elle-même. Le contexte familial est fort : alors que la mère de Marie passe ses journées dans une chaise roulante, son père tente de la contrôler le plus possible, notamment à la venue des « crises », des moments hystériques d'une sexualité qui ne peut s'exprimer et qui demande pourtant une libération immédiate.

Les thématiques œdipiennes de l'interdit et celles de la castration sont donc présentes via une foule de symboles très définis. Religieux, corporels et naturalistes, ils élargissent le champ de la réflexion autour de la venue du désir inconnu et finalement conformé dans une société coincée psychologiquement. Symbole féminin fort, l'eau est d'ailleurs l'élément le plus présent tout au long du film, comme si celle-ci n'était jamais calmée, cachant des désirs et des pulsions intenses et s'acharnant sur un rivage toujours inatteignable.

Le corps féminin est évidemment exploité dès les premières images. L'héroïne se trouve chez son médecin traitant qui la surveille et la cloisonne. Par la suite étriqué, le corps ne demande qu'à s'ouvrir, à l'aune des rencontres et des envies naissantes. Les touffes de poils apparaissent ici et là, d'abord comme une honte et une peur, puis finalement comme quelque chose d'entièrement assumé, voire de revendiqué. Le féminin acquiert alors toute sa place dans la monstruosité qu'elle propose aux différents personnages masculins qui n'acceptent pas son existence. Le loup-garou qui se jette au cou des hommes pour les déchiqueter n'en acquiert que plus de justification souterraine, loin des sentiers battus de ce que l'on avait vu jusque-là sur le même sujet.

En bref : une réussite tant visuelle que narrative qui mérite que l'on s'y attarde.

Résumé

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.

Lecteurs

(0.0)

Votre note ?

commentaires
Aucun commentaire.
votre commentaire