Critique : Aime et fais ce que tu veux

Christophe Foltzer | 2 janvier 2014
Christophe Foltzer | 2 janvier 2014

Après Elles en 2011, voir Malgoska Szumowska revenir avec un sujet comme Aime et fais ce que tu veux n'est finalement pas une surprise. Réflexion sur l'amour, la passion, la place des sentiments face à la morale (religieuse en l'occurrence), Aime... part d'un postulat plus qu'intéressant parce que finalement peu traité au cinéma de nos jours : la vie sexuelle du clergé. Evacuons tout de suite les clichés, puisqu'il ne s'agira pas ici de gars en soutanes se comptant fleurette ou de vieux curés tripotant des petits enfants. Simplement le récit d'un homme, Adam, prêtre sur le tard, dont la vie n'a pas été facile, qui se prend d'affection pour un jeune rebelle de sa paroisse et qui tente, vaille que vaille, de vivre son homosexualité sans enfreindre son code moral. Entre dogmatisme et pulsionnel, l'équilibre ne sera pas facile à trouver.

Cette notion d'équilibre vaut aussi pour le film puisque, au final, Aime et fais ce que tu veux se révèle bien bancal. Outre de gros problèmes de rythme qui plombent énormément le film, le scénario souffre de sacrés soucis de cohérence, de personnages peu exploités, de confusion embarrassante. En effet, la relation entre Adam et le jeune homme n'est finalement jamais totalement exploitée, il ne se passe pas grand-chose entre eux et il est donc bien difficile de croire que ce jeune éphèbe ait des sentiments pour le prêtre. Nombre de séquences sont consacrées à des péripéties annexes qui, si elles enrichissent la thématique générale, n'ont que peu d'intérêt pour la dramaturgie du scénario, entraînant ainsi de curieux raccourcis et des méprises concernant certains personnages secondaires (difficile de savoir qui est qui au final). La scène de procession est à ce titre emblématique de cette non-maîtrise : un long défilé sur fond de musique pop dont l'intérêt est évident mais dont la durée, exagérée, fait perdre le fil et achève un spectateur déjà bien circonspect. Et ce n'est pas le plan final qui soufflera le public tant il est mal préparé (impossible d'être touché quand on ne connait pas vraiment le personnage concerné et qu'on n'y est pas connecté émotionnellement).

Pourtant, Aime et fais ce que tu veux est loin d'être un navet. Techniquement, le film se tient de bout en bout, il offre au public une photographie magnifique et une ambiance minimaliste alternant le froid et le chaud de façon efficace et bienvenue. Le casting est plus que convaincant. Andrzej Chyra est excellent dans le rôle du prêtre, sensible, torturé, fou mais généreux et bienveillant. Face à lui, Mateusz Kosciukiewicz convainc forcément moins dans son rôle de jeune éphèbe. Son personnage n'étant pas suffisamment écrit pour en faire un partenaire à la hauteur, il faut quand même reconnaître à l'acteur un talent évident pour nous le rendre crédible lors de rares moments de grâce.

Aime et fais ce que tu veux, malgré tous ces défauts et un ennui progressif à mesure qu'avance une histoire finalement cousue de fil blanc, mérite néanmoins qu'on s'y intéresse, ne serait-ce que pour son sujet ou la sensibilité formelle dont fait preuve la réalisatrice.

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